ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

 

Audience publique du 23 novembre 2017

Pourvoi : n° 096/2015/PC du 05/06/2015

Affaire :  1. SHIPTRAFOR COMPANY LTD

  1. ZAMA GERALD NJI
  2. NGUM LYDIA TCHEZAMA
  3. NSU PETER FORTIBUI

                          (Conseil : Maître Robert NSO FON, Avocat à la Cour)

contre

                AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION LTD

                      (Conseil : Maître AKUM N. Michael, Avocat à la Cour)

 

 

Arrêt N°208/2017 du 23 novembre 2017

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires(OHADA), Troisième chambre, a rendu l’arrêt suivant en son audience publique du 23 novembre 2017 où étaient présents :

 

 

Messieurs    César Apollinaire ONDO MVE,                       Président, Rapporteur

Namuano Francisco DIAS GOMES,                    Juge

Djimasna N’DONINGAR,                              Juge

 

et Maître    Alfred Koessy BADO,                                   Greffier ;

 

 

 

Sur le recours enregistré au Greffe de la Cour de céans le 05 Juin 2015 sous le n°096/2015/PC et formé par Maitre Robert NSO FON du Cabinet d’avocats MBUFONZAK LAW FIRM, Barreau du Cameroun, demeurant à Bamenda au Cameroun, B.P. 673, agissant pour le compte de la SHIPTRAFOR COMPANY Ltd, société à responsabilité limitée dont le siège est à Douala au Cameroun, quartier Akwa, B.P.17349, et de ZAMA Gerald NJI, Directeur Général de la Société SHIPTRAFOR COMPANY, demeurant au siège de ladite société, NGUM Lydia TCHEZAMA, domiciliée à Bamenda au Cameroun, quartier Ntarikon, et NSU Peter FORTIBUI, domicilié à Bamenda, quartier Mile 7 à Mankon, dans le différend qui les oppose à AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION Ltd,  établissement de microfinance dont le siège social est à Bamenda, derrière le Stade Municipal, BP 253, ayant pour Conseil Maitre AKUM Michael NCHE, Avocat à la Cour à Bamenda, y demeurant, BP 540, en cassation de l’arrêt rendu le 07 mai 2015 par la Cour d’Appel de la Région du Nord-Ouest Cameroun ayant :

 

  • ordonné au président du Tribunal de Grande Instance de MEZAM de fixer une date de la vente aux enchères des biens hypothéqués en vue du recouvrement de la créance principale de 234.695.563 FCFA ;
  • dit que les deux autres frais et dépenses accordés par le Tribunal d’un montant de 3.450.000 FCFA seront également recouvrés sur le produit de la vente aux enchères ;
  • condamné les appelants à payer 1.000.000 de FCFA à la défenderesse au titre des dépens de l’instance ;
  • ordonné l’exécution immédiate de la décision ;

 

Les demandeurs invoquent au soutien de leur recours les quatre moyens de cassation tels qu’ils figurent dans leur requête annexée au présent arrêt ;

 

Sur le rapport de Monsieur le Second Vice-Président César Apollinaire ONDO MVE ;

 

Vu le Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

 

Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

 

Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que courant août 2010, la Société SHIPTRAFOR COMPANY a obtenu un prêt de cent dix millions (110.000.000) de FCFA auprès de l’établissement de microfinance AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION, remboursable en principal, intérêts et frais dans un délai de trois mois ; qu’en garantie de ce crédit, ZAMA Gerald NJI, agissant en qualité de Directeur Général de la Société SHIPTRAFOR COMPANY et à titre personnel, a signé avec AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION, les 30 et 31 août 2010, des actes d’hypothèques sur les titres fonciers référencés à Bamenda, n°7819 Vol.39, folio 117 du 24 février 2009, portant sur une parcelle de 673 mètres carrés, et n°7743 Vol.39, folio 41, relatif à une parcelle de 2745 mètres carrés, copropriétés de ZAMA Gerald NJI, NSU Peter FORTIBUI et  NGUM Lydia TCHEZAMA, ainsi que sur le titre foncier n°1122 Vol.6, folio 128 du 16 août 1985 portant sur une parcelle de 1495 mètres carrés, appartenant à NGUM Lydia TCHEZAMA, laquelle a, à cet effet, délivré, le 31 août 2010, une procuration à ZAMA Gerald NJI; que face à défaillance de la Société SHIPTRAFOR COMPANY dans l’exécution de ses engagements, AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION a décidé de faire jouer les garanties hypothécaires en délaissant, par exploit du 20 avril 2013, un commandement préalable à ZAMA Gerald NJI, NGUM Lydia TCHEZAMA et NSU Peter FORTIBUI, avec sommation d’avoir à lui payer la somme de deux cent quarante trois millions six cent quatre-vingt-quinze mille cinq cent soixante trois (243.695.563) FCFA en principal et autres frais ; que ce commandement étant resté sans suite, il l’a signifié à la Conservation foncière et, par exploit du 08 juin 2013, il a sommé ZAMA Gerald NJI, NGUM Lydia TCHEZAMA et NSU Peter FORTIBUI, d’avoir à prendre connaissance du cahier des charges déposé au Tribunal de Grande Instance de Mezam, auprès duquel il a par ailleurs déposé une requête en taxation des frais de poursuites ; que par décision du juillet 2013, le Tribunal a fixé lesdits frais de poursuites à quatre millions huit cent cinquante mille (4.850.000) FCFA; que statuant sur les dires et observations des saisis, le Tribunal a rejeté ceux-ci, ordonné la remise de l’adjudication des immeubles saisis, fixé à deux cent trente quatre millions neuf cent quarante un mille quinze (234.941.015) FCFA le montant de la dette et des frais de procédure tels que mentionnés dans le cahier des charges, taxé à trois millions cent cinquante mille (3.150.000) FCFA les frais de Maitre AKUM Michael NCHE, Conseil du créancier, et fixé à trois cent mille (300.000) FCFA les frais de l’audience éventuelle non compris dans le cahier des charges ; que l’arrêt objet du présent recours a été rendu sur appel interjeté contre ledit jugement par la Société SHIPTRAFOR COMPANY, ZAMA Gerald NJI, NGUM Lydia TCHEZAMA et NSU Peter FORTIBUI ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens réunis

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation des dispositions des articles 4, 119, 123, 128 et 129 de l’Acte uniforme portant organisation des suretés, et de l’article 247 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, en ce que la Cour d’Appel a statué comme elle l’a fait, alors que AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION n’a aucune qualité pour agir, car seule une hypothèque consentie dans les conditions de la loi peut lui conférer le droit d’initier une procédure de saisie-immobilière ; qu’en l’espèce et selon les requérants, les actes d’hypothèque invoqués ne répondent pas aux exigences des textes susvisés, en ce que le cautionnement ayant conduit à leur établissement n’est pas conforme aux prescriptions légales et ces conventions qui portent sur des immeubles non immatriculés ne sauraient caractériser un titre exécutoire fondant une saisie- immobilière ; que ces actes sont donc entachés de nullité et la décision attaquée qui en a admis la validité encourt la cassation ;

Attendu cependant que la présente affaire est relative à une procédure de saisie-immobilière consécutive à des conventions d’hypothèques ; qu’elle ne porte ni sur un cautionnement ni sur un nantissement, sûretés concernées par les  articles 4, 119, 123, 128 et 129 de l’Acte uniforme portant organisation des suretés visés au moyen ; que ces textes sont donc inopérants en l’espèce ; que par ailleurs, l’arrêt attaqué a suffisamment répondu au moyen relatif à l’absence d’immatriculation jugée irrecevable en appel, car justiciable devant le Tribunal saisi de la procédure de saisie-immobilière, conformément aux dispositions de l’article 299 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; que les moyens ne sont pas fondés et doivent par conséquent être rejetés ;

 

Sur le quatrième moyen de cassation tiré de la contestation du montant de la créance poursuivie

 

Attendu que le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir décidé que les immeubles saisis seront vendus aux enchères publiques pour le recouvrement d’une créance évaluée en principal à la somme de deux cent quarante trois millions six cent quatre-vingt-quinze mille cinq cent soixante trois (234.695.563) FCFA, alors que la somme accordée à la Société SHIPTRAFOR COMPANY était de cent dix millions (110.000.000) de FCFA au taux d’intérêt de 2% pour une période de trois mois et que la créance de AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION devait normalement s’élever à cent seize millions six cent mille (116.600.000) FCFA en principal et intérêts ; que selon les requérants, la Cour, en statuant comme elle l’a fait, n’a pas donné de base légale à sa décision qui encourt dès lors la cassation ;

 

Attendu cependant qu’en page 7 de l’arrêt déféré, la Cour, procédant d’une appréciation souveraine des éléments du dossier de la procédure, a suffisamment justifié le montant de la créance de AZIRE COOPERATIVE CREDIT UNION ; que le moyen manque donc de fondement et doit être rejeté;

 

Attendu qu’aucun moyen n’étant fondé, il échet de rejeter le pourvoi ;

 

Attendu que les demandeurs ayant succombé, il y a lieu de les condamner solidairement aux dépens ;

 

 

PAR CES MOTIFS 

Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;

Rejette le pourvoi ;

Condamne solidairement les demandeurs aux dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :

 

 

 

Le Président 

Le Greffier