Le 04 mai 2023, le décret n° 2023/232 fixant les modalités d’application de la loi n° 2019/008 du 25 avril 2019 portant Code pétrolier a été publié selon la procédure d’urgence (le « Décret d’Application »).

Ce Décret d’Application a été promulgué conformément à l’article 137 de la loi n °2019/008 du 25 avril 2019 portant Code pétrolier (le « Code Pétrolier ») qui prévoit en effet que ses modalités d’application seront fixées par voie réglementaire.

Ainsi, quatre (04) ans après l’entrée en vigueur du Code Pétrolier, son Décret d’Application, tant attendu vient abroger toutes les dispositions du précédent décret n °2000/465/PM du 30 juin 2000 fixant les modalités d’application de la loi n° 99/013 du 22 décembre 1999 portant code pétrolier ; Ce décret antérieur, qui restait en vigueur, paraissait anachronique et en déphasage avec l’actuel Code Pétrolier.

Ce nouveau texte vient apporter des précisions majeures et des clarifications significatives permettant de concrétiser les réformes du secteur pétrolier amorcées par le Code Pétrolier, cela dans le but de rendre le secteur pétrolier amont plus attractif et plus compétitif en Afrique, concrétiser et améliorer la promotion des opérations pétrolières sur l’ensemble du territoire, in fine, sauvegarder au mieux les intérêts du Cameroun face aux firmes pétrolières toujours plus puissantes.

C’est fort de ce qui précède que nous analyserons ci-dessous (1) les titres pétroliers (2) les opérations pétrolières.

  1. LES TITRES PETROLIERS

Le titre pétrolier peut être appréhendé comme un acte juridique attestant de la propriété ou des droits d’exploitation d’une ressource pétrolière spécifique. Il est délivré par un gouvernement ou une autorité compétente à une société pétrolière, lui accordant ainsi le droit exclusif d’explorer et d’exploiter un gisement pétrolier particulier. Dans certains cas, ce titre peut également conférer à son titulaire le droit de transporter des hydrocarbures à l’intérieur d’une région déterminée, depuis les installations de production jusqu’aux usines de traitement.

Dans le secteur pétrolier amont, il convient d’effectuer une distinction entre les différents titres pétroliers. En effet, il existe deux types de titres : les contrats pétroliers (1.1) et les autorisations (1.2). Ces titres revêtent une importance cruciale dans le domaine pétrolier, car ils régissent et contrôlent l’exploration, l’exploitation et le développement des ressources pétrolières.

Ils garantissent une gestion appropriée et réglementée du secteur pétrolier amont, tout en préservant les intérêts des parties impliquées et en favorisant le développement économique et énergétique d’une nation.

Parallèlement, il est important de souligner l’importance des mesures incitatives (1.3) dans le secteur pétrolier amont. Ces mesures sont mises en place par les gouvernements ou les autorités compétentes afin de stimuler les investissements et de favoriser le développement durable de l’industrie pétrolière.

  • Les contrats pétroliers

Le Code Pétrolier fait état de la nature protéiforme du contrat pétrolier en le définissant comme étant un contrat de concession, un contrat de partage de production ou un contrat de services à risques, conclu entre l’Etat et un titulaire pour effectuer, à titre exclusif, la recherche et l’exploitation des hydrocarbures à l’intérieur d’un périmètre défini[1].

Le contrat de concession, est un contrat pétrolier attaché à un permis de recherche d’hydrocarbures (et, s’il y a lieu, à une ou plusieurs concessions d’exploitation), en vertu duquel le titulaire assume le financement des opérations pétrolières et dispose des hydrocarbures extraits pendant la période de validité dudit contrat, sous réserve des droits de l’Etat de percevoir la redevance en nature[2].

Le contrat de concession constitue l’une des formes les plus courantes de contrat pétrolier. Il octroie au titulaire des droits étendus sur le périmètre concerné, lui permettant d’effectuer la prospection, l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures. En contrepartie, le titulaire assume la responsabilité des investissements nécessaires ainsi que des risques associés aux opérations.

D’autre part, le contrat de partage de production est un mécanisme contractuel où l’État et le titulaire se partagent la production pétrolière obtenue. Par le contrat de partage de production, l’Etat, directement ou par l’entremise de la Société Nationale des hydrocarbures (« SNH »), contracte les services d’un titulaire en vue d’effectuer pour le compte de l’Etat et de façon exclusive, à l’intérieur du périmètre défini, les activités de recherche et, en cas de découverte d’un gisement d’hydrocarbures commercialement exploitable, les activités d’exploitation[3].

Enfin, le contrat de services à risques implique généralement une société pétrolière spécialisée qui fournit des services techniques et opérationnels pour mener les activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures.

Par ce contrat, l’Etat ou la SNH confère, à une personne qualifiée qui assume les risques de financement, l’exercice des droits exclusifs de recherche et d’exploitation d’hydrocarbures à l’intérieur d’un périmètre défini. La rémunération du titulaire se fait en espèces dans ce cas[4].

Le Décret d’Application est venu apporter des précisions sur plusieurs modalités des contrats pétroliers. Il convient ainsi de présenter les précisions relatives aux dispositions diverses sur les contrats pétroliers, celles relatives à leur transmission ; celles relatives au prix des hydrocarbures exploités, au contenu local et au changement de régime pétrolier.

  • Dispositions diverses sur les contrats pétroliers

Le Décret d’Application apporte diverses dispositions générales applicables aux contrats pétroliers[5]. Tout d’abord, le titulaire d’un contrat pétrolier peut demander une extension de son périmètre contractuel s’il peut prouver la découverte ou l’extension d’un gisement pétrolier en dehors des limites de l’autorisation de recherche ou d’exploitation.

Cette extension peut entraîner une renégociation des termes économiques du contrat pétrolier, à la discrétion de l’État.

Ensuite, lorsque la demande d’un contrat pétrolier concerne l’exploitation de gisements déjà découverts, la conclusion du contrat donne lieu à l’institution d’une autorisation d’exploitation par décret présidentiel. Toutefois, dans le cas d’un contrat de partage de production, la signature du contrat permet le démarrage des activités de développement et d’exploitation des hydrocarbures avant la publication du décret instituant l’autorisation d’exploitation correspondante.

Une autre disposition concerne la possibilité de conclure deux contrats pétroliers distincts, l’un pour l’exploitation des hydrocarbures liquides et l’autre pour l’exploitation du gaz naturel, sur un même périmètre. Les conditions de cette situation sont définies entre l’État et le titulaire du contrat pétrolier le plus ancien sur le périmètre concerné.

Cette nouvelle disposition nous a particulièrement interpellés. La possibilité de conclure deux contrats pétroliers distincts pour l’exploitation des hydrocarbures liquides et du gaz naturel sur un même périmètre peut présenter plusieurs risques et difficultés pratiques notamment des interférences opérationnelles car l’exploitation des hydrocarbures liquides et du gaz naturel implique souvent l’utilisation d’infrastructures et d’équipements communs tels que les puits, les pipelines et les installations de traitement. La coexistence de deux contrats distincts peut entraîner des challenges relatifs à la gestion et l’utilisation de ces infrastructures partagées.

La gestion des ressources pourra également être une difficulté d’application de cette disposition car la coexistence de deux contrats distincts peut rendre plus complexe la gestion des ressources présentes sur le même périmètre. Il peut y avoir des chevauchements ou des divergences dans l’estimation des réserves et des volumes de production, ce qui peut poser des défis pour la planification et l’optimisation de l’exploitation.

Aussi, d’un point de vue plus pratique, la coopération entre les titulaires de contrats pétroliers sera un autre défi. Ces titulaires doivent coopérer étroitement pour assurer une exploitation harmonieuse et efficace des hydrocarbures sur le même périmètre. Cela nécessite une coordination étroite, des échanges d’informations transparents et des mécanismes de prise de décision clairs, ce qui peut représenter un défi en termes de communication et de coopération entre les parties concernées.

Bien entendu, la coexistence de deux contrats pétroliers distincts peut également soulever des questions en termes de réglementation et de fiscalité. Il peut être nécessaire d’établir des règles claires pour déterminer les obligations réglementaires et fiscales de chaque titulaire de contrat, afin d’éviter les conflits ou les incohérences.

Lorsqu’un nouveau contrat pétrolier est conclu pour l’exploitation du gaz naturel sur un périmètre déjà attribué, il peut être nécessaire de renégocier certains termes du contrat initial. Cela peut inclure des ajustements des redevances, des obligations environnementales ou des conditions de partage des coûts et des bénéfices. La renégociation peut être complexe et nécessiter un accord mutuel entre l’État et le titulaire du contrat pétrolier initial. Dans tous les cas, une gestion prudente, une coordination efficace et une communication ouverte entre les parties concernées sont essentielles pour minimiser les risques et maximiser les avantages potentiels de la coexistence de deux contrats pétroliers sur un même périmètre.

Enfin, les titulaires de contrats pétroliers sont soumis à un contrôle annuel de leurs obligations, réalisé conjointement par le Ministère des Mines, de l’Industrie et du Développement Technologique (ci-après, le « MINMIDT ») en charge des Hydrocarbures dont copie est transmis parallèlement à la SNH. Un rapport est produit, répertoriant les obligations remplies et celles qui restent à remplir envers la République du Cameroun. Les titulaires sont ainsi tenus de régulariser leur situation dans les meilleurs délais, le cas échéant. Cette surveillance garantit le respect des engagements pris dans le cadre des contrats pétroliers et renforce la responsabilité des titulaires envers l’État[6].

  • La transmission des contrats pétroliers

Le Décret d’Application traite de la transmission des contrats pétroliers. Pour conclure ce type d’opération, le titulaire doit obtenir l’approbation préalable du MINMIDT et la conclusion d’un avenant lorsque ces droits résultent du contrat pétrolier[7]. La demande comprend divers renseignements et documents relatifs aux différentes parties.

Les bénéficiaires de droit de préemption[8] ont la possibilité de négocier avec le titulaire du contrat pétrolier ; Ils sont réputés avoir renoncé à l’exercice de ce droit de préemption s’ils ne se manifestent pas dans un délai de quatre-vingt-dix (90) jours suivant la notification du projet de transmission. Le MINMIDT, après avis de la SNH, statue sur la demande d’approbation préalable dans un délai de quatre-vingt-dix (90) jours, à compter de la date de notification de la recevabilité de la demande[9].

  • Le prix des hydrocarbures

Selon le Décret d’Application, la valeur des hydrocarbures produits sous contrat pétrolier est déterminée par le “prix du marché”. Les hydrocarbures sont vendus conformément aux Incoterms et leur valeur est établie au point de livraison prévu. Pour les hydrocarbures liquides, le prix est comparé au Brent de la Mer du Nord et doit refléter la valeur sur le marché international. Pour les hydrocarbures gazeux, les prix varient en fonction de la destination et sont homologués pour le marché domestique. Des commissions paritaires fixent les prix trimestriels des hydrocarbures liquides. En cas de désaccord, un prix provisoire peut être appliqué. Les différends peuvent être résolus par un expert[10].

La fixation des prix trimestriels par des commissions paritaires peut être perçue comme une mesure visant à équilibrer les intérêts des différentes parties prenantes. Cependant, il est important de veiller à ce que ces commissions soient indépendantes, transparentes et représentatives de l’ensemble de l’industrie pour éviter tout favoritisme ou déséquilibre.

  • Du contenu local

Le Code Pétrolier conçoit le contenu local comme étant un ensemble d’activités de l’industrie pétrolière camerounaise axé sur le développement des capacités locales, l’utilisation des ressources humaines et matérielles locales, le transfert de technologie, I’utilisation des sociétés industrielles et de services locaux et la création d’une valeur ajoutée mesurable pour l’économie locale.

Le Décret d’Application précise la consistance du contenu local dans le secteur pétrolier au Cameroun. Il englobe en effet, le développement des ressources humaines, le transfert de technologie et l’utilisation des sociétés et services locaux. Les contrats pétroliers doivent inclure des stipulations concernant l’emploi des nationaux, la formation, le transfert de technologie et l’utilisation des sociétés locales. Des mesures de suivi et d’évaluation sont prévues pour assurer leur mise en œuvre. Les titulaires de contrats pétroliers doivent privilégier l’emploi de camerounais, mettre en place des programmes de formation, collaborer pour le transfert de technologie et favoriser les sociétés camerounaises.

Le MINMIDT et la SNH supervisent ces mesures en collaboration avec les administrations concernées[11].

L’objectif de promouvoir le transfert de technologie est crucial pour favoriser le développement industriel et la compétitivité à long terme du pays. Cependant, il est essentiel de veiller à ce que les dispositions concernant le transfert de technologie soient claires, contraignantes et qu’elles garantissent un partage équitable des connaissances et des technologies entre les partenaires étrangers et les nationaux.

  • Le changement de régime pétrolier

Le changement de régime pétrolier modifie le cadre contractuel et réglementaire entre l’État et les sociétés pétrolières. Motivé par divers facteurs économiques, il nécessite la renégociation des accords existants pour mettre à jour les termes du contrat pétrolier. L’objectif est d’équilibrer les bénéfices entre les parties. Selon le Décret d’Application, les sociétés peuvent demander un changement de régime en respectant les obligations contractuelles et en liquidant le régime précédent. La demande de changement est soumise au MINMIDT et à la SNH. Elle inclue des informations sur les activités, les investissements, la production et les réserves de la société demanderesse. Les offres de contrat sont négociées par la Commission Permanente pour le compte de l’État[12].

  • Les autorisations

Le législateur consacre cinq (05) principales autorisations dans le secteur pétrolier amont. On distingue ainsi : l’autorisation de prospection, l’autorisation de recherche, l’autorisation provisoire d’exploiter, l’autorisation d’exploitation et l’autorisation de transport intérieur.

  • L’autorisation de prospection

Selon le Code Pétrolier, l’autorisation de prospection[13] d’hydrocarbures ne constitue pas un titre minier d’hydrocarbure et n’est ni cessible, ni transmissible. Elle est accordée à une personne physique ou morale par un arrêté du MINMIDT qui en énonce les conditions, après avis technique de la SNH. L’autorisation de prospection confère à son bénéficiaire, dans un périmètre défini, le droit non exclusif d’exécuter des travaux préliminaires de prospection. Elle ne constitue pas un titre minier d’hydrocarbures[14].

La demande d’autorisation de prospection pétrolière est déposée auprès de la SNH, contre accusé de réception.

Le demandeur doit fournir des informations précises, telles que les coordonnées et la superficie du périmètre de prospection souhaité, ainsi qu’une carte détaillant les limites de la zone. La demande doit également inclure la durée, le programme et l’échéancier des travaux de prospection prévus, en tenant compte des préoccupations environnementales. Sur le plan administratif, le demandeur doit justifier son expérience antérieure et sa capacité financière, inclure une quittance de paiement des droits requis et fournir des informations détaillées s’il s’agit d’une personne morale. Le Décret d’Application précise les modalités d’octroi de l’autorisation, qui a une durée initiale de deux (02) ans avec possibilité de renouvellement. L’autorisation est notifiée par le Ministre dans un délai de quinze (15) jours et enregistrée dans le Registre Spécial des Hydrocarbures. En cas de négociations pour un contrat pétrolier, l’autorisation devient caduque sauf prolongation pour terminer les travaux en cours. Le titulaire doit communiquer les résultats des travaux et peut demander le renouvellement de l’autorisation en justifiant le respect de ses engagements. Le renouvellement est accordé après avis favorable de la SNH, et le demandeur est notifié dans les quinze (15) jours suivant la signature de l’arrêté[15].

  • L’autorisation de recherche et l’autorisation provisoire d’exploiter 
  • L’autorisation de recherche

En matière d’hydrocarbures, la recherche encore appelée exploration, renvoie aux activités de prospection détaillées, dont les forages d’exploration destinés à découvrir des gisements d’hydrocarbures commercialement exploitables, ainsi que les activités d’évaluation, de délimitation d’une découverte d’hydrocarbures présumée commerciale et l’abandon des puits d’exploration. Ainsi, par autorisation de recherche, on entend un acte juridique lié à un contrat pétrolier et pouvant revêtir deux formes distinctes : le permis de recherche d’hydrocarbures pour les contrats de concession, et l’autorisation exclusive de recherche pour les contrats de partage de production ou les contrats de services à risques[16]. Cette autorisation est accordée par décret du Président de la République. Cependant, la signature du contrat pétrolier constitue immédiatement l’octroi de l’autorisation de recherche, qui est ensuite officialisée par un décret présidentiel confirmant cet octroi.

L’autorisation de recherche confère au titulaire le droit exclusif d’entreprendre, à ses propres risques et frais, tous les travaux de prospection et de recherche d’hydrocarbures dans les limites du périmètre défini.

Le Décret d’Application encadre diverses modalités relatives à l’autorisation de recherche à savoir : la demande d’autorisation de recherche, l’instruction de la demande, l’octroi de l’autorisation, son renouvellement et la prorogation de sa validité. La procédure de demande, d’instruction, d’octroi et de renouvellement de l’autorisation de recherche d’hydrocarbures comprend plusieurs étapes et exigences[17].

  • La demande d’autorisation de recherche

La demande est soumise au MINMIDT, accompagnée de divers renseignements et documents, tels que des informations détaillées sur la société demandeuse, des preuves de compétences techniques et financières, des documents justifiant l’expérience en matière de protection de l’environnement, des détails sur le périmètre sollicité, un programme détaillé des travaux de recherche envisagés et des garanties financières.

  • L’instruction et l’octroi de la demande

La SNH examine la demande, peut demander des rectifications ou des compléments, et mène des enquêtes pour évaluer les garanties morales, techniques et financières offertes par la société requérante. Une fois jugée admissible sur le plan formel, la demande est notifiée à la société requérante et transmise au MINMIDT. Le Ministre examine la demande et, s’il reçoit un avis favorable de la SNH, prend une décision dans un délai maximum de trois (03) mois. L’autorisation de recherche est octroyée par décret présidentiel.

  • Renouvellement de l’autorisation de recherche

Le titulaire de l’autorisation peut demander le renouvellement de celle-ci jusqu’à deux (02) fois, pour une durée maximale de deux (02) ans à chaque période de renouvellement.

La demande de renouvellement doit être déposée auprès du MINMIDT, accompagnée de justifications de l’accomplissement des engagements, des périmètres de recherche demandés, des travaux effectués avec leurs résultats, et des documents justificatifs des modifications éventuelles aux statuts ou à la forme juridique de la société. Le Ministre examine la demande et prend une décision dans un délai maximum de trois (03) mois après la réception de la demande. Le renouvellement de l’autorisation est accordé par décret présidentiel.

  • Prorogation de délai

Le titulaire peut demander la prorogation de l’autorisation de recherche dans un délai de six (06) mois avant son expiration. La demande doit être accompagnée d’un rapport détaillant les travaux restant à accomplir, les motifs justifiant la demande et la durée souhaitée de la prorogation. Le MINMIDT examine la demande et prend une décision dans un délai maximum de deux (02) mois après la réception de la demande. La prorogation de l’autorisation est accordée par décret présidentiel, pour une durée maximale de douze (12) mois pour les hydrocarbures liquides et vingt-quatre (24) mois pour le gaz naturel et de production, le budget correspondant et le mode de financement envisagé.

Ce plan comprend une estimation détaillée des coûts d’exploitation, un programme précis de forage, le profil prévisionnel de production, le plan de valorisation du gaz naturel, les schémas, le calendrier de développement, les mesures de sécurité, les scénarios de développement, les dispositions pour l’abandon des gisements, le certificat de conformité environnemental et social, des informations sur l’opérateur, les capacités techniques et financières, des propositions pour le contenu local, le transfert de technologies et le développement durable, des programmes de formation et d’intégration des sociétés locales, ainsi que d’autres documents requis par le contrat pétrolier. Une quittance de paiement des droits fixes doit également être incluse.

  • L’autorisation provisoire d’exploiter

Pendant la période de validité d’une autorisation de recherche, le titulaire a la possibilité de solliciter l’octroi d’une autorisation provisoire d’exploiter, accordée par décret du Président de la République. Toutefois, cette autorisation provisoire d’exploiter n’a pas pour effet de proroger la période de validité de l’autorisation de recherche.

L’autorisation provisoire d’exploiter confère au titulaire le droit de réaliser des tests de production prolongés et/ou d’exploiter, à titre provisoire, les puits productifs pendant une période maximale de deux (02) ans. Pendant cette période, le titulaire est tenu de poursuivre la délimitation et l’évaluation du caractère commercialement exploitable du gisement concerné, conformément aux dispositions de l’article 32 et aux dispositions contractuelles[18].

Le titulaire d’une autorisation de recherche peut donc demander une autorisation provisoire d’exploiter pour une découverte d’hydrocarbures en cours de tests de production.

La demande d’autorisation provisoire d’exploiter doit être déposée auprès du MINMIDT, avec copie à la SNH, incluant les informations requises et une quittance de paiement des droits fixes.

La SNH vérifie le dossier de demande, puis donne son avis. Si la demande est recevable, elle est transmise au Ministre pour décision dans un délai de deux (02) mois. L’autorisation provisoire d’exploiter est octroyée par décret présidentiel pour une durée maximale de deux (02) ans non renouvelables. Elle peut être étendue à de nouveaux puits, sous réserve de l’avis favorable de la SNH et du respect de la validité de l’autorisation de recherche.

En cas d’expiration de l’autorisation de recherche, l’autorisation provisoire d’exploiter devient caduque, sauf accord préalable sur le développement du gisement et dépôt d’une demande d’exploitation. Elle peut également être retirée en cas de non-respect des obligations de travaux. Le retrait de l’autorisation de recherche entraîne automatiquement le retrait de l’autorisation provisoire d’exploiter correspondante.

  • L’autorisation d’exploitation

Le Code Pétrolier conçoit l’autorisation d’exploitation d’hydrocarbures comme un titre pétrolier qui rattaché à un contrat pétrolier est, soit une concession d’exploitation lorsqu’il s’agit d’un contrat de concession, soit une autorisation exclusive d’exploitation lorsqu’il s’agit d’un contrat de partage de production ou d’un contrat de services à risques. Nous nous appesantirons ici sur les modalités de la demande de cette autorisation, et son renouvellement[19].

  • La demande

Le Décret d’Application énonce les exigences essentielles pour la demande d’autorisation d’exploitation. La demande doit être déposée auprès du MINMIDT, avec une copie adressée à la SNH. Elle doit contenir diverses informations et documents requis. Cela inclut notamment les coordonnées et la superficie du périmètre d’exploitation, une carte topographique détaillée, un rapport de découverte complet avec des données techniques et économiques, une étude économique approfondie du projet de développement, un plan détaillé de développement et de production, des informations sur l’opérateur, les capacités techniques et financières du titulaire, les propositions concernant les installations, les investissements, les coûts et les revenus, les initiatives de contenu local et de développement durable, les programmes de formation et d’intégration des sociétés locales, ainsi que d’autres documents requis par le contrat pétrolier et une quittance de paiement des droits fixes[20].

  • Le renouvellement de l’autorisation

Le renouvellement d’une autorisation d’exploitation doit être demandée au MINMIDT dans un délai de trois (03) ans avant son expiration.

La demande de renouvellement doit être accompagnée d’un dossier mis à jour comprenant des informations sur les investissements réalisés, les profils de production, les infrastructures existantes, les réserves restantes, le contenu local, le transfert de technologie, le plan d’abandon, ainsi qu’une quittance prouvant le paiement des droits fixes obligatoires. Le dossier peut être rectifié et complété à la demande de la SNH. Le renouvellement de l’autorisation est décidé par le MINMIDT, après avis technique favorable, et est ensuite approuvé par décret du Président de la République pour une durée maximale de dix (10) ans. Si le titulaire n’a pas entrepris les activités d’exploitation dans les trois (03) ans suivant l’octroi de l’autorisation, ou s’il a suspendu les travaux pendant plus de six (06) mois, l’autorisation peut être retirée par l’État conformément aux dispositions du Code Pétrolier, sans droit à une indemnisation[21].

  • L’autorisation de transport intérieur

L’autorisation de transport intérieur s’entend comme une autorisation délivrée à tout titulaire d’autorisation d’exploitation, pour lui permettre de transporter les hydrocarbures issus de son exploitation par canalisations ou par tout autre moyen, à partir des installations de production jusqu’à des usines de traitement, de transformation ou à un terminal d’exportation. Il convient de présenter certaines modalités relatives à cette autorisation dont la demande et l’octroi[22].

La demande d’autorisation de transport intérieur est soumise par le titulaire de l’autorisation d’exploitation au MINMIDT, en accord avec la SNH[23]. Le dossier de demande doit comprendre des informations détaillées sur le projet de construction des canalisations et des installations annexes de transport. Cela inclut le tracé prévu, les caractéristiques de la construction, les plans à l’échelle, le programme de construction, l’étude de viabilité économique et financière, l’estimation des coûts, le tarif proposé, les informations de raccordement, le certificat de conformité environnemental et social, ainsi qu’une quittance de paiement des droits fixes.

Si le tracé traverse des territoires extérieurs ou est raccordé à des canalisations et installations extérieures, des documents supplémentaires sont requis. Il peut s’agir d’autorisations, de contrats et d’une lettre d’intention des partenaires potentiels.

L’autorisation de transport intérieur est accordée par décret du Président de la République, approuvant le projet de construction et le déclarant d’utilité publique. Le Décret d’Application intègre les dispositions concernant la validité de l’autorisation. Après l’octroi de l’autorisation, le MINMIDT saisit le Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières pour obtenir les autorisations nécessaires à la construction de l’ouvrage. L’autorisation de transport peut être transférée à des tiers sous certaines conditions, avec l’approbation de la SNH et du MINMDT, conformément aux procédures spécifiées dans le Code Pétrolier.

  • Les mesures incitatives

L’État, par le biais de la SNH, organisme responsable de la gestion de ses intérêts dans le secteur pétrolier, peut prendre des mesures d’incitation appropriées pour relancer les activités de recherche, d’exploitation et de production des hydrocarbures dans l’ensemble du domaine minier national, dans des circonstances exceptionnelles. Ces mesures d’incitation visent notamment à encourager l’exploration dans des zones difficiles d’accès sur terre ou en mer profonde au-delà de 200 mètres, ainsi que la mise en œuvre de programmes de récupération tertiaire pour accroître la productivité des gisements.

De plus, en cas de baisse significative des investissements dans le secteur pétrolier amont, des mesures d’incitation peuvent également être mises en place[24].

Ainsi, conformément au Code Pétrolier, les titulaires de contrats pétroliers en règle vis-à-vis de l’État et se conformant aux lois et réglementations en vigueur peuvent bénéficier de mesures incitatives dans le cas de circonstances exceptionnelles. Les sociétés pétrolières qui possèdent les capacités techniques et financières requises et qui ont des projets d’investissements solides visant à accroître durablement la production nationale de pétrole ou de gaz peuvent également bénéficier de ces mesures[25].

Ces sociétés doivent soumettre une demande ou une offre de contrat pétrolier au MINMDT et à la SNH, en fournissant des détails sur leur programme d’investissements, leur profil de production prévisionnel, leur modèle économique et la justification des incitations demandées.

Une fois la demande ou l’offre déposée, la SNH dispose de trois (03) mois pour déterminer leur recevabilité. Si elles sont jugées recevables, elles sont transmises à la Commission Permanente qui entreprend les démarches nécessaires en vue de la conclusion d’un contrat pétrolier avec l’État. Les incitations sont accordées aux sociétés pétrolières par le biais d’un avenant au contrat existant ou d’un nouveau contrat.

Le renouvellement d’une autorisation d’exploitation peut entraîner la renégociation des termes économiques du contrat pétrolier et l’obtention de mesures d’incitation, à la discrétion de l’État. Cependant, cela est conditionné par le respect des engagements contractuels, la soumission d’un plan de développement et d’exploitation, la capacité à remplir les critères d’octroi des incitations, et la fourniture des informations requises à l’État. Le contrat ou l’avenant au contrat pétrolier entre en vigueur après l’expiration de la période initiale de validité de l’autorisation d’exploitation, permettant au titulaire de poursuivre ses activités en attendant la signature du décret de renouvellement de l’autorisation.

  1. LES OPERATIONS PETROLIERES

D’un point de vue général, les opérations pétrolières font référence aux nombreux systèmes et processus auxquels les praticiens du secteur pétrolier ont recours quotidiennement pour gérer leurs activités. Il s’agit notamment des systèmes contribuant à l’accroissement de la productivité des puits, à l’évaluation des performances financières et opérationnelles, à la gestion des actifs, ainsi qu’à la préservation de la santé et de la sécurité. Dans le cadre de la deuxième partie de notre analyse, nous nous focaliserons sur les dispositions du Décret d’Application relatives aux opérations pétrolières à savoir :

(2.1) les relations avec les propriétaires du sol ; (2.2) les opérations pétrolières ; (2.3) le régime fiscal, douanier et du régime de change ; de la surveillance administrative ; et (2.4) les dispositions pénales.

  • Les relations avec les propriétaires du sol

Avant d’entreprendre toute occupation des terrains destinés aux opérations pétrolières par un titulaire d’autorisation ou de contrat pétrolier, il est impératif de procéder à une demande d’enquête foncière devant être soumise au MINMIDT et dont copie est transmis parallèlement à la SNH[26].

Suivant le dépôt de cette demande, une enquête proprement dite est conduite par la Commission d’enquête qui dispose d’un délai de six (06) mois pour rendre son rapport.

Les terrains concernés par les opérations foncières, suite à leur incorporation ou leur expropriation, doivent préalablement être soit immatriculés au nom de l’État du Cameroun, soit être intégrés au domaine public[27] artificiel[28]. Le droit de jouissance permettant l’occupation des terrains est attribué par décret du Premier Ministre aux titulaires de l’autorisation ou du contrat pétrolier. Pareillement, le paiement des impenses que pourraient éventuellement supporter les terrains du domaine national ou du domaine public touchés par ces mesures, tout comme l’indemnisation des propriétés privées affectées, sont effectués suivant un décret du Premier Ministre, conformément à la législation foncière et domaniale en vigueur.

Il est important de préciser que tout terrain n’est pas susceptible d’être occupé librement pour des opérations pétrolières, il existe des parcelles classées comme des périmètres de protection. Les périmètres de protection tel que prévu dans le décret n° 2000-465-17 du 30 juillet 2000 fixant les modalités d’application de la loi n° 99-013 portant code pétrolier (ci-après « l’Ancien Décret ») restent inchangés.

En effet, les terrains situés à moins de cinquante (50) mètres de tous les édifices religieux ou gouvernementaux ou affectés à un service public, les terrains situés à moins de mille (1000) mètres d’une frontière terrestre ou d’un aéroport ainsi que les terrains classés sites et réserves par l’Etat, sont classés comme des périmètres de protection à l’intérieur desquels les opérations pétrolières peuvent être soumises à certaines conditions ou interdites sans possibilité de réclamer d’indemnisation[29].

Nous comprenons que les opérations pétrolières à l’intérieur des périmètres de protection peuvent être soumises à certaines conditions ou même interdites, sans possibilité de réclamer d’indemnisation. Cette disposition soulève des préoccupations quant aux droits des titulaires de contrats pétroliers et à la prévisibilité des réglementations.

Il est important d’établir des critères clairs et transparents pour l’imposition de telles conditions ou interdictions, afin de garantir une application équitable et de prévenir toute atteinte injustifiée aux droits des parties concernées.

Par ailleurs, les périmètres de protection sont institués par décret du Premier Ministre qui définit en temps opportun les conditions techniques devant être respectés sur ces terrains. Toutefois, le respect de ces conditions ne dispense pas le titulaire du contrat pétrolier de l’obligation d’indemnisation qui est le sien[30]. En effet, l’assujettissement aux servitudes de passages donne droit dans le cas de terrains privés, à une indemnité fixée d’accord amiable entre les parties ou par le MINMIDT en cas de désaccord entre les parties[31].

  • L’exercice des opérations pétrolières

Le Code Pétrolier définit les opérations pétrolières comme étant l’ensemble des activités de prospection, de recherche, d’exploitation, de transport, de stockage et de traitement d’hydrocarbures relevant du secteur pétrolier amont, à l’exclusion des activités de raffinage, de stockage et de distribution des produits pétroliers et gaziers qui relèvent du secteur pétrolier aval[32]. Dans le cadre de l’exercice des activités pétrolières, les titulaires des contrats pétroliers et autres titres sont tenus de se conformer aux obligations qui leur sont imposées par le Décret d’Application.

  • L’obligation des titulaires de contrats pétroliers et autres

La conduite des opérations pétrolières doit se faire avec diligence et suivant les règles de l’art en usage dans l’industrie pétrolière internationale. A ce titre, les titulaires sont tenus de[33] : veiller à ce que tous ce qui est utilisé dans le cadre des opérations pétrolières demeurent en bon état et soit conforme aux normes admises dans l’industrie pétrolière ; d’assurer une utilisation rationnelle des ressources mis à leur disposition sur le périmètre contractuel ; éviter et prévenir des dommages aux formations en exploitation ; assurer que les hydrocarbures découverts ne s’échappent et ne se gaspillent pas ;

surveiller pendant l’exploitation les réservoirs ; assurer la conformité des moyens de stockage aux normes et pratiques en usage dans l’industrie pétrolière ;

mettre en place un système d’écoulement des hydrocarbures utilisés par les opérations pétrolières ; placer les rebuts et déchets dans des réceptacles construits à cet effet et disposer de ceux-ci conformément aux normes et pratiques admises dans l’industrie pétrolière internationale ; assurer la conformité des sous-traitants dans leurs domaines respectifs aux normes et pratiques généralement admises dans l’industrie pétrolière internationale ; et veiller à l’utilisation optimale des ressources humaines locales.

A l’exception de l’obligation de veiller à l’utilisation optimale des ressources humaines locales, toutes les autres obligations prévues dans le Décret d’Application sont conformes à celles prévues dans l’Ancien Décret[34].

Le Décret d’Application prévoit un retrait de l’autorisation et ou une déchéance du contrat pétrolier (sans préjudice de toutes les sanctions administratives, judiciaires et légales) en cas de non-respect des obligations du titulaire ceci suivant une mise en demeure adressée au titulaire restée infructueuse[35]. La mise en demeure est adressée par le MINMIDT suivant une saisie par la SNH. Le retrait de l’autorisation ou la déchéance du contrat pétrolier est prononcé par un décret du MINMIDT.

Outre les obligations mentionnées précédemment, il existe d’autres obligations liées aux notifications, aux rapports et aux programmes de travaux. Il peut ainsi être distingué[36] :

  • l’obligation d’informer le MINMIDT et la SNH quarante-huit (48) heures avant le début ou la reprise des opérations pétrolières ;
  • l’obligation de fournir au MINMIDT ainsi qu’à la SNH les rapports quotidiens de forage qui décrivent le progrès et les résultats desdites opérations ainsi que les différentes données de diagraphie enregistrées au cours du forage ;
  • l’obligation de fournir au MINMIDT et à la SNH dès le début des opérations pétrolières, des rapports périodiques (de façon mensuelle, trimestrielle, semestrielle et/ou annuelle) selon le calendrier précisé par le contrat pétrolier ;
  • l’obligation de conserver pendant les opérations de recherches, des copies des bandes digitales de données acquises à partir des travaux géologiques, géochimiques, géophysiques, d’ingénierie et de forage conduits dans le cadre d’un programme de travaux dûment approuvé selon les stipulations du contrat pétrolier ;
  • l’obligation de soumettre au MINMIDT ainsi qu’à la SNH, l’état, le programme annuel de travaux et le budget correspondant dans un délai maximum de trente (30) jours avant le début de chaque année civile ;
  • l’obligation de soumettre au MINMIDT et à la SNH, l’état pour approbation, un rapport prévisionnel annuel sur la production dans un délai maximum de trente (30) jours avant le début de chaque année civile ;
  • l’obligation de soumettre au MINMIDT et à la SNH un rapport annuel sur la production couvrant l’année civile précédente au plus tard le 31 mars de chaque année ;
  • l’obligation de tenir un registre de production, de vente, de stockage et d’exportation d’hydrocarbures pendant la phase d’exploitation.

Il est important de noter que l’obligation de fournir des rapports mensuels, trimestriels, semestriels et/ou annuels telle que prévue par le Décret d’Application est différente de ce qui avait été prévu par l’Ancien Décret. En effet, l’Ancien Décret prévoyait la transmission d’un rapport couvrant une période de six (06) mois ou de trois (03) mois selon les cas, en d’autres termes des rapports semestriels ou trimestriels[37].

Les délais de quarante-cinq (45) jours initialement prévus par l’Ancien Décret[38] pour soumettre en vue d’un examen le programme annuel de travaux et le budget ainsi qu’un rapport prévisionnel annuel est revu à la baisse par le Décret d’Application à trente (30) jours.

  • L’approvisionnement du Marché intérieur

L’approvisionnement du marché local apparait ici comme une obligation supplémentaire mais traitée séparément. Conformément au Code Pétrolier[39], le Décret d’Application prévoit en son Article 76 que lorsque le MINMIDT fait une demande pour satisfaire les besoins du marché intérieur camerounais, les titulaires de contrats pétroliers doivent en priorité vendre à l’état ou à la SNH une part de la production d’hydrocarbures lui revenant.  Ceci étant dans le but satisfaire en priorité les besoins du marché intérieur camerounais.

Comme modalités de cette obligation, il est prévu qu’une notification doit être faite par le MINMIDT en accord avec la SNH précisant les quantités nécessaires pour assurer l’approvisionnement du marché intérieur pour les six (06) mois à venir.

Bien plus, la quantité d’hydrocarbures ne doit pas excéder le total des besoins du marché intérieur camerounais multiplié par une fraction ainsi que le total de la production d’hydrocarbures qui revient à la République du Cameroun.

Enfin, le prix de cette vente est conforme au prix tel que détaillé dans le Décret d’Application. Il confère aux titulaires dans le but de satisfaire leurs obligations de pourvoir aux besoins du marché intérieur, la possibilité d’importer des hydrocarbures[40].

  • La protection de l’environnement et des mesures de sécurité

Afin d’assurer une protection optimale de l’environnement, le Décret d’Application impose des normes et pratiques obligatoires aux titulaires de contrats pétroliers conformément aux normes et pratiques en vigueur dans l’industrie pétrolière internationale[41].

Autrement appelées les mesures obligatoires, les normes et pratiques obligatoires imposées aux titulaires sont les suivantes : la souscription et le renouvellement des polices d’assurances couvrant les dommages aux personnes et aux biens résultant des opérations pétrolières réalisées par le titulaire ; la réduction au strict minimum des dommages causés à l’environnement sur le périmètre contractuel résultant des opérations pétrolières ; la mise en place d’un système rigoureux de prévention et de contrôle de la pollution résultant des opérations pétrolières ; l’obtention des autorisations préalables requises par la législation et la réglementation en vigueur et la fourniture des études d’impact environnemental et social requises ; le traitement, élimination et contrôle des émissions de substances toxiques issues des opérations pétrolières, susceptibles de causer des dommages aux personnes, aux biens et à l’environnement ; l’installation d’un système de collecte des déchets et de matériel usagé issus des opérations pétrolières ; la sauvegarde et préservation des sites archéologiques, touristiques et réserves de faune.

Afin d’assurer la protection de l’environnement, un comité de protection contre la contamination due aux hydrocarbures est créé tels qu’initialement prévu par l’Ancien Décret[42].

En sus de ces mesures obligatoires, les obligations suivantes peuvent être citées dans le cadre de la protection de l’environnement :

  • la réalisation au frais du titulaire d’un contrat pétrolier, d’une étude d’impact environnemental et social pour tous les projets de recherches, d’exploitation et de transport des hydrocarbures ;
  • l’inclusion dans le rapport d’étude d’impact environnemental et social, d’un plan de gestion environnemental et social contenant des mesures à suivre afin d’éliminer, d’éviter, de minimiser ou de compenser les dommages à l’environnement ;
  • le respect des normes et des mesures de protection de l’environnement par les employés et sous-traitants du titulaire des contrats pétroliers ;

Contrairement aux dispositions de l’Ancien Décret, les titulaires de contrats pétroliers n’ont plus libre choix dans la désignation des experts qui se chargeront d’effectuer l’étude[43]. Le Décret d’Application vient ainsi donner la priorité aux consultants camerounais pour la réalisation de l’étude d’impact environnemental et social[44].

  • La documentation pétrolière

Dans le cadre des opérations pétrolières, les titulaires des contrats pétroliers sont tenus de conserver et de mettre à jour les archives relatives aux périmètres contractuels. Suivant un accord de la SNH ou du MINMIDT, ces archives sont conservées au siège social desdits titulaires au Cameroun et doivent contenir des informations spécifiques. Bien qu’un délai ne soit pas imposé, il est prévu qu’une copie de ces documents archivés soit transmise à la SNH[45].

Par ailleurs, les titulaires de contrats pétroliers sont tenus de conserver en leur siège social au Cameroun des registres relatifs aux opérations pétrolières mis à jour contenant les informations spécifiques[46]. Pareillement, un exemplaire de chaque registre doit être déposé auprès de la SNH au plus tard le 15 janvier de l’année suivante.

Toutes les données générées lors des opérations pétrolières sont la propriété exclusive de l’Etat du Cameroun. A ce titre, les titulaires sont tenus d’obtenir l’accord préalable et écrit du MINMIDT, après avis conforme de la SNH, avant toutes divulgations de documents à des tiers, rapports relevés et autres informations entrant dans le cadre de la documentation pétrolière[47].

Ces informations sont considérées confidentielles et ne peuvent être divulguées à un tiers par l’Etat ou le titulaire avant le rendu du périmètre sur lequel elles portent ou en l’absence de rendu, avant la fin de la période de confidentialité.

Par ailleurs, il est prévu que l’obligation de confidentialité ne s’applique pas aux éléments d’informations qui doivent être divulgués conformément à des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ou en vertu d’une décision de justice[48].

Autrefois, le délai de l’obligation de confidentialité était limité à deux (02) ans après l’expiration de l’autorisation pour les autorisations de prospections et il était également prévu que la durée de l’obligation de confidentialité soit coextensive avec la durée du contrat pétrolier concerné[49]. Le Décret d’Application établit des délais précis, comme indiqué ci-dessous. Toutefois, il convient de souligner qu’en cas de retrait ou de renonciation, ces données, documents et informations deviennent accessibles au domaine public national[50] :

  • Cinq (05) ans pour les données sismiques et dix (10) ans pour les données sur les puits générées dans le cadre des opérations pétrolières ;
  • Trois (03) ans pour les documents et autres informations générés dans le cadre des opérations pétrolières portant sur le domaine pétrolier et gazier national ;
  • Deux (02) ans lorsqu’il s’agit d’une autorisation de prospection.

 

  • De l’accord d’unitisation

Le Code Pétrolier définit l’unitisation comme étant un processus conduisant à l’exploitation, sous la forme d’une entité unique, d’un gisement d’hydrocarbures s’étendant sur plusieurs périmètres contractuels, objet de contrats pétroliers distincts à l’intérieur du territoire camerounais, ou impliquant un Etat frontalier au Cameroun. Les titulaires de contrats  pétroliers peuvent conclure des accords d’unitisation dans le cas où les gisements d’hydrocarbures s’étendent sur plusieurs périmètres contractuels. Ceci dans l’optique d’exploiter ces gisements dans les meilleures conditions techniques et économiques possibles.

Tout projet d’unitisation doit être notifié aux MINMIDT ainsi qu’à la SNH par les titulaires impliqués afin d’obtenir une décision sur la recevabilité de leur demande dans les quinze (15) jours.

Pour les gisements transfrontaliers, l’accord d’unitisation doit être soumis à l’approbation des autorités compétentes de chaque Etat[51]. Cette approbation est soumise aux conditions et à la procédure prévue par les législations en vigueur de chaque pays.

  • Les assurances dans le cadre des opérations pétrolières

Contrairement à l’Ancien Décret, le Décret d’Application apporte une obligation aux titulaires des contrats pétroliers de souscrire à des polices d’assurances nécessaires à la réalisation des opérations pétrolières auprès de sociétés locales d’assurances[52] conformément au Code Pétrolier. Initialement, les titulaires et les sous-traitants devaient souscrire à des polices d’assurances sans précision de la qualité des compagnies d’assurances[53].

Les polices d’assurance doivent être en conformité avec la législation, la réglementation en vigueur ainsi qu’avec les normes et pratiques généralement admises dans l’industrie pétrolière internationale. De plus, elles doivent inclure l’État en tant qu’assuré supplémentaire et contenir une clause de subrogation de droit en faveur de l’État. En outre, ces polices d’assurances dûment souscrites doivent être transmises, accompagnées de récépissés, au MINMIDT et à la SNH avant le 15 janvier de chaque année.

Le fait que le décret contienne des dispositions relatives à la souscription et au renouvellement des polices d’assurances pour couvrir les dommages aux personnes et aux biens résultant des opérations pétrolières sont des mesures importantes. Cependant, il est nécessaire de garantir que les niveaux de couverture et les modalités des polices d’assurances sont adéquats pour faire face aux risques spécifiques liés aux opérations pétrolières. Une évaluation régulière de l’adéquation de la couverture d’assurance est essentielle pour garantir une protection adéquate en cas de dommages.

  • Du régime fiscal, douanier et du régime de change ; de la surveillance administrative
  • Régime fiscal

Le Décret d’Application apporte des précisions concernant le régime fiscal des sociétés impliquées dans les opérations pétrolières, conformément aux dispositions du Code Pétrolier. Ainsi, le taux de l’impôt sur les sociétés applicable aux revenus provenant des activités de recherche et d’exploitation est fixé à 35%[54] tel que prévu par le Code Pétrolier.

En cas d’exploitation de substances différentes ou en cas de superposition de deux ou plusieurs contrats pétroliers, chacun des contrats pétroliers fait l’objet d’une comptabilité séparée et est assujetti à l’impôt sur la société.

Rappelons en outre que la Loi de finances 2022 a consacré l’exonération de la taxe spéciale sur le revenu (TSR) des titulaires de contrats pétroliers et leurs sous-traitants en phase de recherche. Il s’agit en réalité d’une exonération de principe qui n’est admise que sous réserve du respect des conditions cumulatives ci-après :

– Les prestataires étrangers ne disposent pas d’un établissement stable au Cameroun ;

– Lesdites prestations sont fournies à prix coûtant (facturation faite sans marge) et la charge de la preuve incombe au prestataire ;

– Lesdites prestations sont fournies en phase de recherche et de développement (l’entreprise pétrolière locale doit à cet effet justifier d’un permis de recherche, ou attester qu’elle est en phase de développement).

Pour mémoire, les mêmes prestataires étaient par le passé assujettis à la TSR au taux réduit de 5%. Cette mesure semble viser l’arrimage de la loi fiscale aux dispositions du Code Pétrolier en matière de TSR.

  • Régime douanier

Par le Décret d’Application, la possibilité pour les titulaires ainsi que leurs sous-traitants d’importer au Cameroun les matériaux et équipements nécessaires à la réalisation des opérations pétrolières est maintenue[55]. Ces équipements sont admissibles en franchise de tous droits et taxes exceptées pour les rémunérations de services. Dans ce cas, ceux-ci ne peuvent être cédés ou vendus à des tiers sans liquidation préalable des droits et taxes subséquents ou autorisation préalable de l’administration fiscale.

Lorsque ces importations sont prévues pour une réexportation prochaine après utilisation, celles-ci bénéficient du régime douanier de l’admission temporaire normale si elles sont destinées aux activités de prospection et de recherche et à celui de l’admission temporaire spéciale lorsqu’elles seront utilisées sur les sites en phase d’exploitation.

Pour rappel, ce régime permet l’importation en suspension des droits et taxes de certaines marchandises dans un but défini et destinées à être réexportées dans un délai déterminé, sans avoir subi de modifications, exception faite de leur dépréciation normale par suite de l’usage qui en est fait.

L’autorisation pour les titulaires et leurs sous-traitants d’importer des matériaux et équipements en franchise de droits et taxes, à l’exception des rémunérations de services, peut être considérée comme un avantage financier. Cela peut faciliter l’approvisionnement en matériel nécessaire aux opérations pétrolières.

Cependant, il est important de s’assurer que ces avantages fiscaux ne créent pas de disparités concurrentielles entre les acteurs du secteur et n’entravent pas le développement de l’industrie locale.

Bien que cette disposition du Décret d’Application se concentre sur les aspects fiscaux et douaniers, il est important de noter que l’importation de matériaux et équipements pour les opérations pétrolières peut avoir des implications environnementales significatives. Il est essentiel de veiller à ce que les équipements importés respectent les normes environnementales en vigueur et contribuent à la protection de l’environnement tout au long du cycle des opérations pétrolières.

  • Régime de la réglementation des changes

Le régime de la réglementation des changes applicable aux opérations pétrolières fait mention de l’obligation qu’ont les titulaires de contrats pétroliers de se conformer à la réglementation des changes de la CEMAC.

Par ailleurs, ils sont tenus de collaborer et de coopérer étroitement avec la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (ci-après la « BEAC »), afin de permettre la traçabilité complète de toutes les opérations de transfert et de change liées aux opérations pétrolières et d’optimiser les rapatriements au Cameroun de produits issus de leurs activités sur le territoire national[56].

  • Régime de la surveillance administrative

La surveillance technique et administrative, ainsi que le contrôle économique, comptable et financier des opérations pétrolières est assurée par le MINMIDT en collaboration avec la SNH, tandis que les agents habilités et ou assermentés exercent la surveillance des travaux de prospection, de recherche, d’exploitation et de transport des hydrocarbures[57].

Par ailleurs, ces agents habilités ont diverses attributions et n’exercent ces attributions qu’après s’être identifiés auprès de l’opérateur ou du responsable local des opérations. Ils sont par ailleurs tenus de se conformer aux règles et procédures en vigueur[58].

  • Des dispositions pénales

Le non-respect des obligations liées aux opérations pétrolières telles que détaillées dans le cadre de la présente analyse expose l’auteur à des sanctions.

Il est prévu que ces sanctions ne sont applicables aux acteurs du secteur pétrolier qu’après une procédure spécifique, tel que détaillée ci-après.

Un constat fait par les agents habilités et/ou assermentés, dans un procès-verbal ou autre document en tenant lieu contenant des indications précises[59] doit être transmis aux MINMIDT et à la SNH attestant les manquements du titulaire concerné dans un délai de dix (10) jours.

Suivant ce constat, le MINMIDT ou la SNH met le titulaire concerné en demeure de remédier aux manquements constatés dans un délai de trois (03) mois sous peine de sanctions rappelées dans la mise en demeure adressée par voie d’huissier, le cas échéant.

Faute pour le titulaire concerné de s’exécuter dans le délai imparti (en cas de mise en demeure restée infructueuse), les sanctions sont prononcées par le MINMIDT ou la SNH tels que[60] : le paiement des amendes fixés selon les dispositions du Code Pétrolier ; ou le retrait de l’autorisation et/ou la déchéance du contrat pétrolier en vertu desquels le titulaire exerce ses activités. Ceci sans préjudice des autres sanctions prévues par les lois et autres règlements en vigueur.

 

Auteurs :

Aurélie Chazai, Avocate aux Barreaux du Cameroun et de Paris, Managing Partner du Cabinet Chazai Wamba.

Paul Ariel Kombou, Avocat aux Barreaux du Cameroun et du Nigeria, Senior Associate au sein du Cabinet Chazai Wamba.

Thierry Henri Ngombono, Junior Associate au sein du Cabinet Chazai Wamba.

Anne Foutie, Junior Associate au sein du Cabinet Chazai Wamba.

 

[1] Article 2 du Code Pétrolier.

[2] Article 15 du Code Pétrolier.

[3] Article 16 du Code Pétrolier.

[4] Article 18 du Code Pétrolier.

[5] Article 7 du Décret d’Application.

[6] Ibid.

[7] Article 19 du Code Pétrolier.

[8] Notamment l’Etat ou tout organisme public co-titulaire prioritairement, ensuite les autres co-titulaires du contrat pétrolier conformément aux dispositions de l’Article 22 du Code Pétrolier.

[9] Articles 39 et suivants du Décret d’Application.

[10] Articles 113 et suivants du Décret d’Application.

[11] Articles 153 et suivants du Décret d’Application.

[12]  Articles 163 et suivants du Décret d’Application.

[13]La prospection s’entend ici comme les activités préliminaires de prospection et de détection d’indices d’hydrocarbures notamment par l’utilisation de méthodes géologiques, géophysiques ou géochimiques, à l’exclusion de forages dépassant une profondeur de trois cents (300) mètres.

[14] Permis de recherche ou concession d’exploitation d’hydrocarbures rattaché à un contrat de concession.

[15] Articles 8 et suivants du Décret d’Application.

[16]  Article 30 du Code Pétrolier.

[17]  Articles 15 et suivants du Décret d’Application.

[18] Article 39 du Code Pétrolier.

[19] Article 40 du Code Pétrolier

[20] Articles 26 et suivants du Décret d’Application.

[21] Article 29 du Décret d’Application.

[22] Articles 30 et suivants du Décret d’Application.

[23] Article 49 du Code Pétrolier.

[24] Article 128 du Code Pétrolier.

[25] Article 159 du Décret d’Application.

[26] Article 58 du Décret d’Application.

[27] Le domaine public artificiel désigne les espaces qui, bien qu’initialement privés, ont été aménagés ou affectés à un usage public spécifique par une décision administrative ou législative. Il s’agit donc de terrains qui sont transformés en espaces publics par le biais de travaux, de décisions officielles ou de l’affectation à des fins d’utilité publique.

[28] Article 59 du Décret d’Application.

[29] Article 60 du Décret d’Application.

[30] Article 62 du Décret d’Application.

[31] Article 65 du Décret d’Application.

[32] Article 2 du Code Pétrolier.

[33] Article 67 du Décret d’Application.

[34] Article 49 de l’Ancien Décret.

[35] Article 67 du Décret d’Application.

[36] Articles 68 à 75 du Décret d’Application.

[37] Article 53 de l’Ancien Décret.

[38] Articles 55 et 56 de l’Ancien Décret.

[39] Article 81(1) du Code Pétrolier.

[40] Article 78 du Décret d’Application.

[41] Article 80 du Décret d’Application.

[42] Article 83 du Décret d’Application.

[43] Article 68 de l’Ancien Décret.

[44] Article 88 du Décret d’Application.

[45] Article 136 du Décret d’Application.

[46] Article 137 du Décret d’Application.

[47] Articles 138 à 140 du Décret d’Application.

[48] Article 141 du Décret d’Application.

[49] Article 109 de l’Ancien Décret.

[50] Article 143 du Décret d’Application.

[51] Article 149 du Décret d’Application.

[52] Article 150 du Décret d’Application.

[53] Article 117 de l’Ancien Décret.

[54] Article 124 du Décret d’Application.

[55] Article 125 du Décret d’Application.

[56] Règlement n°01-CEMAC-UMAC-CM portant modalités de mise en œuvre de certaines dispositions de la réglementation des changes par les entreprises extractives résidentes.

[57] Articles 127 et 128 du Décret d’Application.

[58]Articles 130 à 132 du Décret d’Application.

[59] Article 165 du Décret d’Application.

[60] Article 131 du Code Pétrolier.