ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

 

Assemblée plénière

Audience publique du 29 avril 2015

Pourvoi : n°036/2008/PC du 07/05/2008

Affaire :     Maison du Meuble S.A.

                 (Conseil : Maître Ibrahima DIOP, Avocat à la Cour)

 

          contre

 

  JAFFAR DAOUD

  (Conseils : SCPA Guédel NDIAYE & Associés, Avocats à la Cour)                

Arrêt N°066/2015 du 29 avril 2015

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique foraine tenue le 29 avril 2015 à  Ouagadougou au Burkina Faso où étaient présents :

 

Messieurs    Marcel SEREKOÏSSE SAMBA                       Président

Abdoulaye Issoufi TOURE,                       1er Vice-président

Madame       Flora DALMEIDA MELE,                           Snde Vice-présidente                                                                      Messieurs     Victoriano OBIANG ABOGO,                     Juge

Mamadou DEME                                    Juge

Idrissa YAYE,                                       Juge

 

et  Maître    Paul LENDONGO,                                  Greffier en chef ;

 

Sur le renvoi de la Cour de Cassation du Sénégal, par arrêt n°97 du 19 septembre 2007, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans, de l’affaire opposant La Maison du Meuble S.A., société en liquidation, poursuites et diligences de son liquidateur, Mme Diack Khardiatou NDIAYE, demeurant à Dakar, 37, rue Galandou DIOUF x Vincens, ayant pour Conseil Maître Ibrahima DIOP, Avocat à la Cour, demeurant au 127, Avenue Lamine GUEYE x Félix Faure, Dakar – Sénégal, à Monsieur JAFFAR DAOUD, commerçant demeurant à Dakar, 41, Rue Raffanel, ayant pour Conseils la SCPA Guédel NDIAYE & Associés, Avocats à la Cour, 75 bis, Rue Amadou Assane NDOYE,en cassation de l’Arrêt n°164, rendu le 15 février 2005 par la Cour d’appel de Dakar et dont le dispositif est le suivant :

 

« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

  • Infirme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau ;
  • Fixe l’indemnité d’éviction à la somme de 10.000.000 (dix millions) de francs ;
  • Condamne Daoud à payer cette somme à la Maison du Meuble ;
  • Confirme pour le surplus. » ;

 

La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation, tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;

 

Sur le rapport de Monsieur DJIMASNA N’DONINGAR, Juge ;

 

Vu les dispositions des articles 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

 

Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

 

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la Maison du Meuble S.A. exploitait, aux termes d’un contrat de bail commercial conclu le 15 janvier 1966, son fonds de commerce dans un immeuble appartenant à la Société Commerciale du Meuble (SMC) ; qu’à la date du 28 mars 2001, elle a cumulé des arriérés de loyers d’un montant de 31.783.770 FCFA, objet d’un échéancier d’apurement conclu avec le bailleur, à l’issue d’une conciliation ; que, courant 2002, l’immeuble fut vendu au sieur JAFFAR DAOUD, à qui fut également transférée la créance résultant des arriérés de loyers ; que le 10 juillet 2002, JAFFAR DAOUD fit servir, par exploit d’huissier, un congé de six mois à la Maison du Meuble, avec offre de discuter sur l’indemnité d’éviction ; que les pourparlers entre les parties n’ayant pas abouti, le Tribunal de Dakar, saisi d’une action en contestation du congé et en fixation de l’indemnité d’éviction, a débouté la Maison du Meuble de sa demande en annulation du congé mais lui a alloué la somme de 43.000.000 FCFA au titre de l’indemnité d’éviction ; que, sur appel de JAFFAR DAOUD, la Cour de Dakar a rendu, le 15 février 2005, l’arrêt n°164, objet du présent pourvoi ;

 

Sur les deux moyens réunis, tirés de la violation des articles 94, alinéa 2, et 102 de l’Acte uniforme portant sur le Droit Commercial Général (non révisé)

Attendu, par le premier moyen, qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 94, en ce que, d’une part, pour fixer l’indemnité d’éviction, il a recherché si le locataire réalisait des bénéfices, alors que, selon le moyen, le texte énonce clairement que la juridiction compétente doit tenir compte du chiffre d’affaires, et que, d’autre part, il a soumis les constructions et aménagements à l’autorisation du bailleur, alors que le texte ne dit pas expressément que les investissements, réalisés par le preneur, doivent être autorisés par le bailleur, pour être retenus comme critère de fixation de l’indemnité d’éviction ; qu’en énonçant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a violé les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 94 ;

 

Mais attendu que la cour, après avoir énoncé de manière précise les termes dudit texte, en a analysé chacun des éléments, en se référant à d’autres, pour parvenir à une fixation souveraine de l’indemnité ; qu’en statuant ainsi, la Cour d’appel n’a en rien violé les dispositions susmentionnées ; qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;

 

Attendu que, par un deuxième moyen, la requérante reproche à l’arrêt déféré d’avoir violé l’article 102 susvisé, lequel fait de l’article 94 une disposition d’ordre public, en ce qu’il a confondu chiffre d’affaires et bénéfice et a soumis la prise en compte des investissements à l’autorisation du bailleur, alors que, selon le moyen, les dispositions de l’article 94 sont d’ordre public, et donc d’interprétation stricte ;

 

Mais attendu que, dans son analyse, la Cour d’appel de Dakar s’est parfaitement conformée aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article 94, et n’a donc pu violer l’article 102 ; qu’il s’ensuit que ce moyen, non plus, n’est pas fondé et doit être rejeté ;

 

Attendu qu’il échet en conséquence de rejeter le pourvoi ;

 

Attendu que la Maison du Meuble S.A., ayant succombé, sera condamnée aux dépens ;

 

PAR CES MOTIFS 

Statuant publiquement, après en avoir délibéré,

  • Rejette le pourvoi formé par la Maison du Meuble S.A. ;
  • La condamne aux dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :

 

 

 

Le Président

Le Greffier en chef