ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

 

Troisième Chambre

Audience Publique du 4 décembre 2012 

Pourvoi : n° 002/2008/PC du 18/01/2008

Affaire : – Compagnie Industrielle du Bois (CIB)

              – Société SIVOBOIS

                        (Conseil : SCPA BEUGRE-DJAMA & Associés, Avocats à la Cour)                               

 contre

               Monsieur KONAN KOFFI Jacques       

                        (Conseil : Henri Valentin BOHOUSSOU, Avocat à la Cour)                                             

Arrêt N° 080/2012 du 4 décembre 2012

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 4 décembre 2012 où étaient présents :

 

Messieurs Ndongo FALL,                             Président, rapporteur

Abdoulaye Issoufi TOURE,           Juge

Victoriano OBIANG ABOGO         Juge

 

et Maître Paul LENDONGO,         Greffier en chef,

 

Sur le pourvoi enregistré, le 18 janvier 2008 au greffe de la Cour de céans, sous le n°002/2008/PC et formé par la SCPA BEUGRE-DJAMA & Associés, Avocats à la Cour, au nom et pour le compte, d’une part, de la Compagnie Industrielle du Bois (en abrégé CIB), société anonyme ayant son siège social à Abidjan Plateau (Côte d’Ivoire), 28 boulevard Angoulvant, 01 BP 813 Abidjan 01, représentée par Monsieur Jean Claude MARTIN, administrateur de société, d’autre part, de la société SIVOBOIS société anonyme ayant son siège social à Abidjan Plateau (Côte d’Ivoire), 28 boulevard Angoulvant, 01 BP 1042 Abidjan 01, représentée par Monsieur FADOUL ZOUHAIR Michel, dans le litige les opposant à  Monsieur KONAN KOFFI Jacques, ingénieur en ordonnancement, demeurant à Abidjan Riviera II, logement n° 75, 11 BP 1057 Abidjan 11, en cassation de l’Arrêt n° 528 rendu le 10 juillet 2007 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :

« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort ;

En la forme :

Déclare recevables les appels des parties ;

Au fond :

Les y dit mal fondées ;

Confirme l’Ordonnance attaquée en toutes ses dispositions ;

Condamne la Compagnie ivoirienne de Bois (CIB) et SIVOBOIS aux entiers dépens ; » ;

Les requérantes invoquent à l’appui dudit pourvoi un moyen unique tel qu’il figure dans leur requête annexée au présent arrêt ;

 

Sur le rapport de Monsieur le Juge Ndongo FALL ;

 

Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

 

Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ;

 

Sur les faits et la procédure

Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure les faits suivants :

Monsieur KONAN Koffi Jacques a été embauché par la société AFRICAN WOOD JEANNEAU CÔTE D’IVOIRE en qualité de Directeur des relations extérieures après sa démission du poste de gérant de cette société. N’ayant pas perçu de salaires pendant plus d’un an, il a saisi le Tribunal du Travail d’Abidjan-Plateau pour obtenir que son employeur soit condamné à lui payer sa rémunération et des droits de rupture du contrat. Par jugement social n°132/CS3/06 du 1er février 2006, ledit Tribunal a condamné la société AFRICAN WOOD JEANNEAU CÔTE D’IVOIRE à lui payer différentes sommes d’argent au titre des droits de rupture et la somme de 33 074 272 F CFA représentant les arriérés de salaires et a ordonné l’exécution provisoire.

Par exploit en date du 24 mars 2006, monsieur KONAN Koffi Jacques a fait délivrer signification commandement de cette décision à son ex-employeur. Par un autre exploit en date du 29 mars 2006, il a fait pratiquer une saisie attribution de créances entre les mains des sociétés C.I.B et SIVOBOIS. Ces deux sociétés au lieu de fournir les informations relatives aux sommes qu’elles détiendraient pour le compte de la société AFRICAN WOOD JEANNEAU CÔTE D’IVOIRE ont donné sur le procès-verbal de saisie attribution la même réponse à savoir : « Nous accusons réception et transmettons à notre conseil ».

Par exploit en date du 06 avril 2006, monsieur KONAN Koffi Jacques leur a fait délivrer une sommation interpellative d’avoir immédiatement et sans délai à satisfaire à l’obligation du tiers saisi contenue dans les dispositions des articles 38 et 156 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution. La même réponse a encore été donnée sur cette sommation.

Saisie par Monsieur KONAN Koffi Jacques, la juridiction présidentielle du Tribunal d’Abidjan-Plateau par Ordonnance de référé n° 746 du 06 juin 2006 a déclaré son action recevable, partiellement fondée et a condamné les sociétés C.I.B et SIVOBOIS à lui payer la somme de 33 074 272 F CFA représentant les causes de la saisie attribution, tout en le déboutant du surplus de ses prétentions.

Appel a été interjeté contre cette Ordonnance par les deux sociétés et la Cour d’appel d’Abidjan, par arrêt n° 528 du 10 juillet 2007, a confirmé l’ordonnance du juge des référés. C’est contre cet arrêt que les sociétés C.I.B et SIVOBOIS ont formé le présent recours en cassation ;

 

Sur le moyen unique

Attendu que les demanderesses, à l’appui de leur pourvoi,  invoquent le moyen unique de cassation tiré de la violation des articles 38 et 156 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution au motif que le jugement qui constitue le titre exécutoire sur lequel est fondée la saisie attribution a ultérieurement fait l’objet de défense à exécution par ordonnance du Premier Président de la Cour d’appel d’Abidjan rendue le 04 avril 2006 puis a été infirmé par le juge d’appel ;

Attendu que dans son mémoire en défense, Monsieur KONAN Koffi Jacques qui déclare avoir attaqué l’arrêt infirmatif en cassation devant la Cour Suprême de Côte d’Ivoire sollicite le rejet de ce moyen ;

Attendu que les articles 38 et 156 dont la violation est invoquée disposent  respectivement:

« Les tiers ne peuvent faire obstacle aux procédures en vue de l’exécution ou de la conservation des créances. Ils doivent y apporter leur concours lorsqu’ils en sont légalement requis. Tout manquement par eux à ces obligations peut entraîner leur condamnation à verser des dommages-intérêts. Le tiers entre les mains duquel est pratiquée une saisie peut également, et sous les mêmes conditions, être condamné au paiement des causes de la saisie, sauf son recours contre le débiteur. » ;

« Le tiers saisi est tenu de déclarer au créancier l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et, s’il y a lieu, les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures. Il doit communiquer copie des pièces justificatives.

Ces déclaration et communication doivent être faites sur le champ à l’huissier ou l’agent d’exécution et mentionnées dans l’acte de saisie ou, au plus tard, dans les cinq jours si l’acte n’est pas signifié à personne. Toute déclaration inexacte, incomplète ou tardive expose le tiers saisi à être condamné au paiement des causes de la saisie, sans préjudice d’une condamnation au paiement de dommages-intérêts. » ;

Attendu que la Cour d’appel a relevé à la suite du juge des référés que les sociétés CIB et SIVOBOIS entre les mains desquelles a été pratiquée une saisie attribution par exploit d’huissier du 29 mars 2009 n’ont pas fait les déclaration et communication prescrites en dépit d’une sommation interpellative servie le 6 avril 2006 d’avoir immédiatement et sans délai à satisfaire à l’obligation du tiers saisi contenue dans les dispositions des articles 38 et 156 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution;

Attendu que la tentative de justification desdites sociétés qui prétendent que les défenses à exécution ordonnées par le Premier Président de la Cour d’appel après la saisie attribution ont fait que celle-ci était dès lors dépourvue de titre exécutoire est inopérante car l’ordonnance de défense n’a pas d’effet rétroactif et est donc sans influence sur les actes d’exécution déjà accomplis qui peuvent être poursuivis aux risques et périls du créancier saisissant ;

Qu’ainsi, en tirant de la carence des sociétés CIB et SIVOBOIS à satisfaire sur le champ à leur obligation légale de déclaration la sanction consistant en la condamnation au paiement des causes de la saisie attribution qui avait immédiatement produit son effet attributif conformément à l’article 154 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, l’arrêt dont est pourvoi a fait une juste application des dispositions des articles sus énoncés dont la violation est invoquée au moyen qu’il y a lieu de rejeter

Attendu qu’il échet de rejeter en conséquence le pourvoi;

Attendu que les sociétés CIB et SIVOBOIS ayant succombé doivent être condamnées aux dépens ;

 

PAR CES MOTIF

Statuant publiquement, après en avoir délibéré,

Rejette ledit pourvoi ;

Condamne les sociétés CIB et SIVOBOIS aux dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et  an  que dessus et ont signé :

 

 

 

 Le Président

Le Greffier en chef