ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Deuxième chambre
Audience publique du 27 juillet 2017
Pourvoi : n° 211/2016/PC du 29/09/2016
Affaire : ZASSINO FITALSIGUEL Paul
(Conseil : Maître ALLATAN N’DORDJI, Avocat à la Cour)
Contre
Société Griffiths Energy Chad Ltd
(Conseil : Maître NGADJADOUM Josué, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 186/2017 du 27 juillet 2017
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 27 juillet 2017 où étaient présents :
Messieurs Abdoulaye Issoufi TOURE, Président
Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge,
Djimasna N’DONINGAR, Juge, Rapporteur
Diéhi Vincent KOUA, Juge,
César Apollinaire ONDO MVE, Juge,
et Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier,
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 29 septembre 2016 sous le n° 211/2016/PC et formé par Maître ALLATAN NDORDJI, Avocat à la Cour, demeurant à N’djamena, B.P. 5326, agissant au nom et pour le compte de Monsieur ZASSINO FITALSIGUEL Paul, domicilié à N’djamena, 9ème Arrondissement, Quartier WALIA, BP 5326, dans la cause qui l’oppose à la Société Griffiths Energy Chad Ltd, appartenant à GLENCORE COMPANY, dont le siège est au 107, rue Kaltouma Nguembang, Quartier KLEMAT, BP 2929, ayant pour conseil Maître NGADJADOUM Josué, Avocat à la Cour, demeurant à N’djamena, Avenue Mobutu, BP 5554 ; en cassation de l’Arrêt n° 023/2016 rendu le 16 juin 2016 par la Cour d’appel de N’Djamena et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière civile, coutumière et en dernier ressort :
En la forme :
Reçoit l’appel ;
Au fond :
Le déclare fondé ;
Infirme le jugement querellé en toutes ses dispositions ;
Condamne l’appelant aux dépens » ;
Attendu que le requérant invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation, tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Djimasna N’DONINGAR, Juge ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure qu’en date du 08 septembre 2014, la société Griffiths Energy Chad appartenant à GLENCORE COMPANY concluait un contrat de bail d’une durée de deux ans, reconductible pour un an, sur un immeuble à usage professionnel avec Monsieur ZASSINO FITALSIGUEL Paul, bailleur ; que le 02 avril 2015, à deux ans et demi de la fin dudit contrat, le locataire, se prévalant de l’article 13 dudit contrat, notifiait son intention de rompre le bail et donnait un préavis de trois (3) mois au bailleur ; que le 17 avril 2015, celui-ci s’opposait à ce préavis ; que le 06 juillet 2015, le locataire quittait effectivement les lieux loués ; que le Tribunal de grande instance de N’Djamena, saisi par le bailleur pour violation du contrat, condamnait le locataire à lui payer la somme de 18 750 000 F cfa au titre des loyers restant dus et 30 000 000 F cfa de dommages-intérêts, par jugement n° 290/AL/15 du 17 avril 2015 ; que la Cour d’appel de N’Djamena, sur appel du preneur, infirmait le jugement entrepris par arrêt n° 023/2016 rendu le 16 juin 2016, objet du présent pourvoi ;
Sur la recevabilité du pourvoi.
Attendu que la défenderesse, dans son mémoire en date du 23 janvier 2017, a conclu à l’irrecevabilité du pourvoi de Monsieur ZASSINO FITALSIGUEL Paul aux motifs, d’une part, que son Conseil n’a pas justifié sa qualité d’Avocat, en vertu de l’article 23 du Règlement de procédure et, d’autre part, que sur les quatre pièces annexées à la requête, seules les expéditions de l’arrêt attaqué et du jugement du Tribunal de grande instance de N’Djaména sont certifiées conformes par la partie qui les a déposées, en violation de l’article 27 dudit Règlement ;
Mais attendu que, par rapport à la qualité d’Avocat, Maître ALLATAN NDORDJI n’a reçu aucune demande de régularisation ; que cependant sa qualité ressort de l’ensemble des pièces du dossier, y compris de l’arrêt querellé ; qu’eu égard à la certification des pièces par la partie qui les dépose, il y’a lieu de relever que son défaut n’est assorti d’aucune sanction par le Règlement de procédure ; qu’il échet donc dire que le pourvoi est recevable ;
Sur la recevabilité du mémoire en réponse.
Attendu que, dans son mémoire en réplique reçu au greffe de la Cour de céans le 12 avril 2017, Maître ALLATAN NDORDJI soulève l’irrecevabilité du mémoire en réponse de la défenderesse en ce qu’il a été déposé hors le délai de trois mois prévu à l’article 30.1 du Règlement de procédure ;
Mais attendu que les délais de procédure prévus par le Règlement de procédure sont augmentés par l’article 1er de la Décision n° 002/99/CCJA aux termes duquel, « sauf si les parties ont leur résidence habituelle en Côte d’Ivoire, les délais de procédure sont augmentés, en raison de la distance, comme suit :
En Afrique centrale : de vingt et un jours (…) » ; qu’il en résulte que le mémoire en réponse, reçu au Greffe de la Cour le 23 janvier 2017, à la suite d’une notification intervenue le 24 octobre 2016, est recevable ;
Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 104 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général.
Attendu que qu’il est fait grief à l’arrêt déféré d’avoir violé l’article 104 visé au moyen en ce qu’il a entériné la fin avant son terme d’un contrat à durée déterminée alors que, selon le moyen, en optant pour le contrat à durée déterminée, les parties entendaient se lier jusqu’au terme de la durée stipulée ; que la clause de l’article 13 du bail qui permet aux parties de le résilier moyennant un préavis est contraire à la nature de la durée du bail et doit être réputée non écrite ;
Mais attendu que ce moyen ne précise pas la partie de l’arrêt qu’il critique et ne détermine pas en quoi l’article 13 du contrat qui a prévu une cessation du bail, même sans faute, est contraire aux dispositions de l’article 104 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général ; que ce moyen étant vague et imprécis, il y’a lieu de le déclarer irrecevable ;
Sur le deuxième moyen tiré de l’insuffisance de motivation de l’arrêt.
Attendu qu’il est reproché à la Cour d’appel d’avoir retenu que l’article 13 du bail organisant les modalités de fin du contrat est la loi des parties, sans tenir compte de l’existence de l’article 4 du même contrat qui précise sa durée déterminée ; que, selon le moyen, les deux articles contenant des stipulations antinomiques, la Cour n’a pas justifié le choix d’appliquer l’article 13 au détriment de l’article 4, motivant ainsi insuffisamment sa décision ;
Mais attendu que contrairement aux énonciations du moyen, les deux clauses ne sont pas antinomiques ; que la cour d’Appel de Ndjaména, pour justifier la cessation unilatérale du bail par le preneur, énonce que « ledit contrat [contient] une clause permettant à l’une des parties [de donner] un préavis », « que dans le contrat de bail conclu entre ZASSINO et la société Griffiths est insérée une clause pour sa résiliation » et « que la société Griffiths a donné un préavis avant cette rupture du contrat du bail » ; que s’agissant d’une cessation en dehors de tout non-respect des clauses du bail, l’arrêt est suffisamment motivé ; qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé et sera rejeté ;
Attendu qu’il échet en conséquence de rejeter le pourvoi ;
Sur les dépens.
Attendu que Monsieur ZASSINO FITALSIGUEL Paul ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare recevables le pourvoi et le mémoire en réponse ;
Rejette ledit pourvoi ;
Condamne sieur ZASSINO FITALSIGUEL Paul aux dépens ;
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier