ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Audience Publique du 31 octobre 2002
Pourvoi n° 008/2002/ PC du 11 février 2002.
Affaire : YAPO YAPO Gérard et autres
(Conseil : Maître TRAORE Moussa, Avocat à la Cour)
contre
Maître DENISE-RICHMOND Marcelle
(Conseils : Maîtres Charles DOGUE-Abbé YAO & Associés, Avocats à la Cour)
ARRET N°020/2002 du 31 octobre 2002
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ( C.C.J.A.) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires ( O.H.A.D.A ) a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 31 octobre 2002 où étaient présents :
Messieurs Seydou BA, Président
Jacques M’BOSSO, Premier Vice-président
Antoine Joachim OLIVEIRA, Second Vice-président
Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge
Maïnassara MAIDAGI, Juge, rapporteur
et Maître Pascal Edouard NGANGA, Greffier en chef ;
Sur le renvoi en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans, de l’affaire YAPO YAPO Gérard et autres contre Maître DENISE-RICHMOND Marcelle par Arrêt N°698/01 en date du 13 décembre 2001 de la Cour Suprême Chambre Judiciaire, formation civile de COTE D’IVOIRE, saisie d’un pourvoi formé le 30 avril 2001 par YAPO YAPO Gérard et Autres, ayant pour conseil Maître TRAORE Moussa, Avocat à la Cour, y demeurant 16, rue Lamblin, Résidence Bellerive, porte 9, 14 BP 859 Abidjan 17,en cassation de l’Arrêt n°1036 rendu le 24 novembre 2000 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :
« EN LA FORME
- Déclare DENISE-RICHMOND MARCELLE recevable en son appel relevé de l’ordonnance de référé n°1921 rendue le 24 mai 2000 par la juridiction présidentielle du Tribunal de première instance d’Abidjan ;
AU FOND
- L’y dit bien fondé ;
- Infirme l’ordonnance entreprise ;
- Statuant à nouveau,
- Ordonne la mainlevée de la saisie arrêt pratiquée sur les comptes de DENISE-RICHMOND entre les mains de la SGBCI le 24 mars 2000 ;
- Condamne les intimés aux dépens. » ;
Les requérants invoquent à l’appui de leur pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à l’acte de pourvoi annexé au présent Arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Maïnassara MAÏDAGI ;
Vu les dispositions des articles 14, 15 et 16 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que par Arrêté n°71/MJLP/DSJ en date du 20 octobre 1997 de Monsieur le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et des Libertés Publiques, Maître AMON KOUASSI Richard, notaire de son état à Abidjan, a été déchu de ses fonctions et que Maître DENISE-RICHMOND Marcelle a été désignée en qualité de notaire intérimaire pour administrer l’Etude du notaire déchu ; que YAPO YAPO Gérard et autres, employés de Maître AMON KOUASSI Richard, ont saisi le Tribunal du Travail d’une action en paiement de sommes qui leur étaient dues par leur employeur, action dirigée contre Maître DENISE-RICHMOND Marcelle en sa qualité d’administrateur de l’Etude de Maître AMON KOUASSI Richard ; que par Jugement n°1688 rendu le 01 juillet 1999, le Tribunal du Travail a condamné Maître DENISE-RICHMOND Marcelle, en sa qualité d’administrateur, à payer différentes sommes d’argent aux employés de Maître AMON KOUASSI Richard ; que sur appel de Maître DENISE-RICHMOND Marcelle, la Cour d’appel d’Abidjan a, par Arrêt n°97 du 27 janvier 2000, déclaré l’appel recevable mais a dit l’appelante mal fondée et l’a déboutée tout en confirmant le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; que suite à une saisie-attribution de créance opérée par YAPO YAPO Gérard et autres en exécution de l’Arrêt n°97 du 27 janvier 2000 sus-indiqué sur ses comptes ouverts à la BICICI et à la SGBCI, Maître DENISE-RICHMOND Marcelle a saisi le juge des référés aux fins de mainlevée de la saisie-attribution, lequel juge a, par Ordonnance n°1941 en date du 24 mai 2000, rejeté la demande de la requérante en ce qu’elle ne rapporte pas la preuve de ce que les comptes saisis sont des comptes personnels et s’est déclaré incompétent pour statuer sur la désignation du Notaire devant payer les indemnités de rupture du contrat de travail des défendeurs ; que sur appel de Maître DENISE-RICHMOND Marcelle interjeté contre l’ordonnance de référé sus-indiquée, la Cour d’appel d’Abidjan a rendu l’arrêt dont pourvoi ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir manqué de base légale résultant de l’absence, de l’insuffisance, de l’obscurité ou de la contrariété des motifs en ce que la Cour a retenu l’argumentation de Maître DENISE-RICHMOND Marcelle tendant à dire qu’elle ne saurait être concernée qu’en sa qualité d’administrateur de l’Etude de Maître AMON KOUASSI Richard et, qu’au surplus, il n’y a pas lieu de faire une distinction entre ses comptes personnels et professionnels, alors que d’une part, la saisie litigieuse ayant été pratiquée en exécution de l’Arrêt définitif n°97 du 27 janvier 2000 qui a condamné Maître DENISE-RICHMOND Marcelle, la Cour ne pouvait ordonner la mainlevée de ladite saisie sans apprécier au préalable le caractère personnel ou professionnel des comptes saisis et, d’autre part, elle n’avait pas dit en quoi les comptes de Maître DENISE-RICHMOND Marcelle seraient insaisissables alors qu’il existe contre elle une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée l’ayant condamnée au paiement des sommes, objet de saisies ;
Mais attendu qu’en se fondant sur le fait que Maître DENISE-RICHMOND Marcelle a été condamnée en sa qualité d’administrateur de l’Etude de Maître AMON KOUASSI Richard et que les requérants ont reconnu que depuis les 10 et 16 mars 1999 il y a eu passation de charge entre Maîtres Marcelle DENISE-RICHMOND et FANNY Aïssata KONE pour ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la SGBCI le 24 mars 2000, la Cour d’Appel a, contrairement aux allégations des demandeurs au pourvoi, motivé sa décision et a donné une base légale à celle-ci ; qu’il s’ensuit que le premier moyen n’étant pas fondé doit être rejeté ;
Sur le second moyen
Attendu qu’il est également fait grief à la Cour d’appel d’avoir manifestement excédé ses pouvoirs en ce qu’elle ne pouvait distinguer là où la loi ne distingue pas, a fortiori ne pouvait accorder une insaisissabilité non prévue par les textes légaux ; qu’en effet, pour statuer comme elle l’a fait, « elle a cru devoir qualifier la condamnation prononcée à l’encontre de Maître DENISE-RICHMOND Marcelle pour en déduire que ni ses comptes personnels, ni ses comptes professionnels ne pouvaient faire l’objet de saisie qu’en sa qualité retenue lors de la condamnation » ; qu’elle a par conséquent « outrepassé ses attributions puisqu’aussi bien sur la base de sa qualité d’administrateur retenue, la Cour confère à Maître DENISE-RICHMOND Marcelle une insaisissabilité non prévue par les textes légaux » ;
Mais attendu que contrairement à ce que soutiennent les requérants, la Cour d’appel n’a en aucun moment dit que les biens de Maître DENISE-RICHMOND Marcelle étaient insaisissables ; qu’elle a plutôt considéré « que la condamnation dont l’exécution est entreprise concerne Maître DENISE-RICHMOND Marcelle en sa qualité d’Administrateur de l’Etude de Maître AMON KOUASSI Richard et que depuis les 10 et 16 mars 1999 il y a eu la passation de charge entre Maîtres DENISE-RICHMOND Marcelle et FANNY Aïssata KONE relativement à l’administration de l’Etude de Maître AMON Richard ; que le premier juge a méconnu le droit en statuant comme il l’a fait et que par conséquent il y a lieu d’ordonner la mainlevée de la saisie arrêt pratiquée entre les mains de la SGBCI le 24 mars 2000 » ; que la Cour d’appel, en statuant comme elle l’a fait n’a en rien excédé ses pouvoirs ; qu’il s’ensuit que le second moyen n’est pas davantage fondé et doit également être rejeté ;
Attendu que les requérants ayant succombé, il échet de les condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
- Rejette le pourvoi ;
- Condamne YAPO YAPO Gérard et autres aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier en chef