ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Deuxième Chambre
Audience Publique du 21 juillet 2005
Pourvoi n° 011/2003/ PC du 03 décembre 2003
Affaire : Société Texaco Côte d’Ivoire dite TEXACO-CI
(Conseils : Maîtres FADIKA-DELAFOSSE, K. FADIKA, C. KACOUTIE
et A. Anthony DIOMANDE, Avocats à la Cour)
Contre
La Société GROUPE FREGATE
(Conseils : La Société Civile Professionnelle d’Avocats Paris Village, Avocats à la Cour)
ARRET N° 051/2005 du 21 juillet 2005
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 21 juillet 2005 où étaient présents :
- Antoine Joachim OLIVEIRA, Président, rapporteur
Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge
Boubacar DICKO, Juge
et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ;
Sur le pourvoi formé par Maître FADIKA-DELAFOSSE, Avocat à la Cour, demeurant à Abidjan, Boulevard Carde, Avenue Docteur Jamot, Immeuble les Harmonies, 01 B.P. 2297 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de la Société TEXACO-COTE D’IVOIRE dite TEXACO-CI, Société Anonyme dont le siège social est à Abidjan Vridi (Côte d’Ivoire), 01 B.P. 1782 Abidjan 01, dans la cause qui l’oppose à la Société Groupe FREGATE dont le siège est au Plateau 11, Rue Paris Village, 17 B.P. 975 Abidjan 17, ayant pour conseils la SCP d’Avocats Paris-Village, Avocats à la Cour d’appel d’Abidjan, y demeurant, 11, Rue Paris – Village, 01 B.P. 5971 Abidjan,en cassation, d’une part, de l’Arrêt n° 143/2003 rendu le 13 mars 2003, par la Chambre judiciaire de la Cour Suprême de la République de Côte d’Ivoire et dont le dispositif est le suivant :
« Se déclare incompétente
Laisse les frais à la charge du Trésor Public.
Ordonne la transcription du présent arrêt sur les registres du Greffe de la Cour d’appel d’Abidjan ainsi que sur la minute de l’arrêt d’incompétence ; »,
et en cassation, d’autre part, de l’Ordonnance de référé n° 060/03 rendue par le Président de la Cour Suprême de la République de Côte d’Ivoire dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort ;
Déclare le recours exercé par la Société TEXACO-CI contre l’Ordonnance n° 72 du 18 septembre 2002 rendue par la Cour d’appel d’Abidjan irrecevable comme frappé de forclusion ;
Laissons les dépens à la charge du Trésor Public. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Antoine Joachim OLIVEIRA, Président ;
Vu les articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la Société TEXACO COTE D’IVOIRE dite TEXACO-CI a été autorisée, par Ordonnance de référé n° 4118 rendue le 21 août 2002 à sa requête par le Président du Tribunal de première instance d’Abidjan Plateau, à reprendre la station service « Lycée Français », sise à Cocody Riviera, qu’elle avait, par convention en date du 19 juin 2001, donné en location-gérance à la Société GROUPE FREGATE ; que ladite ordonnance a été mise à exécution le 03 septembre 2002 par Maître ADJO Pierre, huissier justice ; que par requête en date du 04 septembre 2002, la Société Groupe FREGATE a assigné en référé la Société TEXACO-CI devant le Président de la Cour d’appel d’Abidjan, aux fins de : « – Prononcer la nullité de tous les actes d’exécution de l’Ordonnance n° 4118 du 21 août 2002 -Ordonner sa réinstallation dans la Station Service TEXACO-CI Lycée Français » – Assortir la décision de réintégration d’une astreinte de 10.000.000 F CFA par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir ; » ; que par Ordonnance de référé n° 72 du 18 septembre 2002, le Président de ladite Cour d’appel a ordonné la réinstallation de la Société GROUPE FREGATE sur la station service litigieuse, sous astreinte de 2.000.000 francs CFA par jour de retard ; que par Arrêt n° 143/03 du 16 mars 2003, objet du présent pourvoi, rendu sur pourvoi en cassation formé, le 09 septembre 2002 contre l’Ordonnance n° 72, par la Société TEXACO-CI, la Cour Suprême de Côte d’Ivoire, Chambre judiciaire, formation civile, s’est déclarée incompétente au motif que le recours contre ladite ordonnance n’avait pas été porté, comme il est prescrit à l’article 221 nouveau, alinéa 5, du code ivoirien de procédure civile, commerciale et administrative, devant le Président de la Cour Suprême ; que par Ordonnance n° 60 du 10 juin 2003, également objet du présent pourvoi, rendue sur requête de la Société TEXACO-CI aux fins d’infirmation de la même ordonnance, le Président de la Cour Suprême de COTE D’IVOIRE a déclaré irrecevable ledit recours formé après l’expiration du délai de 15 jours prévu par l’article 221 susvisé du code ivoirien de procédure civile, commerciale et administrative ;
Sur la compétence de la Cour de céans
Attendu que la Société TEXACO-CI reproche à l’arrêt et à l’ordonnance attaquée, d’une part, d’avoir statué sur le litige l’opposant à la Société GROUPE FREGATE, alors qu’en application de l’article 15 du Traité instituant l’OHADA, la Cour Suprême de COTE D’IVOIRE, Chambre judiciaire, formation civile et le Président de cette juridiction avaient l’obligation de se dessaisir et de renvoyer devant la Cour de céans l’affaire qui relevait, selon la requérante, de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, d’autre part, de n’avoir pas considéré que la décision attaquée devant les deux juridictions nationales susdésignées avait été rendue par le Premier Président de la Cour d’appel d’Abidjan alors que l’article 49 de l’Acte uniforme susvisé donne compétence, en la matière, au Président du Tribunal de première instance, en l’occurrence, celui d’Abidjan ; qu’ainsi cet article a été violé par lesdites juridictions ;
Vu les alinéas 1, 3 et 4 de l’article 14 du Traité instituant l’OHADA aux termes desquels « La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage assure dans les Etats Parties l’interprétation et l’application commune du présent Traité, des Règlements pris pour son application et des Actes uniformes.
Saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats Parties dans les mêmes contentieux. » ;
Attendu que l’exécution forcée des décisions attaquées, sur la base desquelles la Société TEXACO-CI a repris la station service litigieuse n’a pas été pratiquée en vertu d’une des mesures d’exécution forcée prévues par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution invoqué par la requérante ; d’où il suit que l’affaire, ne soulevant pas des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme susvisé, ne relève pas de la compétence de la Cour de céans laquelle doit en conséquence se déclarer incompétente pour statuer sur le recours en cassation formé par la requérante ;
Attendu que la Société TEXACO Côte d’Ivoire dite TEXACO-CI ayant succombé, doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare incompétente ;
Renvoie la Société TEXACO Côte d’Ivoire dite TEXACO-CI à mieux se pourvoir ;
La condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier