ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Première chambre
Audience publique du 29 mars 2007
Pourvoi : n° 041/2005/PC du 30 août 2005
Affaire : Société Internationale de Commerce de Produits Tropicaux dite
SICPRO
(Conseil : Maître OBENG KOFFI FIAN, Avocat à la Cour)
contre
Société Gestion Ivoirienne de Transport Maritime Aérien dite
GITMA devenue GETMA
(Conseil : Maître Agnès OUANGUI, Avocat à la Cour)
ARRET N° 014/2007 du 29 mars 2007
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A), Première chambre, de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 29 mars 2007 où étaient présents :
Messieurs Jacques M’BOSSO, Président
Maïnassara MAIDAGI, Juge
Biquezil NAMBAK, Juge, rapporteur
et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré le 30 août 2005 au greffe de la Cour de céans sous le n°041/2005/PC et formé par Maître OBEN-KOFFI FIAN, Avocat à la Cour, demeurant 19, Boulevard Angoulvant Neuilly, Aile gauche, 2ème étage, 01 BP 6514 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de SICPRO, dans une cause l’opposant à la société GITMA devenue GETMA, ayant pour conseil, Maître Agnès OUANGUI, Avocat à la Cour, demeurant 24, Boulevard Clozel, Immeuble SIPIM, 5ème étage, 01 BP 1306 Abidjan 01, en cassation de l’Arrêt n°109 rendu le 28 janvier 2005 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière d’urgence et en dernier ressort ;
En la forme : Reçoit la société GETMA en son appel ;
Au fond : L’y dit bien fondée ;
Réforme l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a déclaré le juge des référés incompétent pour traiter de la question de créancier de la société SICPRO ;
Statuant à nouveau ;
Déclare le juge des référés compétent ;
Dit cependant que les saisies conservatoires de créances et de biens meubles pratiquées les 15,18 et 21 juin 2004 sont prématurées et inopportunes ;
Ordonne la mainlevée de ces saisies ;
Confirme pour le surplus ;
Condamne la société SICPRO aux dépens. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi le moyen unique de cassation tel qu’il figure à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Biquezil NAMBAK ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que par acte sous seing privé en date du 30 août 1999, la SICPRO avait donné ses locaux bâtis sur le lot 201 du domaine portuaire en bail commercial à la société GETMA pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction moyennant un loyer mensuel de 11.550.000 FCFA payable d’avance trimestriellement le premier jour ; que depuis le mois de juillet 2001, la société GETMA avait cessé tout paiement de loyer au motif qu’elle détiendrait désormais ses droits d’occupant non plus de la SICPRO mais du Port Autonome d’Abidjan ; que pour sûreté et avoir recouvrement de sa créance locative évaluée à la somme de 554.400.000 francs CFA, la SICPRO avait fait pratiquer plusieurs saisies conservatoires de créances et une saisie conservatoire de biens meubles appartenant à la société GETMA ; que sur contestation de la société GETMA, le juge des référés du Tribunal de première instance d’Abidjan, par Ordonnance n°2993/04 rendue le 08 juillet 2004, l’avait déboutée de sa demande de mainlevée des saisies litigieuses ; que sur appel de la société GETMA, la Cour d’appel d’Abidjan, par Arrêt n°109 du 28 janvier 2005 dont pourvoi, infirmait l’ordonnance querellée et, statuant à nouveau, ordonnait la mainlevée des saisies conservatoires des 15, 18 et 21 juin 2004 ;
Sur le moyen unique
Vu l’article 54 de l’Acte uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d’Exécution ;
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation des dispositions de l’article 54 de l’Acte uniforme susvisé en ce que, pour statuer comme il a été indiqué ci-dessus, la Cour d’appel excipe à tort de l’existence d’une procédure en annulation du bail initiée par la société GETMA pendante devant la juridiction compétente pour dire et juger que les saisies conservatoires de créances et de biens meubles pratiquées par la SICPRO sont prématurées et inopportunes alors que, d’une part, ledit article parle de « créance qui paraît fondée en son principe », ce qui signifie qu’une simple apparence de la créance suffit pour fonder la saisie conservatoire et, d’autre part, l’opportunité de pratiquer une telle saisie ne relève que de la seule appréciation du créancier saisissant ; qu’en décidant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel d’Abidjan a erré dans l’interprétation de l’article 54 susvisé et son arrêt encourt cassation ;
Attendu qu’aux termes de l’article 54 de l’Acte uniforme susvisé, « toute personne dont la créance parait fondée en son principe peut, par requête, solliciter de la juridiction compétente du domicile ou du lieu où demeure le débiteur, l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur tous les biens mobiliers corporels ou incorporels de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances de nature à en menacer le recouvrement » ;
Mais attendu que les conditions susénoncées par l’article 54 de l’Acte uniforme précité renvoient à des éléments de pur fait dont l’appréciation relève du pouvoir souverain du juge du fond ; qu’en retenant donc « qu’il ressort des écritures des parties que le juge du fond est saisi d’une procédure en nullité du contrat de bail liant la société GETMA à la société SICPRO, et dans ces conditions, les saisies pratiquées en vertu de créances encore contestées sont prématurées et inopportunes », la Cour d’appel d’Abidjan a fait usage de son pouvoir souverain d’appréciation du caractère apparent de la créance et de la réalité ou non des circonstances de nature à en menacer le recouvrement ; que ce faisant, elle ne viole en rien les dispositions susénoncées de l’article 54 précité ; qu’il suit que le moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;
Attendu que la SICPRO ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Rejette le pourvoi formé par la SICPRO ;
La condamne aux dépens.
Ainsi fait jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier