ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

 

Troisième chambre

Audience publique du 25 février 2016

Pourvoi :  n° 125/2012/PC du 19/09/2012

Affaire :    SCI BORIJA

                 (Conseils : SCPA SAKHO-YAPOBI-FOFANA, Avocats à la cour)                            

                                    contre

Société Afrique Informatique Bureautique dite AIB S.A.R.L (Conseil : Maître AMANY KOUAME, Avocat à la cour)

Arrêt N° 023/2016 du 25 février 2016

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), troisième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 25 février 2016        où étaient présents :

 

Madame      Flora DALMEIDA MELE,                        Présidente

Messieurs    Victoriano OBIANG ABOGO,                 Juge

Idrissa YAYE,                                     Juge

Birika Jean Claude BONZI,                   Juge

Fodé  KANTE,                                   Juge, rapporteur

 

et  Maître    Alfred Koessy BADO,                          Greffier ;

 

Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 19 septembre 2012 sous le n°125/2012/PC et formé par la SCPA SAKHO-YAPOBI-FOFANA, avocats à la cour,  demeurant 118 rue Pitot, Cocody Danga, 08 BP 1933 Abidjan 08, agissant au nom et pour le compte de la Société Civile Immobilière BORIJA dite SCI BORIJA, sise à Abidjan-Plateau, 01 BP 2924 Abidjan 01, dans la cause l’opposant à la société Afrique Informatique Bureautique dite A.I.B SARL dont le siège social est sis à Abidjan, immeuble BORIJA, 20 avenue NOGUES, 20 BP 1489 Abidjan 20, dûment représentée par son gérant, monsieur GOLI NOEL, assisté de son conseil maître AMANY Kouamé, avocat à la cour d’appel d’Abidjan, demeurant et domicilié en ladite ville, rue 38, boulevard NANAN YAMOUSSO, escalier C, 1er étage, porte 110, 04 B.P. 454 Abidjan 04,  en cassation de l’arrêt  n° 493/012 du 17 avril 2012, rendu par la 5ème Chambre Civile de la Cour d’Appel d’Abidjan dont le dispositif est le suivant :

 

« PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort ;

Déclare la société AIB Sarl recevable en son appel relevé de l’ordonnance N° 1252/2012 en date du 13 mars 2012 rendue par le Juge des référés du Tribunal de Première Instance d’Abidjan ;

L’y dit bien fondée ;

Infirme l’ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau ;

Déboute la Société SCI BORIJA de son action en expulsion pour impayé de loyers dirigés contre la Société AIB Sarl ;

Condamne la SCI BORIJA aux dépens. » ;

La requérante invoque à l’appui de son pourvoi le moyen unique de cassation tel qu’il figure à la requête annexée au présent arrêt ;

 

Sur le rapport de monsieur Fodé KANTE, Juge ;

 

Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

 

Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

 

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la Société Civile Immobilière BORIJA dite SCI BORIJA et la Société Afrique Informatique Bureautique dite AIB SARL sont liées par un contrat de bail commercial depuis plusieurs années ; que la SCI BORIJA ayant estimé que sa locataire AIB SARL lui restait devoir des arriérés de loyers échus et impayés d’une valeur de 3.324.000 F CFA représentant 16 mois de loyers, a fait servir à celle-ci une mise en demeure à la date du 22 décembre 2011, lui demandant de vouloir s’exécuter de son obligation contractuelle consistant à lui payer ces arriérés de loyers échus et impayés ; que plus d’un mois après, elle l’a assigné suivant exploit du 26 janvier 2012 par devant le juge des référés expulsion du tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau pour solliciter son expulsion ; que par ordonnance de référé expulsion N°1252/012 du 13 mars 2012, le juge délégué dans les fonctions de président du tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau, tenant audience publique de référé expulsion, a ordonné l’expulsion de la société AIB SARL ainsi que celle d’un certain SAKO TAIROU des lieux qu’ils occupent tant de leur personne, de leurs biens que de tout occupant de leur chef ; que sur appel de la société AIB SARL relevé le 15 mars 2012, la cour d’appel d’Abidjan a rendu le 17 avril 2012, l’arrêt n°493/012 dont pourvoi ;

Sur le moyen unique du pourvoi

Vu l’article 133 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général ;

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir, en violation de l’article 133 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, infirmé l’ordonnance de référé expulsion N° 1252/012 du 13 mars 2012 au motif que la société AIB SARL s’est acquittée de ses loyers par des chèques datés respectivement des 06 et 26 mars 2012 et que l’action de la SCI BORIJA était devenue sans objet alors, selon le moyen, que le défaut de paiement des loyers dans le délai d’un mois de la mise en demeure expose le preneur à la résiliation du bail et à son expulsion ;

 

Attendu en effet, qu’aux termes de l’article 133 alinéa 3 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général : « A peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu’à défaut de s’exécuter dans un délai d’un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisi aux fins de résiliation du bail et d’expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef » ; que dans le cas d’espèce, le paiement par la société AIB SARL des arriérés de loyers dus par elle suivant des chèques datés respectivement des 06 et 26 mars 2012 ne saurait produire un effet sur la demande d’expulsion introduite dès lors qu’il est établi qu’aucun paiement n’est intervenu dans le délai de 30 jours prescrit par la loi à compter de la signification de la mise en demeure du 22 décembre 2011 ; qu’ainsi, la société AIB SARL ne s’étant pas acquittée des loyers échus dans le mois de la mise en demeure, la cour d’appel a fait une interprétation erronée de l’article 133 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général ; que dès lors, il y a lieu de casser l’arrêt attaqué et d’évoquer ;

 

Sur l’évocation

Attendu que par exploit de maître GNACO Leube Lucien, huissier de Justice à Abidjan, en date du 15 mars 2012, la société Afrique Informatique Bureautique dite AIB SARL a déclaré relevé appel de l’ordonnance N° 1252 en date du 13 mars 2012 rendue par le Juge des référés expulsion du Tribunal de Première Instance d’Abidjan dont le dispositif est le suivant :

« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort ;

Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ; mais dès à présent, vu l’urgence ;

Déclarons la SCI BORIJA recevable en son action ;

L’y disons bien fondée ;

Ordonnons l’expulsion de SAKO TAIROU et de la société AIB SARL des lieux qu’ils occupent tant de leur personne, de leurs biens que de tout occupant de leur chef ;

Ordonnons l’exécution provisoire de la présente ordonnance sur minute et avant enregistrement ;

Condamnons les défendeurs aux dépens ; » ;

Qu’au soutien de son appel, la société AIB SARL sollicite de la Cour l’infirmation de l’ordonnance entreprise et, évoquant et statuant à nouveau, demande le débouté de la Société Civile Immobilière BORIJA dite SCI BORIJA de son action en expulsion, motif pris de ce qu’elle s’est acquittée de ses arriérés de loyers ;

Attendu qu’en réplique, la SCI BORIJA soutient, par l’entremise de ses conseils, que la société AIB SARL a manifestement violé les dispositions de l’article 133 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général en ne procédant pas au paiement requis dans le délai d’un mois à partir de la mise en demeure ; qu’en conséquence, elle sollicite la confirmation de l’ordonnance entreprise ;

Sur la demande d’expulsion

Attendu que pour les mêmes motifs que ceux développés lors de l’examen du moyen unique de cassation, il y a lieu de constater que les conditions de résiliation du bail liant la SCI BORIJA à la société AIB SARL et d’expulsion de celle-ci conformément à l’article 133 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, sont réunies  dans la mesure où jusqu’à l’expiration du délai requis, cette dernière n’avait effectué aucun paiement ; qu’en conséquence, l’appelante n’apportant pas la preuve qu’elle a payé les arriérés de loyers réclamés dans le délai légal, il y a lieu de confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Attendu que la société AIB SARL ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens ;

 

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, après en avoir délibéré,

Casse l’arrêt N° 493/012 du 17 avril 2012 rendu par la Cour d’Appel d’Abidjan ;

Evoquant et statuant sur le fond :

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Condamne la société AIB SARL aux dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé

 

 

 

La Présidente 

Le Greffier