ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Première chambre
Audience Publique du 14 décembre 2017
Pourvoi : n° 210/2016/PC du 29/09/2016
Affaire : Monsieur Mor DIOP
(Conseil : Maître Cheikh Tidiane MBODJ, Avocat à la Cour)
Contre
Monsieur Michel CORFEC
(Conseils : SCPA WANE & FALL, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 227/2017 du 14 décembre 2017
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 14 décembre 2017 où étaient présents :
Madame Flora DALMEIDA MELE, Présidente, rapporteur
Messieurs Marcel SEREKOISSE SAMBA, Juge
Robert SAFARI ZIHALIRWA, Juge
et Maître Edmond Acka ASSIEHUE, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 29/09/2016 sous le n°210/2016/PC et formé par Maître Cheikh Tidiane MBODJ, Avocat à la cour à Thiès, quartier parcelle Assainies en face poste de santé KANDJI BP 323 Thiès Sénégal, agissant au nom et pour le compte de Monsieur Mor DIOP, gérant de la société SARL SOMONE dont le siège se trouve à la SOMONE, département de Mbour dans la cause l’opposant à Monsieur Michel CORFEC, gérant de la société AFRICA QUEEN SARL ayant son siège social à la Somone département de Mbour au Sénégal, ayant pour conseils, la SCPA WANE & FALL, Avocats à la Cour à Dakar, immeuble Kébé, 27 avenue Jean Jaurès, en cassation de l’arrêt n°103 rendu le 14 juin 2016 par la chambre civile et commerciale de la Cour d’appel de Thiès au Sénégal et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, sur référé et en dernier ressort ;
EN LA FORME
- Reçoit l’appel interjeté ;
AU FOND
- Infirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
- Constate la fin du contrat de location-gérance à durée indéterminée conclu entre les parties ;
- Ordonne l’expulsion de Mor DIOP, gérant de la SARL SOMONE des locaux abritant le fonds de commerce objet du contrat de location – gérance du 1er Août 2004, renouvelé suivant avenant du 15 juillet 2011 et ce, tant de sa personne que de tout occupant de son chef ;
- Le condamne aux dépens. » ;
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent dans sa requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Madame Flora DALMEIDA MELE, Présidente ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que la société Africa Queen représentée par son gérant monsieur Michel CORFEC et la société Somone, représentée par son gérant, monsieur Mor DIOP, ont conclu, le 1er août 2004, un contrat de location gérance d’un fonds de commerce renouvelé plusieurs fois par tacite reconduction et dont le terme du dernier renouvellement était fixé au 31 juillet 2015 ; que le 21 novembre 2014, soit plus de six mois avant le dernier terme du contrat, la société Africa Queen représentée par son gérant Michel CORFEC, notifiait , par voie d’huissier de justice, à la société SOMONE représentée par monsieur Mor Diop, une lettre par laquelle elle l’informait de sa décision de ne pas reconduire le contrat ; qu’entretemps, se prévalant de son droit de renouvellement, monsieur Mor DIOP , gérant de la société SOMONE, a fait servir , le 20 mars 2015 à monsieur Michel CORFEC, une lettre de renouvellement de bail ; que le 17 juillet 2015, monsieur Michel CORFEC a rappelé, par voie d’huissier , à monsieur Mor DIOP, sa décision de mettre fin au contrat les liant ; que Mor DIOP estime que la réponse à sa demande de renouvellement de contrat est intervenue moins de 30 jours avant l’expiration du bail prévue le 31 juillet 2015 et que, pour cela, son bail court ; que face à l’obstination de monsieur Mor DIOP à demeurer sur les lieux et à continuer à exploiter le fonds de commerce, monsieur Michel CORFEC l’a assigné en expulsion par devant le juge des référés du Tribunal de grande instance de Thiès qui , par ordonnance n°378 du 08 octobre 2015, l’a débouté de sa demande en expulsion comme étant mal fondée ; que sur appel de monsieur Michel CORFEC, la Cour d’appel de Thiès a rendu l’arrêt infirmatif dont pourvoi ;
Sur le premier moyen
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les articles 101, 123, 124 et 134 de l’Acte uniforme portant droit commercial général en ce que pour infirmer l’ordonnance n°378, la cour d’appel a retenu qu’il s’agit d’un contrat de location-gérance conclu entre les parties qui ne peut être confondu avec le bail commercial d’une part, que d’autre part, il n’existe aucun droit au renouvellement au profit du locataire gérant contrairement au locataire dans un bail commercial, que le premier juge s’est trompé de texte applicable en glissant vers le champ du bail commercial et enfin le juge a soumis la loi applicable au bail commercial à un contrat de location-gérance alors que le contrat de location gérance portant sur l’exploitation d’un fonds de commerce situé dans un immeuble appartenant à Michel CORFEC est un contrat à usage professionnel donnant lieu au renouvellement du bail ;
Mais attendu que la violation des articles 101, 123, 124 et 134 de l’Acte uniforme précité dont se prévaut le demandeur au pourvoi règlementent le bail à usage professionnel ; qu’il ressort de la rubrique “désignation” du contrat que le loueur donne à titre de location-gérance au preneur qui accepte le fonds de commerce ; que le contrat intervenu entre les parties est un contrat de location-gérance d’un fonds de commerce dont la définition et les modes d’exploitation sont fixés aux articles 137 et 138 dudit Acte uniforme ; que le contrat en objet porte non sur la location de l’immeuble qui appartient à Michel CORFEC mais sur le fonds de commerce ; qu’en décidant que c’est à tort que les premiers juges ont soumis un contrat de location gérance aux dispositions applicables au bail commercial, les juges d’appel n’ont pas commis le grief visé au moyen ; qu’il convient de le rejeter ;
Sur le second moyen
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de manquer de base légale en ce que le juge du fond n’a procédé que par des rappels de définitions, des reproches au premier juge et des dénégations de droit sans application d’aucun des textes du livre VI de l’Acte uniforme portant droit commercial général qui traite du bail à usage professionnel et du fonds de commerce ;
Mais attendu qu’en se fondant sur les articles 137 de l’Acte uniforme précité qui énumère les éléments constituant le fonds de commerce entre autres, le droit au bail qui est l’objet du contrat, et l’article 138 qui détermine les modes d’exploitation d’un fonds de commerce et après s’être rassuré que le contrat intervenu entre les parties est un contrat de location-gérance qui ne peut être confondu à un bail à usage professionnel, pour conclure que le contrat de location-gérance ne peut être confondu à un contrat de bail commercial qui, seul, donne droit au renouvellement du contrat, la cour d’appel a constaté la fin du contrat de location-gérance et son renouvellement par le propriétaire, donnant ainsi une base légale à sa décision ; qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;
Sur les dépens
Attendu qu’ayant succombé, Monsieur Mor DIOP, gérant de la société SARL SOMONE, doit être condamné aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Rejette le pourvoi ;
Condamne Monsieur Mor DIOP, gérant de la société SARL SOMONE aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
La Présidente
Le Greffier