ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Troisième Chambre
Audience Publique du 4 décembre 2012
Pourvoi : n° 090/2008/PC du 25/09/2008
Affaire : La Société GETMA-CI SA
(Conseils : la SCPA KANGA & Associés, Avocats à la Cour)
contre
La SDV-SAGA-CI SA
(Conseil : Maître Michel BOUAH-KAMON, Avocat à la Cour)
ARRET N° 081/2012 du 4 décembre 2012
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 4 décembre 2012 où étaient présents :
Messieurs Ndongo FALL, Président
Abdoulaye Issoufi TOURE, Juge rapporteur
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge
et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef,
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n° 090/2008/PC le 25 septembre 2008 et formé par la SCPA KANGA et Associés, Avocats à la Cour, y demeurant commune du Plateau, avenue LAMBLIN, Résidence BELLERIVE, 04 BP 361 Abidjan 04, agissant au nom et pour le compte de la GETMA-CI SA, Société Anonyme dont le siège social est à Abidjan, Boulevard de Vridi, 18 BP 3298, dans la cause l’opposant à la SDV-SAGA-CI dont le siège social est à Abidjan Treichville, Avenue CHRISTIANI, 01 BP 1727, représentée par son Directeur Général Monsieur Lionnel LABARRE et ayant pour Conseil Maître Michel BOUAH-KAMON, Avocat à la Cour, y demeurant 3, Avenue THOMASSET, Résidence THOMASSET, en cassation de l’Arrêt n° 394 rendu le 04 avril 2003 par la Cour d’appel d’Abidjan dont le dispositif est le suivant :
« statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
En la forme : Déclare la société SDV recevable en son appel régulier ;
Au fond : L’y dit bien fondé ; Infirme le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau,
Condamne la société GITMA à payer à la SDV, la somme de 408 064 760 FCFA (quatre cent huit millions soixante quatre mille sept cent soixante francs) représentant les causes de la saisie augmentée des intérêts de retard fixé au 26 mai 2000 ;
Met les dépens à la charge de GITMA » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Abdoulaye Issoufi TOURE ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il résulte des pièces de la procédure les faits suivants :
Le 26 mai 2000 la société SDV-SAGA-CI se disant créancière de RIAL TRADING, pratiquait sur elle une saisie conservatoire portant sur 2656 tonnes de sucre, entre les mains de GETMA-CI. Cette saisie sera levée suivant ordonnance de référé n° 589 du Président du Tribunal d’Abidjan du 29 novembre 2000 aux motifs que la dette a été déjà épongée ; Mais auparavant dans une sommation interpellative du 23 novembre 2000, un agent de GETMA-CI déclarait que seulement 100 tonnes de sucre étaient entreposées dans leur magasin ; la SDV- SAGA-CI se prévalant de cette déclaration laissant présumer la disparition de 2558 tonnes, assigna le 12 décembre 2000 GETMA-CI, tiers-saisi, aux fins de paiement des causes de la saisie ; déboutée en première instance, la SDV-SAGA-CI obtiendra gain de cause devant la Cour d’appel d’Abidjan par Arrêt n° 394 du 04 avril 2003, arrêt faisant l’objet du présent pourvoi ;
Sur la compétence de la Cour et la recevabilité du pourvoi ;
Attendu que Maître BOUAH-KAMON a décliné la compétence de la Cour de céans dans une lettre du 17 novembre 2008, en application de l’article 32 paragraphe 2 du Règlement de procédure de la Cour, et soulevé l’irrecevabilité du pourvoi dans son mémoire en réponse, en vertu de l’article 28 du même Règlement ;
Mais attendu que par rapport à la compétence, elle a été définitivement tranchée par la Cour de céans en son Arrêt n° 038/2008 du 17 juillet 2008 annulant l’Arrêt n° 24/05 du 31 janvier 2005 de la Chambre judiciaire de la Cour Suprême de la République de Côte d’Ivoire ; que sur la recevabilité, la requête en cassation se réfère à l’article 38 du « Traité de l’OHADA sur les voies d’exécution » en le reproduisant, visant ainsi l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; que dès lors, la disposition de l’article 28 du Règlement relative au défaut de mention d’un Acte uniforme ne saurait trouver application ; qu’il échet de dire que le pourvoi est recevable ;
Sur le premier moyen
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt déféré « la violation ou erreur dans l’application ou l’interprétation de l’article 38 du Traité de l’OHADA sur les voies d’exécution », en ce que l’application de cet article, donne la latitude au juge en cas de manquement, de condamner mais pour cela, il faut qu’il y ait un préjudice ;
Attendu, en effet, que même si la notion de préjudice paraît superfétatoire, l’article 38 en prévoyant des sanctions contre « le tiers entre les mains duquel est pratiquée une saisie », a expressément voulu protéger les saisies régulières qui, sauf décision contraire, doivent être conduites jusqu’à leur terme pour garantir le désintéressement du créancier ; que manifestement cette garantie n’est plus de mise lorsque la saisie a perdu légalement tout effet ; qu’il en est ainsi en l’espèce où mainlevée de la saisie a été ordonnée bien avant l’introduction de l’instance en paiement des causes de la saisie le 12 décembre 2000 ; qu’aussi, la Cour d’appel en infirmant le jugement entrepris du 31 janvier 2002 et en condamnant au paiement des causes de la saisie, a violé les dispositions sus-indiquées et sa décision encourt la cassation, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le second moyen ; qu’il échet de casser l’Arrêt n° 394 rendu le 3 avril 2009 par la Cour d’appel d’Abidjan et d’évoquer ;
Sur l’évocation
Attendu que la cassation est obtenue du fait de la violation de l’article 38 visé au moyen ; que tant à la date du jugement (31 janvier 2002), qu’à celle de l’arrêt (04 avril 2003), la saisie n’avait plus effet et que dès lors aucun manquement ne saurait être retenu à l’égard d’un tiers fût-il celui entre les mains duquel la saisie a été effectuée ; que c’est donc plutôt le jugement de débouté du 31 janvier 2002 qui relève d’une bonne appréciation des faits et d’une saine application de la loi ; qu’il échet de le confirmer ;
Attendu que la SDV-SAGA-CI, succombant, doit être condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare le pourvoi recevable,
Casse l’arrêt n° 394 rendu le 04 avril 2003 par la Cour d’appel d’Abidjan ;
Evoquant et statuant sur le fond,
Confirme le jugement n° 17 du 31 janvier 2002 du Tribunal de Première Instance d’Abidjan ;
Condamne la SDV-SAGA-CI aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier en chef