ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Deuxième Chambre
Audience Publique du 24 février 2005
POURVOIS N°s : 027/2002/PC du 03/06/2002
028/2002/PC du 03/06/2002
AFFAIRES : 1°) BROU KOUASSI Firmin
(Conseils : SCPA Abel KASSI et Associés, Avocats à la Cour)
contre
– KOFFI ASSE
(Conseil : Maître KOFFI BROU Pascal, Avocat à la Cour)
– La Société Générale de Banques en COTE d’IVOIRE dite SGBCI
(Conseils : Maîtres Charles DOGUE, Abbé YAO & Associés, Avocats à la Cour)
2°) La Société Générale de Banques en COTE d’IVOIRE dite SGBCI
(Conseils : Maîtres Charles DOGUE, Abbé YAO & Associés, Avocats à la Cour)
contre
– KOFFI ASSE
(Conseil : Maître KOFFI BROU Pascal, Avocat à la Cour)
– BROU KOUASSI Firmin
(Conseils : SCPA Abel KASSI et Associés, Avocats à la Cour)
ARRET N° 014/2005 du 24 février 2005
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 24 février 2005 où étaient présents :
Messieurs Antoine Joachim OLIVEIRA, Président
Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge
Boubacar DICKO, Juge, rapporteur
et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ;
1°) Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans de l’affaire BROU KOUASSI Firmin contre KOFFI ASSE et la Société Générale de Banques en COTE D’IVOIRE dite SGBCI par Arrêt n°0148/02 en date du 14 février 2002 de la Cour Suprême de COTE D’IVOIRE, Chambre Judiciaire, formation civile, saisie d’un pourvoi initié par exploit en date du 26 avril 2000 de Maître N’DRI Niamkey Paul, Huissier de justice près le Tribunal de première instance d’Abidjan commis par la SCPA Abel Kassi et Associés, Avocats à la Cour d’appel d’Abidjan, y demeurant 17, Boulevard Roume, immeuble Roume, 2ème étage, portes 21 et 22, agissant au nom et pour le compte de Monsieur BROU KOUASSI Firmin,en cassation de l’Arrêt n°28 rendu le 16 février 2000 par la Cour d’appel de Bouaké au profit de Monsieur KOFFI ASSE ayant comme conseil Maître KOFFI BROU Pascal, Avocat à la Cour d’appel d’Abidjan demeurant à Marcory zone 4C, villa Bampo, n°583, 3ème, rue parallèle à la rue Paul Langevin, 01 BP 8636 Abidjan 01 et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort ;
En la forme
- déclare Koffi ASSE recevable en son appel ;
Au fond
- L’y dit bien fondé ;
- Infirme le Jugement attaqué en ce qu’il a mis hors de cause la SGBCI et déclaré BROU KOUASSI Firmin propriétaire de l’entreprise GESA ;
Statuant à nouveau :
- Dit que la SGBCI a commis une faute qui a causé préjudice à KOFFI ASSE ;
- Déclare KOFFI ASSE propriétaire de l’entreprise GESA ;
- Ordonne la restitution par BROU KOUASSI Firmin de tous documents et accessoires de l’entreprise GESA à KOFFI ASSE ;
- Condamne solidairement la SGBCI et BROU KOUASSI Firmin à payer la somme de dix millions (10.000.000) de francs CFA à titre de dommages et intérêts à KOFFI ASSE ;
- Condamne la SGBCI et Brou KOUASSI Firmin aux dépens » ;
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
2°) Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique devant la Cour de céans de l’affaire la Société Générale de Banques en COTE D’IVOIRE dite SGBCI contre KOFFI ASSE et BROU KOUASSI Firmin par Arrêt n°150/02 en date du 14 février 2002 de la Cour Suprême de COTE D’IVOIRE, Chambre Judiciaire, formation civile, saisie d’un pourvoi initié contre le même Arrêt n°28 susénoncé de la Cour d’appel d’Abidjan par exploit en date du 18 mai 2000 de Maître Christophe KOFFI KOUAME, Huissier de Justice près le Tribunal de première instance et la Cour d’appel d’Abidjan agissant à la requête de la SGBCI laquelle a élu domicile en l’Etude de Maîtres Charles DOGUE, Abbé YAO & Associés, Avocats à la Cour d’appel d’Abidjan, y demeurant 29, Boulevard CLOZEL, 01 BP 174 Abidjan 01 ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Boubacar DICKO ;
Vu les dispositions des articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’aux termes de l’article 33 du Règlement susvisé, « la Cour peut à tout moment pour cause de connexité, ordonner la jonction de plusieurs affaires aux fins de la procédure écrite ou orale ou de l’arrêt qui met fin à l’instance. Elle peut les disjoindre à nouveau. » ;
Attendu qu’entre les deux affaires ci-dessus citées, il existe un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les juger ensemble ; qu’il échet en conséquence de les joindre pour y être statué par une même décision ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que Monsieur BROU KOUASSI Firmin aurait créé courant 1996 à Toumodi une entreprise dénommée GESA dont il aurait décidé de confier la gestion à Monsieur KOFFI ASSE son « prête-nom » ; qu’il ressort également que le même KOFFI ASSE affirme avoir créé à Toumodi la structure sus-désignée courant septembre 1995 ; que reprochant pour sa part à son « prête-nom » des actes de mauvaise gestion, Monsieur BROU KOUASSI Firmin informait en janvier 1997 la SGBCI, Agence de Toumodi, de ce qu’il retirait sa confiance à Monsieur KOFFI ASSE et prenait lui-même désormais la gestion du compte bancaire de l’entreprise GESA ; qu’ayant constaté que Monsieur BROU KOUASSI Firmin signait lui-même les chèques avec, selon lui, l’assentiment de la banque alors qu’il s’estimait seul « propriétaire » de cette entreprise et, comme tel, seul habilité pour ce faire, Monsieur KOFFI ASSE assignait Monsieur BROU KOUASSI Firmin et la SGBCI devant la Section du Tribunal de Toumodi par exploits en date respectivement des 24 septembre et 21 novembre 1997 pour, notamment, en ce qui concerne Monsieur BROU KOUASSI Firmin : « …dire et juger que l’entreprise générale d’électricité et services associés dite GESA est [sa] propriété exclusive en matériels fixes et roulants ; en conséquence, ordonner l’expulsion de Monsieur BROU KOUASSI Firmin tant de sa personne que de tous occupants de son chef… » et, quant à la banque, « condamner l’Agence SGBCI de Toumodi avec garantie de la SGBCI siège social Abidjan 5 et 7 avenue Joseph ANOMA, au paiement de la somme de 35.000.000 francs CFA à titre de dommages-intérêts toutes causes de préjudices confondues ; dire que le retard dans le paiement des dommages-intérêts résultant de la présente décision sera assorti d’une astreinte comminatoire de 100.000 francs CFA par jour à compter de la signification … » ; que suite à ces demandes de Monsieur KOFFI ASSE, par exploit en date du 24 novembre 1997, la SGBCI appelait en intervention forcée Monsieur BROU KOUASSI Firmin pour « entendre dire que [celui-ci] doit être substitué à la SGBCI et supporter le cas échéant le paiement des condamnations qui pourraient être prononcées ; entendre dire qu’elle (la SGBCI) sera purement et simplement mise hors de cause… » ; que statuant sur l’ensemble des demandes susénoncées, par Jugement n°136 en date du 30 juillet 1998, la Section du Tribunal de Toumodi déboutait Monsieur KOFFI ASSE de ses prétentions et déclarait Monsieur BROU KOUASSI Firmin propriétaire de l’entreprise GESA ; que sur appel de Monsieur KOFFI ASSE, la Cour d’appel de Bouaké, par Arrêt n°28 en date du 16 février 2000, après avoir infirmé le Jugement précité, déclarait Monsieur KOFFI ASSE propriétaire de l’entreprise GESA, ordonnait la restitution par Monsieur BROU KOUASSI Firmin de tous documents et accessoires de l’entreprise GESA et le condamnait solidairement avec la SGBCI à payer à Monsieur KOFFI ASSE la somme de 10.000.000 francs CFA à titre de dommages-intérêts ;
que sur pourvois respectifs formés les 03 et 23 mai 2000 par Monsieur BROU KOUASSI Firmin et la SGBCI contre l’arrêt précité devant la Cour suprême de COTE D’IVOIRE, celle-ci se dessaisissait de ces deux affaires au profit de la Cour de céans ;
Sur la compétence de la Cour
Vu l’article 14, alinéas 3 et 4, du Traité susvisé ;
1°) Sur le pourvoi de Monsieur BROU KOUASSI Firmin
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, d’une part, « la prononciation sur une chose non demandée ou attribution de choses au-delà de ce qui a été demandé en ce que la Cour a statué ultra petita en ordonnant la restitution des documents et accessoires de l’entreprise GESA au sieur KOFFI ASSE alors même que les juridictions étaient saisies d’une action en expulsion » et, d’autre part, « le défaut de base légale résultant de l’absence, de l’insuffisance, de l’obscurité ou de la contrariété des motifs en ce que la Cour d’appel a cru bon de condamner solidairement le sieur BROU KOUASSI Firmin et la SGBCI à payer des dommages-intérêts sans stigmatiser la faute à eux reprochée tout en déniant toute valeur juridique à l’acte de cautionnement versé aux débats, photocopies de chèques tirés par le sieur BROU KOUASSI Firmin et dont KOFFI ASSE était le bénéficiaire » alors même, d’une part, qu’en matière commerciale la liberté de la preuve étant de principe, ce que rappelle au demeurant l’article 144 de l’Acte uniforme portant droit commercial général, « il appartenait à la Cour d’appel d’ordonner, ne serait-ce qu’une enquête afin d’interroger tous sachants pour mieux apprécier la réalité des faits et non pas faire fi des salaires du sieur KOFFI ASSE et autres dépenses courantes de la Société GESA effectués par le sieur BROU KOUASSI Firmin » ; alors, d’autre part, que l’arrêt attaqué, en partant de l’affirmation que « la SGBCI a opéré de façon unilatérale et irrégulière le transfert du compte de l’entreprise GESA de KOFFI ASSE à BROU KOUASSI Firmin… » pour aboutir à une condamnation solidaire, n’a pas su bâtir de raisonnement juridique correspondant au litige tant les fautes, la solidarité et le préjudice ne sont ni caractérisés ni prouvés et que par suite ses motifs sont obscurs, insuffisants voire inexistants ;
2°) Sur le pourvoi de la SGBCI
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué une violation de la loi résultant de l’erreur dans l’application ou l’interprétation de la loi, notamment de l’article 1202 du code civil, en ce que, d’une part, la Cour d’appel de Bouaké a cru devoir prononcer la condamnation solidaire de la SGBCI et de Monsieur BROU KOUASSI Firmin au paiement de la somme de 10.000.000 de francs CFA au profit de Monsieur KOFFI ASSE à titre de dommages-intérêts sans même fournir un début de motivation en ce qui concerne cette solidarité alors qu’aux termes de l’article 1202 du code civil, « la solidarité ne se présume point ; que faisant application de ce texte, la jurisprudence décide de façon constante que la solidarité entre les débiteurs ne peut être prononcée que dans les cas prévus par la loi et ne peut être déduite du seul fait de leur obligation à réparer le dommage » et, par suite, « en prononçant la condamnation solidaire de la SGBCI et de Monsieur BROU KOUASSI Firmin, sans aucune motivation et sans dire en quoi cette solidarité rentrait dans les cas prévus par la loi, la Cour d’appel a violé, par mauvaise application, l’article 1202 du code civil précité » ; d’autre part, « le défaut de base légale, résultant de l’absence ou de l’insuffisance des motifs, dénaturation des documents de la cause, défaut de réponse à conclusions », en ce que pour prononcer la condamnation solidaire visée au premier moyen, la juridiction d’appel a considéré qu’aucun document écrit, notamment une contre-lettre, n’a été produit aux débats, prouvant la qualité de prête-nom de Monsieur KOFFI ASSE et que ce faisant, la SGBCI a commis une faute en opérant « de façon unilatérale et irrégulière le transfert du compte de l’entreprise GESA de KOFFI ASSE à BROU KOUASSI Firmin » alors, en premier lieu, que si les juges du fond apprécient souverainement la valeur probante des éléments de preuve qui leur sont soumis, cette appréciation ne signifie pas pouvoir discrétionnaire et ne les dispense pas de l’obligation de motiver leur décision, notamment de dire en quoi les éléments produits n’emportent pas leur conviction de façon à permettre à la Haute Juridiction d’exercer, le cas échéant, son contrôle de la dénaturation des faits et documents ; qu’il convient de rappeler qu’à l’ouverture du compte bancaire n°312.315.144-23 dans les livres de la SGBCI, Monsieur BROU KOUASSI Firmin a déposé un chèque SGBCI, selon remise de chèques et relevés de compte produits aux débats ; que le 18 janvier 1996, Monsieur BROU KOUASSI Firmin, garantissait le bon fonctionnement du compte susvisé en acceptant un nantissement sur un compte à terme dont il disposait par ailleurs dans le même établissement bancaire, ce qui a été prouvé par la production de l’acte de nantissement ; qu’en outre, par lettre du 28 janvier 1997 adressée à la SGBCI, Agence de Toumodi, et rédigée sur papier à en-tête de l’entreprise GESA, Monsieur BROU KOUASSI Firmin a informé la banque de ce qu’il retirait sa confiance à Monsieur KOFFI ASSE et demandait la suspension de sa signature sur le compte GESA ; que cette note d’information était suivie dans les faits par des éléments corroborant le pouvoir effectif de Monsieur BROU KOUASSI Firmin sur le compte de l’entreprise GESA ; qu’en effet, le susnommé a émis des chèques tirés des chéquiers de l’entreprise GESA à l’ordre de Monsieur KOFFI ASSE qui n’a rien trouvé à redire et a, au contraire, déposé lesdits chèques à l’encaissement en les endossant ; que les photocopies de ces chèques ont été versées aux débats sans que ni la signature de Monsieur BROU KOUASSI Firmin portée au recto des chèques ni celle de Monsieur KOFFI ASSE portée au verso desdits chèques
n’aient été contestées ; qu’à la connaissance de la SGBCI, Monsieur KOFFI ASSE n’a, à ce jour , porté aucune plainte pour vol ni de papiers à en-tête, ni de chéquiers au nom de cette entreprise et n’a pas davantage offert d’expliquer comment ces documents se sont retrouvés en possession de Monsieur BROU KOUASSI Firmin autrement que par la restitution volontaire qu’il lui en a faite par suite du retrait de pouvoir ; que la Cour d’appel de Bouaké ne pouvait donc faire abstraction de ces pièces déterminantes versées au dossier et du singulier comportement de Monsieur KOFFI ASSE, prétendument spolié, en proclamant qu’aucun document écrit n’était produit ; qu’en statuant comme elle l’a fait par simple affirmation de la propriété de Monsieur KOFFI ASSE sur l’entreprise GESA pour en déduire l’irrégularité des opérations passées par la SGBCI et dont Monsieur KOFFI ASSE était lui-même en partie bénéficiaire, la juridiction d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision, laquelle est dépourvue de motivation ; alors, en second lieu, qu’il est inexact d’affirmer, comme l’a fait la Cour d’appel, que « la SGBCI a opéré de façon unilatérale et irrégulière le transfert du compte de l’entreprise GESA de KOFFI ASSE à BROU KOUASSI Firmin », cette affirmation ne tenant aucun compte de l’extrait du registre de commerce n°95/66 du registre analytique n°4555 de l’année 1995 modifié par la Section du Tribunal de Toumodi, délivré à Monsieur BROU KOUASSI Firmin et qui désignait expressément ce dernier comme étant le propriétaire de l’entreprise GESA ; qu’il est constant en droit qu’une entreprise individuelle n’a pas de personnalité juridique distincte de celle de la personne physique qui l’exploite et à qui elle ne sert que de dénomination commerciale ; qu’à l’égard des tiers, la preuve de l’identité de la personne propriétaire de l’entreprise individuelle résulte des mentions du registre de commerce ; que c’est au vu de l’extrait dudit registre établissant que l’entreprise GESA est la propriété de Monsieur BROU KOUASSI Firmin que la SGBCI a procédé au transfert du compte alors surtout que le comportement de Monsieur KOFFI ASSE se présentant au guichet de la banque avec des chèques tirés des chéquiers de GESA et signés par Monsieur BROU KOUASSI Firmin, corroborait parfaitement les mentions du registre de commerce ; que dans ces conditions, aucune irrégularité ne saurait être reprochée à la SGBCI ; qu’en considérant donc qu’elle aurait opéré un transfert irrégulier sans dire en quoi consistait cette irrégularité, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision, laquelle est insuffisamment motivée et a dénaturé les documents de la cause ; que, d’autre part, pour prononcer la condamnation solidaire de la SGBCI et de Monsieur BROU KOUASSI Firmin au paiement de la somme de 10.000.000 de francs CFA, la juridiction d’appel s’est encore bornée à affirmer qu’ « il ne peut être sérieusement contesté que la SGBCI et BROU KOUASSI Firmin ont commis des fautes ayant causé préjudice à KOFFI ASSE ; qu’il convient en conséquence d’infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de condamner solidairement la SGBCI et BROU KOUASSI Firmin à payer la somme de 10.000.000 de francs CFA à titre de dommages-intérêts à KOFFI ASSE », sans dire en quoi consistait le préjudice de Monsieur KOFFI ASSE ni comment et sur quel élément elle s’est fondée pour procéder à son évaluation alors qu’il résulte des énonciations mêmes de l’arrêt que Monsieur KOFFI ASSE sollicitait et la condamnation de la SGBCI à lui payer la somme de 35.000.000 de francs CFA à titre de dommages-intérêts, sans préciser le fondement de cette condamnation et le préjudice qu’elle devait réparer, et la condamnation ‘’supplémentaire’’ de Monsieur BROU KOUASSI Firmin et de la SGBCI, Agence de Toumodi, sous la garantie de la SGBCI, siège social à Abidjan, à lui payer la somme de 30.000.000 de francs CFA à titre de dommages-intérêts pour « accaparement illégal de l’entreprise GESA » ; qu’en prononçant une condamnation solidaire à payer 10.000.000 de francs CFA à titre de dommages-intérêts, sans autre précision, la Cour d’appel ne permet pas de savoir si cette condamnation sanctionne « l’accaparement illégal » de l’entreprise GESA, qui n’est pas le fait de la SGBCI, ou le préjudice « innommé » que Monsieur KOFFI ASSE évaluait sans davantage de précision à 35.000.000 de francs CFA ; qu’en statuant ainsi, la Cour d’appel ne donne aucune base légale à sa décision et ne permet pas à la Haute juridiction d’exercer son contrôle ; qu’il s’ensuit que de tout ce qui précède, l’arrêt déféré encourt « la cassation et l’annulation » ;
Attendu que l’article 14, alinéas 3 et 4, du Traité susvisé qui détermine la compétence de la Cour de céans en matière contentieuse dispose que « Saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des Règlements prévus au présent Traité, à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats parties dans les mêmes contentieux. » ;
Attendu en l’espèce que de l’énoncé ci-dessus de l’argumentaire accompagnant les moyens de cassation des requérants, il ressort, pour ce qui est du pourvoi de la SGBCI que celle-ci, contestant une condamnation à des dommages-intérêts solidairement prononcée par la Cour d’appel contre elle et Monsieur BROU KOUASSI Firmin, ne fait état de la violation d’aucune disposition d’un Acte uniforme ; que pour ce qui est du pourvoi de Monsieur BROU KOUASSI Firmin, s’il est vrai que celui-ci y évoque l’article 144 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général se rapportant au mandat de l’intermédiaire de commerce, c’est seulement à titre de « rappel du principe fondamental » de la liberté de preuve en matière commerciale mais sans toutefois également exposer un quelconque grief quant à l’application ou l’interprétation dudit article par la Cour d’appel ;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que les recours en cassation susénoncés ne satisfaisant pas aux conditions de compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA en matière contentieuse, telles que précisées à l’article 14 susénoncé du Traité susvisé, il y a lieu, nonobstant les arrêts de dessaisissement de la Cour Suprême de COTE D’IVOIRE qui ne lient pas la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, de se déclarer incompétent ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare incompétente et renvoie les parties litigantes devant la Cour Suprême de COTE D’IVOIRE ;
Réserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier