ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Première chambre
Audience publique du 22 février 2018
Pourvoi : n°066/2016/PC du 21/03/2016
Affaire : ACEP Cameroun SA
(Conseils : SCP DHONGTSOP & TEMGOUA, Avocats à la Cour)
Contre
KAMDJO MBOGNE Martial
Arrêt N° 036/2018 du 22 février 2018
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 22 février 2018 où étaient présents :
Madame Flora DALMEIDA MELE, Présidente, rapporteur
Messieurs Marcel SEREKOISSE SAMBA, Juge
Robert SAFARI ZIHALIRWA, Juge
et Maître Edmond Acka ASSIEHUE, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 21 mars 2016 sous le n°066/2016/PC et formé par la SCPA DHONGTSOP & TEMGOUA, Avocats à la Cour, demeurant au 4180, boulevard de la République, immeuble SOCADI, BP 12 400, Douala agissant au nom et pour le compte de ACEP Cameroun SA dont le siège social est au quartier Bastos, BP 14 614 Yaoundé, aux poursuites et diligences de son Directeur général, monsieur Jean ZOMBO, dans la cause l’opposant à monsieur KAMDJO MBOGNE Martial , en cassation de l’arrêt n°004/C rendu le 15 janvier 2016 par la Cour d’appel du Littoral à Douala et dont le dispositif est le suivant :
« PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de l’appelante, par défaut contre les intimés, en matière commerciale en second ressort, à l’unanimité des voix ;
EN LA FORME
Reçoit l’appel ;
Au Fond
Confirme le jugement entrepris ;
Condamne l’appelante aux dépens ; » ;
Attendu que la requérante invoque à l’appui de son pourvoi deux moyens de cassation, tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Madame Flora DALMEIDA MELE, Présidente ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que suivant convention d’ouverture de crédit signée le 14 octobre 2011, KAMDJO MBOGNE Martial a obtenu de ACEP Cameroun, un prêt de 2 800 000 FCFA remboursable en douze échéances à compter du 15 décembre 2011 et dont le remboursement est garanti par le nantissement de son matériel professionnel et deux cautions solidaires que sont messieurs KANDJO Pierre et KAMGA ; qu’à l’échéance du remboursement du prêt, KAMDJO MBOGNE Martial et ses cautions restaient redevables de la somme de 2 050 364 FCFA ; que face à leur inertie de payer malgré les relances à l’amiable et mises en demeure, ACEP Cameroun a obtenu du Président du Tribunal de première instance de Douala-Ndokoti, le 10 juin 2013, l’ordonnance n°072 faisant injonction à KAMDJO MBOGNE Martial et ses cautions de lui payer la somme de 2 100 364 FCFA ; que sur opposition de KAMDJO MBOGNE Martial, le Tribunal de première instance de Douala-Ndokoti a, par jugement N°028/COM /14 rendu le 13 mars 2014, retracté l’ordonnance d’injonction de payer ; que sur appel de ACEP, la Cour d’appel du Littoral à Douala a rendu, le 15 janvier 2016, l’arrêt dont pourvoi ;
Attendu que la lettre n°461/2016/4/G2 du 13 avril 2016 du Greffier en chef, adressée par courrier recommandé avec accusé de réception à KAMDJO MBOGNE Martial, défendeur au pourvoi, conformément aux articles 24 et 30 du Règlement de procédure de la Cour de céans, est demeurée sans suite ; que le principe du contradictoire ayant ainsi été respecté, il y a lieu d’examiner la cause ;
Sur le premier moyen
Vu le principe de statuer ultra petita ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir statué sur une chose non demandée en ce que pour confirmer la décision des premiers juges, l’arrêt a adopté les motifs y relatifs fondés sur la violation des articles 23 et 24 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, alors que cette demande n’a jamais été invoquée par les parties ;
Attendu qu’en se fondant sur les motifs des premiers juges pour confirmer le jugement attaqué, lequel, sur la base des articles 23 et 24 de l’Acte uniforme précité, a retenu que les cautions n’ayant pas été informées de la défaillance de KAMDJO MBOGNE Martial qui n’a pas honoré ses engagements, l’ordonnance d’injonction de payer doit être rétractée, alors même qu’il ressort de l’exploit par lequel KAMDJO MBOGNE Martial a formé son opposition que cette demande n’a jamais été formulée et, encore moins, devant le juge d’appel, pour n’avoir pas conclu ni comparu devant celui-ci ; qu’en se déterminant comme il l’a fait, le juge d’appel s’est prononcé sur une chose non demandée, statuant ainsi ultra petita ; que son arrêt doit être cassé sans qu’il soit nécessaire d’examiner le second moyen ;
Sur l’évocation
Attendu que ACEP demande à la Cour de céans, qu’après cassation de l’arrêt attaqué, d’évoquer et statuant à nouveau, de condamner KAMDJO MBOGNE Martial à lui payer la somme totale de 2 100 364 FCFA, cause de l’ordonnance d’injonction de payer n°072 ;
Qu’elle rappelle qu’elle a octroyé un prêt d’une somme de 2 800 000 FCFA à KAMDJO MBOGNE Martial garantie par un gage et deux cautions ; qu’au terme de l’échéance de remboursement du prêt, l’emprunteur ne s’est pas acquitté de la totalité de sa dette ; qu’après maintes relances et mise en demeure tant de l’emprunteur que des cautions, ces derniers ne se sont pas exécutés ; qu’elle a sollicité et obtenu du Président du Tribunal de première instance de Douala-Ndokoti, l’ordonnance n°072 enjoignant à KAMDJO MBOGNE Martial et ses cautions de lui payer la somme de 2 100 364 FCFA ; que sur opposition de KAMDJO MBOGNE Martial, le Tribunal de première instance de Douala-Ndokoti a rendu, le 13 mars 2014, le jugement n°028/COM dont le dispositif suit : « PAR CES MOTIFS …
Reçoit KAMDJO MBOGNE Martial en son opposition comme faite dans les forme et délai de la loi ;
L’y dit fondé en partie ;
Constate la violation par la société ACEP S.A des articles 23 et 24 de l’Acte Uniforme OHADA sur le Droit des Sûretés ;
Rejette la demande de délai de grâce sollicitée par le demandeur ;
Retracte en conséquence l’ordonnance d’injonction de payer n°072 rendue le 10 juin 2013 par le Président du tribunal de Première Instance de Douala-Ndokoti ;
Condamne la société ACEP S.A Cameroun aux dépens… » ;
Qu’elle relève que KAMDJO MBOGNE Martial a simplement sollicité la conciliation des parties et l’octroi d’un délai de grâce mais n’a nullement invoqué la violation des articles 23 et 24 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés pour défaut d’information des cautions de la défaillance du débiteur principal ; que sa créance remplit les conditions d’admission à la procédure d’injonction de payer pour être certaine, liquide et exigible et d’origine contractuelle au sens des articles 1er et 2 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Attendu que pour les mêmes motifs que ceux ayant conduit à la cassation de l’arrêt attaqué, il y a lieu de dire mal fondée la demande d’opposition formée par KAMDJO MBOGNE Martial, d’infirmer le jugement n°028/COM rendu le 13 mars 2014 par le Tribunal de première instance de Douala-Ndokoti et, en conséquence, de restituer à l’ordonnance d’injonction de payer n°072 du 10 juin 2013 son plein et entier effet ;
Attendu qu’ayant succombé, KAMDJO MBOGNE Martial doit être condamné aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Casse l’arrêt attaqué ;
Evoquant et statuant sur le fond :
Infirme le jugement n°028/COM rendu le 13 mars 2014 par le Tribunal de première instance de Douala-Ndokoti ;
Restitue à l’ordonnance d’injonction de payer n°072 du 10 juin 2013 son plein et entier effet ;
Condamne KAMDJO MBOGNE Martial aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
La Présidente
Le Greffier