ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

Deuxième chambre

Audience publique du 11 janvier 2018

Pourvoi : n°106/2015/PC du 18/06/2015

Affaire : La LCB BANK, anciennement LA CONGOLAISE DE BANQUE

(Conseil : Maître Jean Prosper MABASSI, avocat à la Cour)

contre

  • RAZAKI Souhin

  (Conseil : Maître Célestin MFOUTOU, avocat à la Cour)

  • Société EWEDJE EXCHANGE-Congo

     (Conseil : Maître Alide BOUANGUI, avocate à la Cour)

Arrêt N° 002/2018 du 11 janvier 2018

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’arrêt suivant, en son audience publique du 11 janvier 2018 où étaient présents :

Messieurs :  Mamadou DEME,                              Président, rapporteur,

Victoriano OBIANG ABOGO,           Juge,

Idrissa YAYE,                                    Juge,

Birika Jean-Claude BONZI,                Juge,

Fodé KANTE,                                     Juge,

et Maître Alfred Koessy BADO,          Greffier,

Sur le recours  enregistré au greffe de cette Cour le 18 juin 2015 sous le numéro 106/2015/PC, formé par Maître Jean Prosper MABASSI, avocat à la Cour, domicilié à Brazzaville, BP 1737, agissant au nom et pour le compte de la LCB BANK, anciennement La CONGOLAISE DE BANQUE, société anonyme dont le siège est à Brazzaville, BP 2889, dans la cause qui l’oppose à la société EWEDJE EXCHANGE-CONGO, société à responsabilité limitée ayant son siège à Pointe-Noire, Zone Industrielle Foire, 103 avenue Jacques OPANGHAULT, ayant pour conseil Maître Alide BOUANGUI, avocate à la Cour à Pointe Noire, quartier Saint-Pierre, Arrondissement n°1, avenue Charles de Gaulle, immeuble Nouveau Presbytère, 3ème étage, et à RAZAKI Souhin, domicilié à Pointe Noire, Arrondissement I Emery Patrice LUMUMBA, quartier Base Aérienne, n°17 rue de la Réconciliation, ayant pour conseil Maître Célestin MFOUTOU,  avocat à la Cour, BP 4287-Pointe Noire,

en cassation de l’arrêt numéro 367 rendu le 31 mars 2015 par la Cour d’appel de Pointe Noire, dont le dispositif est le suivant :

« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort ;

En la forme :

Reçoit les appels ;

Au fond :

Annule le jugement du 26 novembre 2013 ;

Evoquant et statuant à nouveau :

Dit que le Tribunal de Commerce est incompétent en matière de saisie immobilière ;

Par voie de conséquence :

Prononce l’annulation de la saisie pratiquée et ordonne la mainlevée ;

Remet la cause et les parties en l’état où elles étaient avant la saisie ;

Renvoie les parties à mieux se pourvoir ;

Condamne la Congolaise des Banques aux dépens » ;

La demanderesse invoque à l’appui de son pourvoi les quatre moyens de cassation tels qu’ils figurent à sa requête annexée au présent arrêt ;

Sur le rapport de Monsieur Mamadou DEME, Premier Vice-Président ;

Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que la LCB BANK, qui excipe d’une créance de 479.807.988 francs à l’encontre de la société EWEDJE EXCHANGE CONGO, pour laquelle son directeur général, RAZAKI Souhin, s’est porté caution solidaire et donné en hypothèque des immeubles lui appartenant, a fait procéder à une saisie immobilière sur lesdits immeubles, suivant exploit 17 juin 2013 ; que par jugement n°506 rendu à l’audience éventuelle tenue le 6 novembre 2013, les parties ont été renvoyées à l’audience d’adjudication fixée au 23 novembre 2013, puis au 28 décembre 2013, date  à laquelle les immeubles ont été adjugés au saisissant ; Que statuant sur l’appel formé par la société EWEDJE EXCHANGE CONGO contre le jugement n°506 du 6 novembre 2013 précité, la Cour d’appel de Pointe-Noire a rendu l’arrêt infirmatif frappé du pourvoi ;

Sur la recevabilité du pourvoi

Attendu que par écritures reçues le 14 avril 2016, le conseil de RAZAKI SOUHIN soulève l’irrecevabilité du pourvoi, aux motifs que le mandat spécial de représentation dont se prévaut Maître Jean Prosper MABASSI est nul ;

Qu’il fait valoir que ledit mandat a été délivré par une personne non habilitée, puisque signé par Rachid RAÏSSI, se disant directeur général adjoint de la LCB BANK, alors qu’il résulte de l’extrait du Registre du Commerce en date du 02 juin 2015 produit au dossier par la LCB elle-même, que selon la transcription modificative du 18 septembre 2014, la fonction de directeur général adjoint de cette banque a été confiée à Manuel ANDRE pour un mandat de 2 ans à compter du 29 janvier 2014, et qu’aucune publications ultérieure transcrite au Registre n’indique la désignation ultérieure de Rachid RAÏSSI  aux fonctions de directeur général adjoint ; que le mandat serait également nul pour n’avoir pas été enregistré conformément aux prescriptions de l’article 1328 du code civil ;

Attendu cependant que la LCB produit aux débats un extrait du Registre du Commerce qui lui a été délivré par le 22 juin 2017 par le Greffier en chef du Tribunal de Commerce de Brazzaville, non contesté, et mentionnant une inscription modificative faite le 21 août 2015, soit postérieurement à celle invoquée par le défendeur, établissant la nomination de Rachid RAÏSSI en qualité de directeur général-adjoint, pour une durée de deux ans, à compter du 1er janvier 2014 ; que l’enregistrement d’un acte sous-seing privé ayant pour seul objet de lui conférer une date certaine, l’omission de cette formalité ne peut à elle-seule entraîner sa nullité ;

Que l’exception étant mal fondée, il convient de la rejeter ;

Sur le premier moyen

Attendu qu’il est reproché à la Cour d’appel d’avoir violé l’article 49 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution (AUPSRVE), en ce qu’elle a déclaré recevables en la forme les appels formés par la société EWEDJE EXCHANGE Congo et RAZAKI Souhin, sur le fondement des articles 67 et 72 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière de la République du Congo, alors que ces dispositions sont inapplicables en matière de saisie immobilière ;

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 300 de l’AUPSRVE que « Les décisions judiciaires rendues en matière de saisie immobilière ne sont pas susceptibles d’opposition.

Elles ne peuvent être frappées d’appel que lorsqu’elles statuent sur le principe même de la créance ou sur des moyens de fond tirés de l’incapacité d’une des parties, de la propriété, de l’insaisissabilité ou de l’inaliénabilité des biens saisis.

Les décisions de la juridiction d’appel ne sont pas susceptibles d’opposition.
Les voies de recours sont exercées dans les conditions de droit commun. » ;

Attendu que l’article 49 de l’AUPSRVE auquel renvoient ces dispositions pour la détermination des conditions de l’appel, fixe le délai de celui-ci à 15 jours à compter du prononcé du jugement ; que le jugement attaqué ayant été rendu le 6 novembre 2013, c’est en violation de ce texte, seul applicable, que la Cour d’appel a déclaré l’appel de société EWEDJE EXCHANGE-CONGO, formalisé au greffe du tribunal de commerce de Pointe-Noire le 02 décembre 2013, recevable en la forme ;

Qu’il échet de casser l’arrêt et d’évoquer ;

Sur l’évocation

Attendu que par acte du 02 décembre 2013, la société EDWEDJE EXCHANGE a formé appel contre le jugement n°506 rendu 6 novembre 2013 ; que RAZAKI Souhin a formé appel incident contre le même jugement ;

Que pour les mêmes motifs que ceux qui ont conduit à la cassation, il y a lieu de déclarer ces appels irrecevables ;

Attendu que la société EDWEDJE EXCHANGE et RAZAKI Souhin qui ont succombé doivent être condamnés aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;

Casse l’arrêt numéro 367 rendu le 31 mars 2015 par la Cour d’appel de Pointe Noire ;

Evoquant et statuant sur le fond,

Déclare les appels de la société EDWEDJE EXCHANGE et RAZAKI Souhin irrecevables ;

Condamne la société EDWEDJE EXCHANGE Congo et RAZAKI Souhin aux entiers dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :

Le Président

Le Greffier