ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

 

Deuxième chambre

Audience Publique du 26 janvier 2017

 

Pourvois : n° 145/2015/PC du 24/08/2015

                 n° 155/2015/PC du 03/09/2015     

Affaire : 1) – Société GETMA Togo SA

                   –  Société MANUPORT Togo SA

                            (Conseil : Maître Wle-Mbanewar BATAKA, Avocat à la Cour)

 

                                     Contre

 

                 Etablissements Comptoir International pour le Commerce (CIC)

                         (Conseils : Maître LARE TOKOU et LATEVI Abram, Avocats à la Cour)

 

 

Affaire : 2) KPOKPOYA Akouété

                         (Conseils : Maître LARE TOKOU et LATEVI Abram, Avocats à la Cour)

 

      Contre

 

               – Société GETMA Togo SA

                – Société MANUPORT Togo SA

                  (Conseil : Maître Wle-Mbanewar BATAKA, Avocat à la Cour)

               – Groupe NECOTRANS    

                       

                       

Arrêt N° 008/2017 du 26 janvier 2017

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 26 janvier 2017 où étaient présents :

 

 

Messieurs Abdoulaye Issoufi TOURE,                                    Président, Rapporteur

Namuano Francisco DIAS GOMES,                                        Juge,

Djimasna N’DONINGAR,                                                    Juge,

et Maître Jean Bosco MONBLE,                                           Greffier,

 

Sur les pourvois enregistrés au greffe de la Cour de céans sous les n° 145/2015/PC du 24/08/2015 et 155/2015/PC du 03/09/2015 et formés respectivement par Maître Wle-Mbanewar BATAKA, Avocat au Barreau demeurant, Boulevard Jean-Paul, Immeuble 2456, à Lomé-Togo, agissant pour le compte de la Société GETMA Togo SA, ayant son siège , Route A3, Akodessewa BP 13 755 Lomé-Togo, et la Société MANUPORT Togo SA, ayant son siège social à Lomé, en zone Portuaire, Route A3, Accès Nord Akodessewa, BP 13755 d’une part ; et d’autre part par Maître LARE TOKOU, Avocat à la Cour, demeurant à Lomé, Quartier Nukafu, Immeuble ancienne Maison du Journalisme, angle Rue Akladjenoug et Rue Gati, 14 BP 48 et LATEVI Abram, Avocat à la Cour, demeurant à Lomé, 219, Rue Sahoude (Doulassane Amoulive) BP 61 361 Lomé-Togo, tous deux agissant au nom et pour le compte de Monsieur KPOKPOYA Akoété Cosmas, représentant les héritiers de feu DOSSOUVI Comlanvi, ex-promoteur des Etablissements Comptoir International pour le Commerce dites CIC, dans la cause les opposants les uns aux autres et au Groupe NECOTRANS ; en cassation de l’arrêt n°356 rendu le 24 décembre 2014 par la Cour d’appel de Lomé et dont le dispositif est le suivant :

« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en appel ;

 

En forme :

Déclare recevables les héritiers de feu Dossouvi Colamvi, promoteur des Etablissements CIC représentés par le sieur KPOKPOYA Cosmas Akoueté en leur appel ;

Déclare également recevable l’intervention forcée des Sociétés NECOTRANS et MANUPORT ;

Déclare irrecevables dame DAKE Akossiwa Monique, veuve AGBELY Beauty, EHO Koffi Félix, dame KPESSE Mawounyo Jeanne, AKELE Tchamouiza Biva et dame ADJAKPA Enyovi en leur intervention volontaire pour défaut d’intérêt ;

Au fond :

Déclare l’appel partiellement fondé ;

Constate que l’intimée, la Société GETMA Togo a décliné à l’invitation de la Cour lui enjoignant de conclure au fond ;

Annule le jugement n°3583/2009 rendu le 20 novembre 2009 par le Tribunal de première instance de première classe de Lomé ;

 

Evoquant

Constate que la Société GETMA Togo reste débitrice envers les Etablissements CIC d’une obligation de restituer aux termes du jugement n°994/2000 du 28 juillet 2000 du Tribunal de première instance de Lomé confirmé par l’arrêt n°220/2000 de la Cour d’appel de céans en date du 09 octobre 2000 ;

Constate que la Société GETMA SA a violé cette obligation contrevenant ainsi aux dispositions de l’article 38 de l’Acte uniforme portant organisation des procédure simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;

Constate qu’il existe entre la Société GETMA Togo SA et les intervenantes forcées : la Société MANUPORT Togo et le Groupe NECOTRANS un lien suffisant justifiant cette intervention ;

En conséquence, condamne le Société GETMA Togo SA ensemble avec les intervenantes forcées : la Société MANUPORT Togo SA et NECOTRANS Togo SA au paiement des causes de cette saisie, ainsi qu’aux dommages et intérêts en découlant et évalués comme suit :

  • 723 483 000 F cfa représentant les causes de la saisie ;
  • 611 647335 F cfa représentant les intérêts au taux légal depuis 2000 ;
  • 350 000 000 F cfa représentant les dommages et intérêts comprenant les

pertes financières et le manque à gagner ;

Constate que la demande au titre de trouble commercial et toutes les autres

sont portées pour la première fois en cause d’appel ;

Les déclare irrecevables ; … »

 

Attendu que pour cause de connexité, il y a lieu de joindre les pourvois

n°145/2015/PC du 24 août 2015 et n°155/2015/PC du 03 septembre 2015 aux fins de l’arrêt qui met fin à l’instance ;

Attendu que les Sociétés GETMA Togo et MANUPORT Togo, requérantes du pourvoi n° 145/2015/PC du 24/08/2015 ont invoqué deux moyens de cassation, quant à Monsieur KPOKPOYA Akouété, requérant du pourvoi n°155/2015/PC du 03 septembre 2015, il a invoqué un moyen unique ;

 

Attendu que les deux requêtes sont annexées au présent arrêt ;

 

Sur le rapport de Monsieur Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier vice-président ;

 

Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

 

Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier qu’en octobre 1999, le sieur DOUSSOUVI Colamvi, promoteur des Etablissements CIC, stockait dans les magasins de la Société GETMA, 5 000 tonnes de riz importées de Genève ; que devant le refus de GETMA de libérer un reliquat de 4300 tonnes, une saisie- revendication était introduite contre elle ; que nonobstant un jugement en date du 28 juillet 2000 et un arrêt confirmatif du 09 octobre 2000, GETMA ne put représenter le riz ; qu’alors une nouvelle  procédure était engagée aux fins de réclamation du prix du riz et de dommage-intérêts ; que le jugement subséquent d’irrecevabilité sera infirmé par l’arrêt dont pourvoi ;

 

Sur le pourvoi des Sociétés GETMA Togo et MANUPORT Togo ;

Sur les deux moyens réunis tirés de la violation des articles 25 et 36 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général du 17 avril 1997 ;

 

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt déféré d’avoir étendu le nom commercial CIC aux héritiers de feu DOUSSOUVI Colamvi, alors que ce droit n’avait été reconnu au de cujus que du fait de son immatriculation au registre de commerce qui lui a conféré la quantité de commerçant ; qu’en effet l’article 25 alinéa 1 dispose que «  toute personne physique ayant la qualité de commerçant aux termes du présent Acte uniforme doit, dans le premier mois d’exploitation de son commerce, requérir du greffe de la juridiction compétente dans le ressort de laquelle ce commerce est exploité, son immatriculation au registre » et l’article 36 alinéa  2 « en cas de décès d’une personne physique immatriculée, ses ayants droit doivent dans le délai de trois mois à compter du décès, demander la radiation de l’inscription au registre ou sa modification, s’ils doivent eux-mêmes continuer son exploitation » et l’alinéa 3 « à défaut de demande de radiation dans le délai visé… le greffe procède à la radiation après décision de la juridiction compétente … » ; que les héritiers ne s’étant pas conformés aux dispositions impératives susmentionnées, la Cour d’appel devait déclarer le sieur KPOKPOYA Akoueté irrecevable en ses prétentions de représenter les Etablissements CIC ; que pour avoir déclaré « recevables les héritiers de feu DOUSSOUVI Comlavi, promoteur des Etablissements CIC représentés par le sieur KPOKPOYA Akouaté Cosmas en leur appel », le juge d’appel a exposé son arrêt à la cassation ;

 

Mais attendu que contrairement aux allégations des moyens, l’immatriculation qui est une simple mesure de publicité, ne confère pas la qualité de commerçant mais s’applique à une personne l’ayant déjà, de même la radiation laisse subsister certains éléments du fonds de commerce parmi lesquels le nom commercial, avec son actif et son passif ; qu’en l’occurrence le décès du promoteur a pour effet de transférer les Etablissements CIC dans le patrimoine des héritiers qui à leur tour peuvent se faire représenter en justice, s’agissant d’une action transmissible à cause de mort ; qu’il y a donc lieu de déclarer les moyens mal fondés et les rejeter ;

 

 

Sur le pourvoi de Monsieur KPOKPOYA Akouété ;

Sur le moyen unique tiré de l’insuffisance et de la contrariété de motifs ;

 

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt querellé d’avoir fixé les dommages-intérêts à 350 000 000 F cfa en excipant du défaut de preuve pour le surplus, alors qu’au même moment il reconnaît « qu’il est indiscutable que le comportement de la Société GETMA a causé d’énormes préjudices à l’appelant qui, pendant plusieurs années, a été empêché de rentrer dans ses droits ; que ce comportement est même à l’origine de la disparition des Etablissements CIC ; » ; que contrairement à l’adoption de l’arrêt attaqué, les demandeurs avaient expliqué et justifié dans leur requête d’appel le montant des dommages qu’ils ont  subis et continuent de subir du fait des agissements illégaux de la Société GETMA Togo ; qu’aux termes de l’article 1149 «  les dommages-intérêts dus au créancier sont en général de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé … » ; que les pertes subies et le manque à gagner ont été calculés et évalués à la somme de 7 329 720 000 F cfa ;

 

Mais attendu que contrairement aux énonciations du moyen on ne relève ni contrariété, ni insuffisance de motifs ; qu’en tout état de cause s’agissant de dommages-intérêts pour inexécution, les montants ont été souvairement fixés par le juge du fond ; que ce moyen doit être écarté ;

Attendu qu’il echet de rejeter les deux pourvois de même que la demande tendant à une procédure orale ;

Attendu qu’il echet de dire que les dépens seront supportés pour moitié par chacune des requérantes ;

 

PAR CES MOTIFS

 

Statuant publiquement, après en avoir délibéré,

Ordonne la jonction des pourvois n°145/2015 et °155/2015 ;

Dit qu’il n’y a pas lieu à procédure orale ;

Rejette les deux pourvois ;

Condamne les parties requérantes aux dépens chacune pour moitié.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :

 

 

 

 

 Le Président

Le Greffier