ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Troisième chambre
Audience publique du 30 mars 2017
Pourvoi : n° 040/2015/PC du 12/03/2015
Affaire : Société Bank Of Africa Côte d’Ivoire (BOA-CI)
(Conseil : Maître Mohamed Lamine FAYE, avocat à la Cour)
contre
Société Torréfaction Ivoirienne de Café (TORICAF-SA)
(Conseil : Maitre KAMIL Tarek, avocat à la Cour)
ARRET N° 076/2017 du 30 mars 2017
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 30 mars 2017 où étaient présents :
Messieurs Mamadou DEME, Président
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge
Idrissa YAYE, Juge, rapporteur
Birika Jean Claude BONZI, Juge
Fodé KANTE, Juge
et Maître Alfred Koessy BADO, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 12 mars 2015 sous le n°040/2015/PC et formé par maître Mohamed Lamine FAYE, avocat à la Cour, dont l’étude est sise à Abidjan-Plateau, avenue du Général de Gaulle, immeuble « Résidence du Front Lagunaire », escalier A, 2ème étage, 01 BP 265 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de la société Bank Of Africa Côte d’Ivoire, en abrégé BOA-CI, ayant son siège social à Abidjan-Plateau, angle avenue Terrason de Fougères et rue Gourgas, 01 BP 4132 Abidjan 01, représentée par monsieur KHALID LYOUBI, son directeur général par intérim, demeurant ès-qualité au siège social de ladite société, dans la cause l’opposant à la société Torréfaction Ivoirienne de Café, en abrégé TORICAF, dont le siège social est sis à Abidjan, quartier VRIDI, zone industrielle, rue du textile, 15 BP1134 Abidjan 15, représentée par son président directeur général monsieur KHALIL Rami, ayant pour conseil maître KAMIL Tarek, avocat à la cour, demeurant à Macory-Résidentiel, immeuble SIB, 2ème escalier, 3ème étage, porte de droite, 05 BP 1404 Abidjan 05, en cassation de l’arrêt n° 497 rendu le 25 juillet 2014 par la cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort ;
En la forme :
Déclare la Société TORREFACTION IVOIRIENNE DE CAFE dite TORICAF recevable en son appel relevé du jugement numéro RG 101 rendu le 13 Mars 2014 par le Tribunal de Commerce d’Abidjan ;
Au fond :
L’y dit bien fondée ;
Infirme le jugement querellé en ce qu’il a débouté la Société TORICAF de son action en annulation des actes de cautionnement hypothécaire et en mainlevée d’hypothèque ;
Statuant à nouveau sur ce point ;
Dit et juge que les actes de cautionnement hypothécaire souscrits par le Président Directeur Général sans l’autorisation préalable donnée par le Conseil d’Administration sont nuls et de nul effet ;
Ordonne en conséquence la mainlevée des hypothèques prises par la BOA-CI le 05 Mars 2010 sur l’ensemble des biens et droits immobiliers de la Société TORICAF SA ;
Ordonne à Monsieur le Conservateur de la Propriété Foncière et des Hypothèques de radier lesdites hypothèques ;
Condamner la Société BOA-CI aux entiers dépens. » ;
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi le moyen unique de cassation, articulé en deux branches, tel qu’il figure à sa requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de monsieur Idrissa YAYE, Juge ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure qu’entre 2002 et 2006, par actes notariés, la BOA-CI et la société PRONIBEX-CI SARL, représentées par leurs représentants légaux, concluaient plusieurs conventions de financement à la garantie de l’exécution desquelles la société TORICAF-SA, représentée par son président directeur général monsieur KHALIL Rami, également gérant de la société PRONIBEX-CI, se constituait caution hypothécaire par l’affectation en hypothèque de premier rang, d’un immeuble sis à Abidjan, zone industrielle de VRIDI, rue du textile, formant le lot numéro 416B, d’une superficie totale de 15.788 m2 ; que par jugement civil n° 176 du 14 février 2013, la société PRONIBEX-CI SARL a été admise à la liquidation ; que pour recouvrer le montant de sa créance la BOA-CI avait fait servir le 22 novembre 2013 un commandement aux fins de saisie immobilière à la société TORICAF-SA, pour un montant de 4.476.800.000 FCFA représentant son engagement au titre de caution hypothécaire de la société PRONIBEX-CI SARL ; que la société TORICAF-SA, contestant les actes de cautionnement produits par la BOA-CI, assignait en annulation de cautionnement la BOA-CI devant le tribunal de commerce d’Abidjan ; que par jugement RG n°101 du 13 mars 2013, ledit tribunal déboutait cette demande ; que sur appel de la société TORICAF-SA, la cour d’appel d’Abidjan rendait l’arrêt infirmatif n° 497 du 25 juillet 2014, objet du présent pourvoi en cassation ;
Sur le moyen unique du pourvoi pris en ces deux branches réunies
Attendu que la BOA-CI fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi par une fausse interprétation de l’article 449 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, d’une part, au regard des dispositions de l’article 465 dudit Acte uniforme, motif pris de ce que, ladite cour d’appel, a assimilé les sûretés consenties par la société TORICAF, par affectation de droits réels immobiliers, à des cautionnements en violation de l’article 449, en déniant au président directeur général d’une société anonyme le pouvoir de direction générale de la société et de représentation de celle-ci dans ses rapports avec les tiers en violation de l’article 465 de l’Acte uniforme précité ; que d’autre part, la BOA-CI allègue, la violation de l’article 449 susvisé, compte tenu des articles 2 à 38 et 117 à 131 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, motif pris de ce que le juge d’appel s’est limité à une analyse littérale et inappropriée de l’article 449, sans se référer aux dispositions pertinentes de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés qui distingue deux catégories de sûretés à savoir les sûretés personnelles et les sûretés réelles, sauf à rajouter à la loi, cette catégorie de sûretés, dont relève l’affectation hypothécaire d’un bien immeuble, tel qu’en l’espèce, n’est nullement visée par la disposition de l’article 449 précité exigeant l’autorisation préalable du conseil d’administration de la société et conclut à la cassation de l’arrêt entrepris de ce chef ;
Mais attendu, d’une part, qu’aux termes de l’article 12, alinéa 1er de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés du 17 avril 1997, « La caution peut garantir son engagement en consentant une sûreté réelle sur un ou plusieurs de ses biens. » ;
Attendu, en l’espèce, que la société TORICAF-SA n’est intervenue dans la conclusion des conventions de financement dont l’exécution est poursuivie qu’en qualité de caution, en cantonnant sa garantie à l’affectation en hypothèque de premier rang de son immeuble sis à VRIDI et objet du titre foncier n°416B ; qu’ainsi, ne viole en rien la loi la cour d’appel qui, faisant application dudit article 12 de l’Acte uniforme suscité, a qualifié lesdits actes de cautionnement ;
Attendu, d’autre part, qu’aux termes des dispositions impératives de l’article 449, alinéa 1er de l’Acte uniforme précité, « Les cautions, avals, garanties et garanties à première demande souscrits par la société pour des engagements pris par des tiers font l’objet d’une autorisation préalable du conseil d’administration. » ; qu’en l’espèce, il n’est pas contesté que les actes de cautionnement litigieux n’ont été signés que par le président directeur général sans l’autorisation du conseil d’administration ; qu’il s’ensuit que la cour d’appel d’Abidjan a fait une saine application de l’article 449 de l’Acte uniforme suscité en annulant lesdits actes qui n’ont pas été autorisés par le conseil d’administration et n’a en rien commis la violation alléguée des articles 465 de l’Acte uniforme précité et des articles 2 à 38 et 117 à 131 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés ; qu’il échet en conséquence de déclarer le moyen non fondé et de le rejeter ;
Attendu que la société BOA-CI, ayant ainsi succombé, doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement après en avoir délibéré ;
Déclare recevable le pourvoi introduit par la société BOA-CI, en la forme ;
Au fond, le rejette comme non fondé ;
La condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier