ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

 

Première chambre

Audience publique du 29 mars 2018

Pourvoi : N°142/2014/PC du 13/08/2014

Affaire : Monsieur MIAN Gaston

      (Conseils : SCPA TOURE & PONGATHIE, Avocats à la Cour)                                                                

Contre

                Société SOFI (SOFICI-FINANCES)

                        (Conseils : Maître SARRASSORO et Associés, Avocats à la Cour)                  

Arrêt N° 066/2018 du 29 mars 2018

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 29 mars 2018 où étaient présents :

 

Madame Flora DALMEIDA MELE,                                            Présidente

Messieurs Marcel SEREKOISSE SAMBA,                                    Juge

Robert SAFARI ZIHALIRWA,                                                Juge, rapporteur

et Maître Edmond Acka ASSIEHUE,                                        Greffier ;

 

Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans, de l’affaire MIAN Gaston contre la société SOFI (SOFICI-FINANCES) S.A, par Arrêt du 8 mai 2014 de la Cour suprême de Côte d’Ivoire, chambre judiciaire, saisie d’un pourvoi initié le 08 avril 2013 par la SCPA Touré & Pongathié, Avocats à la Cour, demeurant à Cocody Saint-Jean, rue des jasmins, Sicogi, immeuble grande ourse, escalier L, 1er étage porte 501 , Abidjan, Côte d’Ivoire, agissant au nom et pour le compte de monsieur MIAN Gaston, renvoi enregistré sous le n°142/2014/PC du 13 août 2014, en cassation de l’arrêt n°1282 rendu le 18/12/2012 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :

« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort ;

Reçoit la Société SOFICI-FINANCES en son appel ;

L’y dit fondée ;

Infirme l’ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau

Dit le Juge des référés incompétent pour connaître de l’action en expulsion dirigée contre elle par monsieur MIAN GASTON ;

Condamne monsieur MIAN GASTON aux dépens. » ;

Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à l’exploit de pourvoi en cassation annexée au présent arrêt ;

Sur le rapport de Monsieur le Juge Robert SAFARI ZIHALIRWA ;

Vu les dispositions de articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune  de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que monsieur MIAN GASTON était lié à la société SOFI (SOFICI-FINANCES) par un bail à usage professionnel ; que le 11 juin 2012, monsieur MIAN Gaston faisait servir à la société SOFI (SOFICI-FINANCES) une mise en demeure par laquelle il réclamait à cette dernière des loyers impayés d’un montant de 1 800 000 FCFA ; que la société SOFI répondait que conformément à leur clause non écrite, les loyers mensuels réclamés devaient recevoir compensation avec le coût des travaux de construction de l’escalier extérieur effectués par elle ; que par exploit d’huissier en date du 16 août 2012, MIAN Gaston assignait la société SOFI (SOFICI-FINANCE) par devant le juge des référés d’expulsion du Tribunal de première instance de Yopougon, à l’effet de s’entendre ordonner la résiliation du contrat de bail liant les parties, ordonner l’expulsion de la locataire des lieux qu’elle occupe tant de sa personne, de ses biens que de tous occupants de son chef et l’exécution provisoire de la décision à intervenir ; que par ordonnance n° 1018 du 06 mars 2012, le juge des référés ordonnait l’expulsion de la société SOFI ( SOFICI – FINANCES ) des lieux ; que sur appel de cette dernière, la Cour d’appel d’Abidjan rendait, le 18 décembre 2012, l’arrêt infirmatif n°1282 dont pourvoi ;

Sur la recevabilité du mémoire en réponse

Attendu que selon l’article 30-1-3 du Règlement de procédure de la Cour de céans « toute partie à la procédure devant la juridiction nationale peut présenter un mémoire en réponse dans un délai de trois mois à compter de la signification du recours… Les paragraphes 3, 4 et 5 de l’article 28 et l’article 29 ci-dessus sont applicables » ; que suivant le paragraphe 5 dudit Règlement, la personne morale doit produire ses statuts ou un extrait récent du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier ou toute autre preuve de son existence juridique ainsi que la preuve que le mandat donné à l’avocat a été régulièrement établi par un représentant qualifié à cet effet ;

Attendu que par lettre n°327/2017/G2 en date du 17 février 2017, monsieur le Greffier en chef de la Cour de céans a demandé à Maître TOHO Tapé, conseil de la société SOFI (SOFICI-FINANCES) de transmettre à la Cour les statuts de cette dernière ou l’extrait de son registre de commerce ou toute autre preuve de son existence juridique ; que par lettre sans numéro en date du 27 novembre 2017, reçue au greffe de la Cour le 07 décembre 2017, Maître TOHO Tapé a sollicité un délai de grâce de six mois pour produire les pièces réclamées au motif que, lors de l’exécution de l’ordonnance d’expulsion n°1018 du 06 novembre 2012, monsieur MIAN Gaston, usant de son statut d’officier supérieur de la marine, a fait condamner à la brasure, le portail d’accès aux locaux litigieux, empêchant ainsi les responsables de la société d’y accéder pour retirer les documents nécessaires à son fonctionnement ;

Attendu que la demande formulée par Maître TOHO Tapé manque de fondement légal ; que le défaut de production des statuts de la société SOFI (SOFICI-FINANCES)  ne permet pas de vérifier son existence juridique  ainsi que la régularité du mandat qu’elle a donné à ce dernier pour la représenter devant la Cour de céans ; qu’il s’ensuit que le mémoire déposé  par Maître TOHO Tapé au nom de ladite société dans ces conditions doit être déclaré irrecevable ;

Sur les premier et second moyens réunis

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué un manque de base légale résultant de l’absence, de l’insuffisance, de l’obscurité ou de la contrariété des motifs en ce que, pour infirmer l’ordonnance du juge des référés, la Cour d’appel a, par une mauvaise appréciation des faits, retenu « qu’il est constant que la société SOFICI – FINANCES a entrepris des travaux de finition des locaux et de construction d’un escalier extérieur pour lui permettre d’accéder à ses bureaux pour un coût total de 7 641 290 Francs, alors que, au regard des dispositions de l’article 105 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, il ne revenait pas au preneur d’effectuer des travaux de finition des locaux, car c’est au bailleur de livrer les locaux en bon état, et qu’en l’absence de réserve  formulée quant à l’état des locaux lors de la signature du bail, le bailleur est présumé avoir rempli cette obligation » ; que les travaux vantés n’ont pas satisfaits les dispositions des articles 106, 74 et 107 du même Acte uniforme ; qu’il est également reproché audit arrêt la violation ou le défaut d’interprétation ou d’application de la loi notamment l’article 133  de l’Acte uniforme portant sur le  droit commercial général en ce que la Cour d’appel a considéré qu’il existait une contestation sérieuse empêchant le juge des référés d’être compétent pour prononcer la résiliation du bail liant les parties et d’ordonner l’expulsion du preneur, alors, selon le moyen, qu’au sens de l’article 133 de l’Acte uniforme susvisé, la juridiction compétente pour connaître de la résiliation du bail et l’expulsion du preneur est la juridiction statuant à bref délai qui, dans l’ordonnancement juridique ivoirien, est le juge des référés conformément aux articles 221 et suivants du code de procédure civile ;

Mais attendu que s’agissant de la résiliation judiciaire du bail à usage professionnel et, le cas échéant, l’expulsion du preneur et de tout occupant de son chef, la juridiction compétente visée par l’article 133 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général s’entend de la juridiction de fond statuant à bref délai car le juge des référés n’a pas compétence pour prononcer la résiliation d’un tel bail, encore moins pour prononcer l’expulsion du preneur dudit bail ; qu’en assignant la société SOFI (SOFICI-FINANCES)  en résiliation de bail à usage professionnel et en expulsion devant le juge des référés qui s’est prononcé sur l’affaire, monsieur MIAN GASTON a saisi un juge incompétent ; qu’en tout état de cause, en retenant que le juge des référés était incompétent pour connaître de l’action dirigée contre ladite société par MIAN Gaston, la Cour d’appel a légalement justifié sa décision et n’a en rien violé les dispositions visées aux moyens ; qu’il échet, en conséquence, de rejeter le pourvoi ;

Attendu qu’ayant succombé, monsieur MIAN Gaston doit être condamné aux dépens ;

 

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, après en avoir délibéré,

Rejette le pourvoi formé par monsieur MIAN Gaston ;

Le condamne aux dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :

 

 

La Présidente

Le Greffier