ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Première Chambre
Audience publique du 04 février 2010
Pourvoi : n° 004/2006/PC du 09 février 2006
Affaire : Clinique Pédiatrique « Fondation Jean François ONDO »
(Conseil : Maître MENGUE MVOLO, Avocat à la Cour)
contre
Assureurs Conseils Gabonais dits ACG-ASCOMA
(Conseil : Maître MOUBEYI-BOUALE, Avocat à la Cour)
ARRET N°006/2010 du 04 février 2010
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A), Première chambre, de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 04 février 2010 où étaient présents :
Messieurs Jacques M’BOSSO, Président, rapporteur
Maïnassara MAIDAGI, Juge
Biquezil NAMBAK, Juge
et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n°004/2006/PC du 09 février 2006 et formé par Maître MENGUE MVOLO, Avocat au Barreau du Gabon, demeurant Immeuble AURORE, 1er étage gauche, BP. 5141 Libreville (Gabon) agissant au nom et pour le compte de la Clinique pédiatrique « Fondation Jean François ONDO », sise à Libreville BP. 2717, représentée par son Président Directeur Général, le professeur agrégé de pédiatrie Alain ONDO, dans la cause l’opposant à la compagnie d’assurance Assureurs Conseils Gabonais dits ACG– ASCOMA SA sis à Libreville, BP. 2138, ayant pour Conseil Maître MOUBEYI – BOUALE, Avocat au Barreau du Gabon, demeurant 1229, Avenue Léon MBA, B.P. 9428 Libreville,en cassation de l’Arrêt n°148/04-05 rendu le 28 juillet 2005 par la Cour d’appel judiciaire de Libreville, 2ème chambre civile dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de l’appelant et par réputé contradictoire à l’égard de l’intimé, en matière de référé et en dernier ressort ;
En la forme :
Reçoit les ACG en leur appel ;
Au fond :
Vu les articles 16, 34, 172 de l’Acte uniforme, infirme l’ordonnance du 21 décembre 2004 ;
Statuant à nouveau
-Constate que la décision du 14 août 2004 n’a pas un caractère de titre exécutoire ;
-Déclare nulle la saisie-attribution de créance pratiquée sur les avoirs des ACG par la Fondation Jean François ONDO ;
-En conséquence, ordonne mainlevée de ladite saisie ainsi que la restitution aux ACG de la somme de 30.519.000 F CFA réglée entre les mains de la Fondation Jean François ONDO ;
-Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision ;
-Rejette la demande d’astreinte sollicitée par les ACG ;
-Condamne la Fondation Jean François ONDO aux dépens.» ;
La requérante invoque au soutien de son pourvoi le moyen unique de cassation tel qu’il figure à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Jacques M’BOSSO, Président ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier de la procédure qu’à la suite du non paiement par Assureurs Conseils Gabonais dits ACG-ASCOMA de plusieurs factures des soins qu’elle avait dispensés à des assurés, la Clinique pédiatrique « Fondation Jean François ONDO » avait sollicité et obtenu de la juridiction présidentielle du Tribunal de première instance de Libreville le 19 novembre 2003, une ordonnance d’injonction de payer condamnant ladite compagnie d’assurance à lui payer la somme de vingt cinq millions (25.000.000) de francs CFA en principal et intérêts ; que sur opposition des ACG-ASCOMA, le Tribunal de première instance de Libreville avait rendu le 14 août 2004 le Jugement répertoire n°449/2003-2004 déboutant ACG-ASCOMA de leur opposition, les condamnant au paiement de la somme de vingt sept millions cinq cent quatre vingt dix mille (27.590.000) F CFA et ordonnant l’exécution provisoire dudit jugement sur minute et avant enregistrement ; que le 24 septembre 2004, le jugement précité était signifié par le ministère de Maître Daniel OBIANG-EDZO, huissier de justice à Libreville aux ACG-ASCOMA avec commandement de payer le montant de la condamnation et les frais accessoires soit la somme de trente millions quatre cent quatre vingt quatorze mille (30.494.000) F CFA ; que le 29 septembre 2004, une saisie attribution de créances était pratiquée au préjudice du débiteur et dénoncée le lendemain 30 septembre 2004 ; que suite au rejet par ordonnance du 21 décembre 2004 de la contestation de saisie-attribution élevée par le débiteur saisi, le tiers saisi avait libéré entre les mains de l’huissier instrumentaire la somme de trente et un millions quatre vingt neuf mille (31.089.000) F CFA ; qu’enfin, sur appel interjeté par ACG-ASCOMA, débiteur saisi, contre l’Ordonnance de référé du 21 décembre 2004, la Cour d’appel judiciaire de Libreville, 2ème chambre civile, avait rendu le 28 juillet 2005 l’Arrêt répertoire n°148/04-05 dont pourvoi ;
Sur la recevabilité du pourvoi
Vu les articles 28.1 du Règlement de procédure de la CCJA de l’OHADA et 1er de la Décision n°002/99/CCJA du 04 février 1999 augmentant les délais de procédure en raison de la distance ;
Attendu que les Assureurs Conseils Gabonais (Groupe ASCOMA) ont soulevé in limine litis dans leur mémoire responsif enregistré au greffe de la Cour de céans le 30 avril 2007 l’exception d’irrecevabilité du pourvoi formé par la Clinique pédiatrique « Fondation Jean François ONDO » pour tardiveté ; qu’ils soutiennent que l’arrêt attaqué ayant été signifié le 06 décembre 2005, le recours en cassation dudit arrêt formé le 09 février 2006 l’a été au-delà du délai légal de deux mois prévu par l’article 28 du Règlement de procédure de la Cour de céans et doit être déclaré irrecevable ;
Mais attendu qu’aux termes respectifs de l’article 28.1 du Règlement de procédure et 1er de la Décision n°002/99/CCJA susvisés, « lorsque la Cour est saisie par l’une des parties à l’instance par la voie du recours en cassation prévu au troisième ou quatrième alinéa de l’article 14 du Traité, le recours est présenté au greffe dans les deux mois de la signification de la décision attaquée par l’avocat du requérant dans les conditions fixées à l’article 23 ci-dessus (…) » et « sauf si les parties ont leur résidence habituelle en Côte d’Ivoire, les délais de procédure sont augmentés en raison de la distance comme suit :
-en Afrique centrale : de vingt et un jours (…) » ; que l’arrêt attaqué du 28 juillet 2005 ayant été signifié le 06 décembre 2005 au requérant dont la résidence habituelle est au Gabon en Afrique centrale et le pourvoi de celui-ci formé le 09 février 2006, il y a lieu de dire et juger que ledit pourvoi a été formé dans le délai légal conformément aux textes susénoncés ; qu’il échet de déclarer recevable ledit pourvoi ;
Sur le moyen unique de cassation
Vu l’article 33 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé, par méconnaissance, l’article 33 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution en ce qu’il a considéré, que le jugement du 14 août 2004 n’a pas un caractère de titre exécutoire alors que, selon le moyen, aux termes de l’article 33.1) de l’Acte uniforme précité « constituent des titres exécutoires :
1) Les décisions juridictionnelles revêtues de la formule exécutoire et celles qui sont exécutoires sur minute ; » ; que ledit arrêt encourt cassation de ce chef ;
Attendu, en l’espèce, que le dispositif du Jugement répertoire n°449/2003-2004 rendu le 14 août 2004 par le Tribunal de première instance de Libreville est ainsi conçu :
« Statuant publiquement par réputé contradictoire à l’égard du défendeur ;
Déclare recevable en la forme l’opposition formée par les Assureurs Conseils Gabonais ;
Au fond, l’en déboute ;
En conséquence, condamne les Assureurs Conseils Gabonais à payer à la Fondation Jean François ONDO la somme de 27.590.000 F CFA ;
Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision sur minute et avant enregistrement ;
Condamne les ACG aux dépens. » ; qu’il ressort de ce dispositif que le jugement du 14 août 2004 a été formellement déclaré exécutoire par provision sur minute et avant enregistrement ; que comme tel, il intègre bien la catégorie des titres exécutoires définie par l’article 33 de l’Acte uniforme susvisé ; qu’il suit qu’en disant dans son Arrêt attaqué que ledit jugement ne constitue pas un titre exécutoire, la Cour d’appel judiciaire de Libreville a violé le texte visé au moyen et exposé son arrêt à la cassation ; qu’il échet de casser ledit arrêt de ce chef et d’évoquer ;
Sur l’évocation
Attendu que les Assureurs Conseils Gabonais ont, à la date du 05 janvier 2005, interjeté appel de l’Ordonnance de référé, répertoire n°252/04/05 du 21 décembre 2004 dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en premier ressort :
-Vu l’article 16 et 23 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
-Disons qu’un jugement en injonction de payer, faute d’opposition dans le délai de 15 jours, frappé de formule exécutoire, produit les effets d’une décision définitive insusceptible d’appel ;
-En conséquence, disons n’y avoir lieu à mainlevée de saisie attribution de créance querellée ;
-Condamnons les Assureurs Conseils Gabonais aux dépens. » ;
Qu’ils fondent leur appel, d’une part, sur une mauvaise application des articles 16 et 23 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution par le premier juge et, d’autre part, sur le fait que le Jugement répertoire n°449/2003-2004 du 14 août 2004 du Tribunal de première instance de Libreville n’a pas le caractère d’un titre exécutoire ;
Attendu que la Clinique pédiatrique « Fondation Jean François ONDO » n’a ni comparu, ni conclu en appel ;
Attendu que pour les mêmes motifs que ceux sur le fondement desquels l’arrêt attaqué a été cassé, il échet de dire et juger que le jugement précité du 14 août 2004 est un titre exécutoire ; qu’il s’ensuit que la saisie-attribution pratiquée en vertu dudit jugement est bonne et valable et qu’il y a lieu de rejeter la demande de mainlevée de ladite saisie-attribution ;
Attendu que les Assureurs Conseils Gabonais ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare recevable le pourvoi formé par la Clinique pédiatrique « Fondation Jean François ONDO » ;
Casse l’Arrêt répertoire n°148/2004-2005 rendu le 28 juillet 2005 par la deuxième chambre civile de la Cour d’appel judiciaire de Libreville (Gabon) ;
Evoquant et statuant sur le fond,
Dit que le Jugement répertoire n°449/2003-2004 rendu le 14 août 2004 par le Tribunal de première instance de Libreville (Gabon) est un titre exécutoire ;
Rejette la demande de mainlevée formulée par les Assureurs Conseils Gabonais ;
Les condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier