ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Deuxième chambre
Audience publique du 20 décembre 2012
Pourvoi : n°005/2010/PC du 18 janvier 2010
Affaire : Banque Of Africa-Mali dite BOA-MALI S.A
(Conseil : Maître Sékou Oumar BARRY, Avocat à la Cour)
contre
LTA-MALI S.A
(Conseil : Maître Boubacar TAPO, Avocat à la Cour)
ARRET N°098/2012 du 20 décembre 2012
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Deuxième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 20 décemre 2012 où étaient présents :
Messieurs : Maïnassara MAIDAGI, Président, rapporteur
Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge
Madame : Flora DALMEIDA MELE, Juge
et Maître BADO Koessy Alfred , Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 18 janvier 2010 sous le n°005/2010/PC et formé par Maître Sékou Oumar BARRY du Cabinet CISSE- BARRY SCPA, Avocat à la Cour, demeurant à Bamako, Avenue Cheick Zayed Hamdallaye ACI 2000, Immeuble Djiré, BP E 4644 Bamako (MALI), agissant au nom et pour le compte de Bank Of Africa-Mali dite BOA-MALI S.A , société anonyme avec conseil d’administration, ayant son siège social à l’Avenue de la Marne Bozola-Bamako (MALI), représentée par son Directeur général Monsieur Mamadou SENE, dans la cause l’opposant à la société LTA-MALI, société anonyme dont le siège est à Niaréla-Sud, Rue 372, Porte 335, Bamako (MALI), représentée par son Directeur général Monsieur Jacobs DU TOIT, ayant pour Conseil Maître Boubacar TAPO du Cabinet THEMIS, Avocat à la Cour, demeurant à Bamako (MALI), Immeuble Youssouf FOFANA, ACI 2000 Hamdallaye, Avenue Cheick Zayed, rue 369, porte 175, BP E 5217,en cassation de l’Arrêt n°371 rendu le 27 novembre 2009 par la Cour d’appel de Bamako et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière de référé et en dernier ressort ;
En la forme : reçoit l’appel interjeté ;
Au fond : le déclare bien fondé ; infirme l’ordonnance entreprise et statuant de nouveau déclare la requête bien fondée et y faisant droit, ordonne à la Banque Of Africa de remettre en état le compte N°225604402-16 de LTA Mali S.A en le créditant du montant de 192.113.348 F sous astreinte de 1.000.000 F par jour de retard.
Condamne l’intimée aux dépens. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Premier Vice-Président Maïnassara MAÏDAGI ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que le 1er septembre 2009 et en exécution du Jugement n°11 rendu le 20 juillet 2009 par le tribunal du travail de Kayes, Messieurs Karim Coulibaly et dix-huit (18) autres travailleurs ont fait procéder à une saisie-attribution de créances sur un compte ouvert dans les livres de la BOA-MALI S.A. et qui est censé appartenir à leur créancière la société LTA Moolman Mining ; qu’informée de cette saisie, la société LTA-MALI S.A a réagi, d’une part, en informant la BOA-MALI de ce qu’elle était différente de la société Moolman Mining et que le compte saisi n’appartient pas à cette dernière et, d’autre part, en contestant la saisie effectuée devant le président du tribunal de première instance de Kayes, lequel par Ordonnance n°55/PT-PIK en date du 06 octobre 2009 rejetait la demande de mainlevée de la saisie ; que cette ordonnance était signifiée à la BOA-MALI le 07 octobre 2009 tout en lui demandant la mainvidange en application de l’article 164 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; que BOA MALI avait procédé à cette mainvidange bien que la société LTA- MALI l’informait de ce qu’ elle avait relevé appel de l’Ordonnance n°55/PT-PIK du 06 octobre 2009 ; que par Arrêt n°14 du 16 octobre 2009, la Cour d’appel de Kayes déclarait l’appel relevé par la société LTA-MALI irrecevable ; que cette dernière saisissait le juge des référés du Tribunal de commerce de Bamako d’une action de remise en état sous astreinte au motif qu’il y aurait eu, de la part de BOA-MALI SA, un paiement indu qui lui aurait causé un trouble manifeste et dont il y aurait urgence à mettre un terme ; que par Ordonnance n°149/09 du 02 novembre 2009, le Président du Tribunal de commerce de Bamako déboutait LTA-MALI S.A de sa demande ; que sur appel de cette dernière, la Cour d’appel de Bamako rendait le 27 novembre 2009 l’Arrêt infirmatif n°371 dont pourvoi ;
Sur la compétence de la Cour de céans
Vu l’article 14, alinéas 3 et 4 du Traité institutif de l’OHADA ;
Attendu que dans son mémoire en réponse, reçu au greffe de la Cour de céans le 06 mai 2010, la société LTA-MALI, défenderesse au pourvoi, soulève in limine litis l’incompétence de la Cour de céans à examiner le présent pourvoi au motif que l’arrêt infirmatif de la chambre des Référés de la Cour d’appel de Bamako déféré devant la Cour de céans par la Bank Of Africa -Mali au moyen du présent recours en cassation a statué sur l’appel relevé contre une ordonnance du Tribunal de commerce de Bamako rendu dans une instance de remise en état (pour faire cesser un trouble manifestement illicite), sur le fondement d’une disposition légale interne ; que ce pourvoi exercé dans une matière relevant du domaine du droit commun des procédures d’urgence et non de l’application des Actes uniformes de l’OHADA, en violation de l’article 615 du code de procédure civile, commerciale et sociale du Mali, devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage est, en application des articles 2 et 14 du Traité du 17 octobre 1993, irrecevable puisque la Cour de céans est manifestement incompétente pour connaître d’un tel recours qui ressortit à la compétence de la Cour suprême du MALI ;
Attendu que dans son mémoire en réplique, reçu le 30 août 2010 au greffe de la Cour de céans, BOA-MALI S.A, demanderesse au pourvoi, demande à la Cour de rejeter l’exception d’incompétence soulevée sans conviction par LTA-MALI S.A au motif que ce n’est pas l’intitulé de l’arrêt, fait à dessein par la LTA- MALI SA pour échapper à la censure de la Cour de céans, qui détermine la compétence, mais bien le contenu ou la matière sur lesquels l’arrêt a été rendu ; que tout au long des débats, les seuls textes visés sont ceux de l’OHADA, plus précisément l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; que le paiement ayant eu lieu après rejet des contestations d’une saisie-attribution, le tout en application de l’article 164 de l’Acte uniforme susindiqué, la CCJA est bien compétente ; que peu importe que LTA-MALI ait intitulé sa saisine du juge d’instance, remise en état au paiement de l’indu ; qu’il appartient à la juridiction communautaire d’apprécier les actes de la saisie, le paiement fait après rejet de contestations, les manquements ou pas de la Bank Of Africa-MALI intervenue dans la procédure à la suite du seul exploit de saisie-attribution du 1er septembre 2009 et non de deux comme tente de le faire croire LTA-MALI S.A pour en tirer une quelconque complicité de la mémorante ;
Attendu qu’aux termes de l’article 14, alinéas 3 et 4 du Traité susvisé, « saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des Règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions appliquant des sanction pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats parties dans les mêmes contentieux. » ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que depuis l’« assignation en référé devant le Tribunal de commerce de Bamako » jusqu’à l’Arrêt infirmatif n°371 du 27 novembre 2009, objet du présent pourvoi, en passant par l’Ordonnance infirmée n°149/09 du 02 novembre 2009, la présente affaire est relative à une action en remise en état pour faire cesser un trouble manifestement illicite causé par un paiement indu intentée par LTA –MALI S.A contre BOA-MALI S.A sur le fondement des articles 689, 690, 706 et suivants du code malien de procédure civile, commerciale et sociale et comme tel ne soulève pas de questions relatives à l’application de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution comme le prétend la demanderesse au pourvoi ; que l’évocation par cette dernière, pour la première fois, en cause de cassation, des dispositions dudit Acte uniforme, ne peut, à elle seule, justifier la saisine de la Cour de céans ; qu’il suit que cette dernière doit se déclarer incompétente ;
Attendu que la Bank Of Africa-Mali dite BOA-MALI S.A ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare incompétente ;
Condamne la Bank Of Africa-Mali dite BOA-MALI S.A aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier