ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)
Audience Publique du 27 juin 2002
Renvoi n° 025 / 2001 / PC du 06 novembre 2001.
Affaire : SOCIETE EL NASR Import – Export
(Conseil : Maître Agnès OUANGUI, Avocat à la Cour)
Contre
Ali DARWICHE
(Conseil : Maître Sery KOSSOUGRO E. Christophe, Avocat à la Cour)
ARRET N° 017/2002 du 27 juin 2002
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ( C.C.J.A.) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires ( O.H.A.D.A ) a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 27 juin 2002 où étaient présents :
Messieurs Seydou BA, Président
Jacques M’BOSSO, Premier Vice-président
Antoine Joachim OLIVEIRA, Second Vice-président, rapporteur
Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge
Maïnassara MAIDAGI, Juge
Boubacar DICKO, Juge
et Maître Pascal Edouard NGANGA, Greffier en chef ;
Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans, de l’affaire Société EL NASR IMPORT-EXPORT contre Ali DARWICHE, par Arrêt n° 449/01 du 05 juillet 2001 de la Cour Suprême de COTE D’IVOIRE, Chambre Judiciaire, Formation civile, saisie d’un pourvoi initié le 08 mai 2001 par Maître Agnès OUANGUI, Avocat à la Cour, demeurant 24, boulevard CLOZEL, immeuble SIPIM, 5ème étage, 01 BP. 1306 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de la Société EL NASR IMPORT-EXPORT, enregistré sous le numéro 01-173 CIV du 08 mai 2001 contre l’Arrêt n° 425 rendu le 20 avril 2001 par la Cour d’appel d’Abidjan au profit de Ali DARWICHE, et dont le dispositif est le suivant :
« En la forme :
- Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort ;
- Reçoit la Société EL NASR IMPORT-EXPORT en son appel relevé du jugement civil n° 591 du 17 juillet 2000, rendu par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan ;
Au fond :
- Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;
- Condamne l’appelante aux dépens ; »
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Antoine Joachim OLIVEIRA, Second Vice-Président ;
Vu les articles 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure qu’au cours de la campagne agricole 1997-1998, Ali DARWICHE a livré à la Société EL NASR IMPORT-EXPORT, à raison de 558 francs le kilogramme, du café pour un poids net de 2.486.782 kgs ; qu’Ali DARWICHE affirme que sur le poids net sus-indiqué, ladite Société a défalqué 179.228 kgs constitués, selon elle, par des déchets qui ne lui ont été ni restitués, ni payés ; que le Président du Tribunal de Première Instance d’Abidjan saisi par Ali DARWICHE d’une requête aux fins d’injonction de payer a, par Ordonnance n° 6626/99 du 10 novembre 1999, condamné la Société EL NASR IMPORT – EXPORT à lui payer soixante douze millions cent neuf mille deux cent vingt huit (72.109.228) francs CFA correspondant au prix de 129.228 kgs, lesquels représentent la différence entre les 179.228 kgs et les 50.000 kgs ayant fait l’objet de paiement antérieur par ladite Société ; que par Jugement n° 591 du 17 juillet 2000, le Tribunal de Première Instance d’Abidjan, saisi sur opposition de la Société EL NASR IMPORT-EXPORT contre l’ordonnance précitée, a restitué à celle-ci son plein et entier effet ; que la Cour d’appel d’Abidjan, saisie d’un appel introduit par la Société contre le jugement susmentionné, a confirmé celui-ci par l’Arrêt n° 425 du 20 avril 2001 dont pourvoi ;
Sur le premier moyen
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir considéré « qu’hormis les simples dénégations, la Société EL NASR, ne verse aux débats aucune pièce de nature à justifier le paiement intégral du prix des produits agricoles à elle livrés par Ali DARWICHE ; or, il est inadmissible qu’après avoir repéré des marchandises qu’elle juge de mauvaise qualité, l’appelante, sans l’accord du livreur, refuse de les restituer ou de s’acquitter de leur prix… », alors, selon le moyen, qu’en se déterminant ainsi, sans vérifier si vraiment Ali DARWICHE a fait la preuve de ce que la Société EL NASR a retenu son produit et en se fondant uniquement sur les déclarations de Ali DARWICHE, après avoir réfuté celles de la Société EL NASR, la Cour n’a pas donné de base légale à sa décision ;
Mais attendu qu’il est constant comme résultant des pièces du dossier de la procédure que Ali DARWICHE a livré à la Société EL NASR IMPORT-EXPORT une quantité de café d’un poids net de 2.486.782 kgs excluant déjà les déchets comme l’attestent les bordereaux d’entrée établis par la Société EL NASR IMPORT-EXPORT elle-même ; que celle-ci a, par la suite, opéré ce qu’elle a appelé une réfaction portant sur un poids total de 179.228 kgs comme elle l’avait reconnu devant le premier juge, se contentant d’affirmer à cette occasion que ce « poids refacté » représentait des déchets à déduire du poids total des produits livrés, ce qui du reste apparaît dans l’extrait du compte fournisseur versé aux débats ; que la preuve est donc faite que la Société EL NASR IMPORT-EXPORT a retenu une partie du produit qu’elle n’a ni restituée, ni payée sauf pour une quantité de 50.000 kgs ayant fait l’objet d’un paiement ; que dès lors c’est à bon droit, qu’ayant constaté que la Société EL NASR IMPORT-EXPORT n’a versé aux débats aucune pièce de nature à justifier le paiement intégral du prix des produits, la Cour d’appel a estimé que ladite Société était encore redevable du prix de la quantité de café retenue pour cause de « réfaction » ; qu’en conséquence le premier moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen
Attendu qu’il est également reproché à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré que la créance de Ali DARWICHE « répondant après analyse aux exigences des articles 1er et 2 de l’Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, c’est à bon droit que le Tribunal a rendu cette décision qui mérite confirmation », alors, selon le moyen, qu’en se déterminant ainsi sans dire en quoi a consisté l’analyse par elle faite, et sans démontrer que la créance de Ali DARWICHE était certaine, liquide et exigible, ainsi que l’exigent les articles 1er et 2 de l’Acte uniforme sur le recouvrement des créances, la Cour d’appel a violé les articles ci-dessus visés et son arrêt mérite de ce chef cassation ;
Mais attendu que la Cour d’appel a retenu, au vu des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la créance litigieuse représentait, à raison de 558 francs le kilogramme, le prix de 129.228 kgs des déchets défalqués par la Société et non restitués à Ali DARWICHE au terme de la campagne 1997-1998, au cours de laquelle celui-ci lui avait livré le café ; qu’en déduisant de ces constatations, que la créance litigieuse répondait aux exigences des articles 1er et 2 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, la Cour d’appel n’a en rien violé lesdits articles ; d’où il suit que le moyen n’est pas davantage fondé ;
Attendu qu’en conséquence, il y a lieu de rejeter le pourvoi et de condamner la Société EL NASR IMPORT-EXPORT aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Rejette le pourvoi formé par la Société EL NASR IMPORT-EXPORT ;
Condamne la requérante aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier en chef