ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

 

Assemblée plénière

Audience Publique du 25 avril 2014

Pourvoi :  n°174/2012/ PC du 26/12/2012

Affaire :   Société Négoce Internationale (SONEI SARL)

   (Conseil : Maître YARO Zileto Daouda,  Avocat à la Cour)

 

                                     contre

 

      Société de Meunière Tunisienne SA 

 

ARRET N° 081/2014 du 25 avril 2014

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), en Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience foraine tenue le 25 avril 2014 à Porto-Novo-Bénin où étaient présents :

 

Messieurs    Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA,                     Président

Abdoulaye Issoufi TOURE,                        Premier Vice-président

Madame      Flora DALMEIDA MELE,                           Second Vice-président

Messieurs    Namuano F. DIAS GOMES,                        Juge

Victoriano OBIANG ABOGO,                     Juge

Mamadou DEME,                                    Juge

Idrissa YAYE,                                        Juge, rapporteur

Djimasna N’DONINGAR,                          Juge

 

et Maître     Paul LENDONGO,                                   Greffier en chef ;

 

Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 12 décembre 2012 sous le n°174/2012/PC et formé par Maître Yaro Zileto Daouda, Avocat à la Cour, Boulevard du Zarmaganda, BP 12418 Niamey-Niger, agissant au nom et pour le compte  de la Société Négoce Internationale, en abrégé SONEI SARL, dont le siège social est BP 1002 Niamey-Niger, représenté par son Directeur Général Monsieur Eric Counta, dans la cause l’opposant à la Société Meunière Tunisienne SA  au capital de 7 500 000 Dinas,   ayant son siège social à la zone industrielle BIR KASSAA, 2013 BER AROUS, Tunisie, représentée par son Directeur Général,   en cassation de l’Ordonnance de l’Arrêt  n°26  rendu le 23 janvier 2012 par    la Cour d’appel de Niamey et dont le dispositif est le suivant :

 

« Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties et en matière Commerciale et en dernier ressort ;

  • Reçoit Eric Counta en son appel régulier en la forme,
  • Au fond ; confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

Condamne l’appelant aux dépens ; » ;

 

La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent dans sa requête annexée au présent arrêt ;

 

La Société Meunière Tunisienne SA à qui le présent recours en cassation a été signifié à l’adresse de son conseil, domicile élu dans la procédure en appel, suivant lettre n°017/2013/G2 en date du 08 janvier 2013, n’a développé aucun moyen de défense, le principe du contradictoire ayant été observé, il y a lieu de passer outre et de statuer au fond ;

 

Sur le rapport de Monsieur Idrissa YAYE, Juge ;

 

Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

 

Vu le  Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage  de l’OHADA ;

 

Attendu que  dans le cadre de leur relation commerciale, la SONEI SARL, a passé deux commandes de farine de blé avec la Société Meunière Tunisienne SA ; que n’ayant pu honorer ses engagements aux échéances convenues, la SONEI SARL a saisi le Tribunal de grande instance hors classe de Niamey d’une action aux fins d’obtenir, d’une part, la prescription de la facture n°7913/2006 d’une valeur de 63.800 Euros, d’autre part, un délai de grâce d’un an pour le paiement du reliquat de 27 287  811 FCFA, le tout, outre la condamnation de la Société Meunière Tunisienne SA aux dépens, avec exécution provisoire sur minute et avant enregistrement ;  que suivant Jugement n°436 en date du 28 octobre 2008, ledit Tribunal, statuant en matière commerciale, l’a déboutée au fond de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée à payer à la Société Meunière Tunisienne les sommes de 99 819 758 FCFA en principal et frais, 1000 000 FCFA à titre de dommages et intérêts ; que sur appel de la SONEI SARL, la Cour d’appel a rendu l’Arrêt confirmatif n°26 du 23 janvier 2012, objet du présent pourvoi en cassation ;

 

Sur le premier  moyen   

 

Attendu que le demandeur  fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir   violé les dispositions de l’article 274 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général  du 17 avril 1997 ; qu’elle estime en effet, que la Société Meunière Tunisienne SA lui a vendu la farine de Blé le 05 décembre 2006, suivant facture n°7913/2006 ; qu’elle n’a exercé aucune  action tendant à la réclamation de sa créance dans le délai biennal prescrit par ledit texte et conclut à la cassation de l’arrêt entrepris de ce chef ;

Mais attendu qu’en application des dispositions de l’article 274 de l’Acte uniforme précité : « Le délai de prescription en matière de vente commerciale est de deux ans. Ce délai court à partir de la date à laquelle l’action peut être exercée. » ;

 

Attendu qu’il résulte des pièces du dossier que la facture, dont la prescription est sollicitée, est du 05 décembre 2006 ;  que pour son paiement, la SONEI SARL a remis à la Société Meunière Tunisienne SA  une lettre de change domiciliée à la BSIC dont l’échéance est le 22 février 2007 ; que le 20 janvier 2007 une sommation de payer  a été servie par la Société Meunière Tunisienne à sa débitrice ;

Attendu qu’en application de l’article 274 susvisé, le délai de prescription ne court qu’à partir du jour où l’action en paiement peut être exercée ; qu’en l’espèce, SONEI SARL ayant remis une lettre d’échange à sa créancière, celle-ci ne peut exercer son action qu’à l’échéance de ladite lettre de change ; qu’ainsi la Cour d’appel de Niamey, en considérant l’échéance de la lettre de change comme point de départ du délai de prescription,  ne viole en rien  le texte susvisé ; qu’il échet d’écarter ce moyen comme mal fondé ;

           

Sur le second  moyen  

 

Attendu que la  recourante fonde son second moyen sur la fausse application  de l’article 277 de l’Acte uniforme susvisé, estimant qu’en application dudit article, le délai de prescription cesse de courir lorsque le créancier de l’obligation a accompli tout acte qui d’après la loi nationale est considéré comme interruptif de prescription ; que contrairement à l’affirmation des juges du fond, l’article 2244 du code civil nigérien ne cite pas la sommation de payer parmi les actes interruptifs de la prescription et nulle part, il n’a été question d’échéance d’une lettre de change comme base de calcul du délai interruptif de prescription ; qu’elle conclut que la Cour d’appel, en statuant comme elle l’a fait, a fait une fausse interprétation de l’article susvisé et que sa décision encourt cassation de ce chef ;

 

Mais attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 277 dudit Acte uniforme : « Le délai de prescription cesse de courir lorsque le créancier de l’obligation accomplit tout acte qui d’après la loi de la juridiction saisie, est considéré comme interruptif de prescription. » ; que selon les dispositions de l’article 2244 du code civil nigérien, sont considérés comme interruptifs de prescription les actes ci-après : « Une citation en justice, un commandement ou une saisie, signifiés à celui qu’on veut empêcher de prescrire. » ;

 

Attendu qu’en l’espèce, la Cour d’appel de Niamey, en considérant la sommation de payer comme interruptif de la prescription, n’a en rien violé les dispositions légales sus énoncées car la sommation comme le commandement sont des actes d’huissier de justice qui poursuivent les mêmes effets à savoir enjoindre au débiteur d’une dette de payer sous peine d’être saisi ; qu’au demeurant la dette n’est ici même pas contestée ;  qu’il échet dès lors d’écarter ce second moyen et de déclarer le recours mal fondé ;

 

 

Attendu qu’ayant succombé, il y a lieu de condamner la SONEI SARL aux dépens ;

 

PAR CES MOTIFS

 

Statuant publiquement, après en avoir délibéré,

 

En la forme

 

Déclare  recevable le recours ;

 

Au fond

 

Le rejette  comme mal fondé ;

Condamne la SONEI SARL aux  dépens ;

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et  an  que dessus et ont signé :

 

 

 

Le Président

 

 

 Le Greffier en chef