ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA)

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA)

Première chambre              

Audience publique du 07 juillet 2005

Pourvoi : n° 023/2004/PC du 16 février 2004

Affaire : Société de Transport Aérien Middle East Airlines Air Liban dite       

                MEA

                             (Conseil : Maître N’GUETTA N.J. GERARD, Avocat à la Cour)

                                   Contre

                Madame KAMAGATE MANGNALE

                             (Conseil : Maître FANNY MORY, Avocat à la Cour)

Violation de l’article 8 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.

 

– La Cour d’appel ne s’étant, à aucun moment, prononcé sur le défaut d’indication des frais de greffe, d’autant que le requérant lui-même n’avait pas invoqué ce moyen dans son acte d’appel valant premières conclusions  près qu’ayant seulement soutenu que l’acte de signification « ne contient pas sommation à la requérante d’avoir  payer les intérêts de droit dont le montant aurait du être précisé » et les intérêts n’ayant pas été demandés par la défenderesse au pourvoi dans sa requête aux fins d’injonction de payer, il ne peut lui être reproché de ne les avoir pas mentionné dans l’acte de signification. En retenant « qu’en l’espèce, il faut noter que l’intimée n’a pas réclamé des intérêts dans sa requête aux fins d’injonction de payer ; que dès lors, ce défaut d’indication dans l’exploit de signification n’entache pas la validité de cet acte ; qu’en tout état de cause elle est en droit de ne demander que le principal », la cour d’appel d’Abidjan n’a en rien violé les dispositions de l’article 8 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.

 

ARRET N° 044/2005 du 07 juillet 2005

 

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A), Première chambre, de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A) a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 07 juillet 2005 où étaient présents :

 

Messieurs Jacques M’BOSSO,                       Président

Maïnassara MAIDAGI,                  Juge

Biquezil NAMBAK,                       Juge, rapporteur

et Maître KEHI Colombe BINDE, Greffier ;

 

Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique devant la Cour de céans, de l’affaire Société de Transport Aérien Middle East Airlines Air Liban dite MEA contre Madame KAMAGATE MANGNALE, par Arrêt n °618/03 du 13 novembre 2003 de la Cour Suprême de Côte d’Ivoire, Chambre Judiciaire, formation civile, saisie d’un pourvoi initié le 07 mars 2003 par Maître N’GUETTA N. J. GERARD, Avocat à la Cour, demeurant à Abidjan Plateau, 55 Bd Clozel immeuble SCI la Réserve, 16 B.P. 666 Abidjan 16, agissant au nom et pour le compte de la Société MEA, renvoi enregistré sous le n°023/2004/PC du 16 février 2004,en cassation de l’Arrêt n°45 rendu le 17 janvier 2003 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :

 

« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

 

EN LA FORME :

Déclare recevable l’appel de Société MEA ;

AU FOND : L’y dit mal fondée ;

L’en déboute ;

Confirme le jugement entrepris ;

Met les dépens à la charge » ;

 

La requérante invoque à l’appui de son pourvoi le moyen unique de cassation tel qu’il figure à l’acte de pourvoi en cassation annexé au présent arrêt ;

 

Sur le rapport de Monsieur le Juge Biquezil NAMBAK ;

 

Vu les dispositions des articles 13,14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

 

Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;

 

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que Madame KAMAGATE MANGNALE a fait embarquer de DUBAI, sur le vol ME 571 du 25 avril 1999 de la compagnie aérienne MEA, 18 colis textiles d’un poids total de 200 kg suivant la déclaration douanière par elle faite ; qu’à  l’arrivée du vol à Abidjan, deux colis n’ont pas été retrouvés ainsi que l’attestent les vérifications faites par les services d’Air Afrique qui ont finalement conclu à la perte desdits colis ; que pour avoir paiement de la valeur de ses colis qu’elle a fixée à 8.523.955 FCFA, contrairement à la valeur déclarée en douane de 435.000 FCFA, Madame KAMAGATE obtenait du Président du Tribunal de première instance d’Abidjan l’Ordonnance d’injonction de payer n°9325 du 17 août 2001 condamnant la Société MEA à lui payer la somme en principal de 8.523.955 FCFA, outre les intérêts de droit et frais subséquents ; que cette ordonnance a été signifiée le 30 août 2001 à un certain MOUSSA qui représenterait la Société MEA et qui aurait refusé de viser l’exploit ; que ce n’est qu’en décembre 2001, date de la saisie de ses comptes bancaires que la Société MEA dit s’être rendue compte de l’existence de la décision de condamnation prononcée contre elle ; qu’ainsi, elle avait formé opposition contre ladite décision tout en plaidant la nullité de l’exploit de signification ; que par Jugement civil contradictoire n°365 du 13 mars 2002, le Tribunal de première instance d’Abidjan avait déclaré l’opposition de la Société MEA irrecevable comme tardive ; que sur appel de la Société MEA,  la Cour d’appel a, par arrêt n° 45 du 17 janvier 2003 dont pourvoi, confirmé le jugement entrepris ; que la Cour Suprême de Côte d’Ivoire, après avoir relevé que l’affaire soulève des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution s’est, par Arrêt n°618/03 du 13 novembre 2003, dessaisie et transmis l’ensemble du dossier à la Cour de céans ;

 

Sur le moyen unique

 

Vu l’article 8 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;

 

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 8 de l’Acte uniforme susvisé en ce que, pour rendre son arrêt confirmatif, la Cour d’appel d’Abidjan a considéré que le défaut d’indication dans l’exploit de signification des intérêts et frais de greffe n’entachait pas la validité de cet acte  au motif que cette mention dans l’acte de signification n’est pas une condition de validité de cet exploit surtout que le créancier peut ne demander que le principal  alors que, selon le moyen, en décidant ainsi, la Cour d’appel donne de l’article 8 susvisé, une interprétation incompatible avec son sens exact car, il ressort de cet article que la sommation de payer vise aussi bien le principal de la créance que les intérêts et frais de greffe ; que l’absence d’indication des intérêts et frais de greffe équivaut à une absence de sommation concernant ces chefs de demande ; qu’en reconnaissant que l’acte de signification ne contient pas l’indication des intérêts et frais de greffe, sans en appliquer la sanction prévue par le texte, la Cour d’appel a violé l’article 8 susvisé et sa décision encourt cassation ;

 

Attendu qu’aux termes de l’article 8 de l’Acte uniforme susvisé, « à peine de nullité, la signification de la décision portant injonction de payer contient sommation…soit à payer au créancier le montant de la somme fixée par la décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisé… » ;

 

Mais attendu qu’il résulte de l’examen des pièces du dossier de la procédure que pour déclarer que l’acte de signification n’était pas nul, la Cour d’appel a retenu, « qu’en l’espèce, il faut noter que l’intimée n’a pas réclamé des intérêts dans sa requête aux fins d’injonction de payer ; que dès lors, ce défaut d’indication dans l’exploit de signification n’entâche  pas la validité de cet acte ; qu’en tout état de cause elle est en droit de ne demander que le principal » ; que ladite Cour d’appel ne s’est, à aucun moment, prononcée sur le défaut d’indication des frais de greffe, d’autant que le requérant lui-même n’avait pas invoqué ce moyen dans son acte d’appel valant premières conclusions puisque ayant seulement soutenu que l’acte de signification « ne contient pas sommation à la requérante d’avoir à payer les intérêts de droit dont le montant aurait dû être précisé » ; que lesdits intérêts n’ayant pas été demandés par la défenderesse au pourvoi dans sa requête aux fins d’injonction de payer et n’étant pas précisés en conséquence dans l’ordonnance d’injonction de payer, il ne peut lui être reproché de ne les avoir pas mentionné dans l’acte de signification ; qu’il suit qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel d’Abidjan n’a en rien violé les dispositions susénoncées de l’article 8 de l’Acte uniforme susvisé ; qu’il s’ensuit que le moyen n’étant pas fondé, le pourvoi doit être rejeté ;

 

Attendu que la Société MEA ayant succombé, doit être condamnée aux dépens ;

 

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, après en avoir délibéré,

Rejette le pourvoi formé par la Société MEA ;

La condamne aux dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :

 

                                                                     

 Le Président

 Le Greffier